Les voyageurs étaient des entrepreneurs indépendants, des employés ou des associés secondaires de compagnies qui faisaient la traite des fourrures. Ils étaient munis d’un permis les autorisant à transporter des marchandises aux postes de traite et n’avaient généralement pas le droit de s’adonner eux-mêmes à la traite. Cette activité commerciale a évolué au cours des années, comme les groupes d’hommes qui l’ont pratiquée. Au 17e siècle, les voyageurs étaient souvent des coureurs des bois ‒ des commerçants sans permis chargés de livrer aux peuples autochtones les articles de troc de leurs fournisseurs. La mise en place du régime des permis de traite en 1681 a créé une distinction entre les voyageurs et les coureurs des bois, désormais considérés en quelque sorte comme des hors-la-loi. Aujourd’hui, les deux appellations évoquent l’image romantique d’hommes voyageant en canot à travers le continent pour trouver des fourrures. Leur vie était faite d’aventure périlleuse, de travail éreintant et de joyeuse camaraderie.
Voyageurs et coureurs des bois
À la fin du 17e siècle, il devient de plus en plus difficile d’obtenir un permis de traite (appelé « congé ») et des marchandises à crédit. La mise en place du régime des permis de traite en 1681 permet de distinguer les voyageurs des coureurs des bois. Les voyageurs sont engagés à contrat par des marchands ou des officiers de l’armée titulaires de permis. Les coureurs des bois, eux, sont considérés en quelque sorte comme des hors-la-loi parce qu’ils n’ont pas de permis délivré par les autorités coloniales.
Les voyageurs sont de jeunes hommes engagés pour transporter des marchandises aux postes de traite. Ils n’ont pas le droit eux-mêmes de s’adonner à la traite. Jusqu’en 1705, ils sont à peu près une soixantaine à « voyager » pour le compte de la Compagnie de la Colonie aussi loin que le poste de Detroit (fondé en 1701). Ils gagnent un modeste salaire. Comme la Communauté des Habitants, qui a fonctionné pendant une quinzaine d’années au milieu du 17e siècle, la Compagnie de la Colonie (fondée en 1699) donne aux Canadiens le monopole de la traite des fourrures. Établie durant une période de déclin du marché français des peaux de castor, elle est dissoute en 1706 et les Français retrouvent alors leur monopole.
Voyageurs et engagés
Plus tard, le voyageur devient un « maître de canot » chargé de surveiller des « engagés » qui transportent les marchandises d’un fournisseur vers les Pays d’en Haut et en ramènent des fourrures à Montréal. De nombreux jeunes hommes de la région de Trois-Rivières et des environs de Montréal travaillent à la traite chaque année sans s’y engager pour de bon. Par contre, les fils des habitants en font généralement une carrière. Il faut des années d’expérience et un bon crédit pour devenir voyageur. La compagnie ou le marchand qui prend un voyageur à son service lui permet à l’occasion de commercer pour lui-même, ce que les engagés n’ont normalement pas le droit de faire.
Marchands voyageurs
Les « marchands voyageurs » sont souvent des associés secondaires embauchés à contrat pour trois ans dans des compagnies de traite créées par des marchands fournisseurs et des officiers de l’armée. Certains voyageurs travaillent à leur propre compte et engagent seulement quelques hommes pour manier l’aviron dans un ou deux canots. Quelques-uns ‒ ceux qui ne dilapident pas leurs gains dès qu’ils reviennent à la ville ‒ se font plus tard marchands sédentaires. Ils s’installent et finissent leurs jours à la ville ou à la campagne.
La fin des voyageurs
Aujourd’hui, le mot « voyageur », comme celui de « coureur des bois », évoque l’image romantique d’hommes qui voyageaient en canot à travers le continent pour trouver des fourrures, une vie faite d’aventure périlleuse, de travail éreintant et de joyeuse camaraderie. Mais la traite des fourrures change à nouveau au 19e siècle. Le nombre d’engagés a augmenté au point de faire disparaître le rôle du voyageur. Ce dernier est remplacé par le « bourgeois », qui est souvent un immigrant écossais.
Habillement
Le stéréotype du voyageur arborant une ceinture fléchée est un produit de notre imagination collective, tout comme celui du coureur des bois en manteau de cuir à franges. Les voyageurs et leurs engagés dans la traite des fourrures ont porté différentes tenues au cours des siècles. Aux débuts de la Nouvelle-France, c’est un mélange d’habits européens et autochtones, avec des adaptations coloniales. Certains vêtements disparaissent au fil des années, remplacés par d’autres. Au 19e siècle, les hommes préfèrent le pantalon au pagne indien, qui a lui-même remplacé la culotte française. Mais la tuque (bonnet de laine tricotée) et la capote (manteau à capuchon) demeurent essentiels. (Voir aussiHabillement.)
Culture
Les voyageurs nous ont laissé un important répertoire de chansons, comme Alouette, C’est l’aviron qui nous mène, qui raconte le voyage dans les Pays d’en Haut, et d’autres encore inspirées du folklore français. Pierre Falcon, dit « Pierre le rimeur », a écrit nombre de chansons et de poèmes sur la traite des fourrures.
Chaque année, des festivals et des activités rappellent les voyageurs, en particulier dans l’Ouest canadien, où se tient en février à Winnipeg le Festival du Voyageur, qui fait ressortir toute la richesse de cette époque et la vitalité de la communauté francophone du Manitoba. Au Québec, la ville de Trois-Rivières accueille le Rendez-vous des coureurs des bois, une immersion festive dans la cuisine, la danse et la musique de la Nouvelle-France.