Uummannarjuaq (île Blacklead) | l'Encyclopédie Canadienne

Article

Uummannarjuaq (île Blacklead)

 Uummannarjuaq, qui signifie « comme le cœur d'un gros mammifère marin », est depuis longtemps déjà un camp saisonnier inuit.
Le révérend Edmund Peck et un groupe d'Inuits, île Blacklead, baie Cumberland (avec la permission de Bibliothèque et Archives Canada PA-048034; photo d'Albert Peter Low)
Baleine boréale
La surexploitation de la Baleine boréale a exigé des mesures de protection en 1937 (oeuvre de Heather Caldwell).
Station baleinière sur l'île Blacklead, 1903 (avec la permission de Bibliothèque et Archives Canada (PA-053579); photo d'Albert Peter Low)
L'entrée vers l'île Blacklead, golfe de Cumberland, île de Baffin, 1903-04 (avec la permission de la Commission géologique du Canada et de Bibliothèque et Archives Canada (PA-126895); photo d'Albert Peter Low)
le baleinier neptune près de lîle blacklead, 1903 (avec la permission de bibliothèque et archives canada (pa-053587); photo d'albert peter low)

En 1840, le jeune Inuk Eenoolooapik (Inulluapik) mène le capitaine de baleinier William Penny à la baie Cumberland sur l'île de Baffin. Les Inuits chassent déjà la baleine boréale dans la baie Cumberland depuis des siècles; la région devient maintenant un centre de chasse à la baleine commerciale de l'Arctique de l'Est. Des navires écossais et américains affluent, ainsi que de nombreux Inuits provenant des régions environnantes. La région d'Uummannarjuaq, ou de l'île Blacklead, est l'une des deux bases principales de chasse à la baleine dans la baie Cumberland. Entre les années 1840 et 1930, des générations d'Inuits rencontrent et interagissent avec les nouveaux arrivants sur l'île.

Uummannarjuaq, qui signifie « comme le cœur d'un gros mammifère marin », est depuis longtemps déjà un camp saisonnier inuit. L'île attire les baleiniers en raison de son emplacement stratégique à proximité de la banquise côtière, point de rencontre entre la glace de rive et l'eau libre où la chasse à la baleine prend place au printemps. Dans les années 1850 et 1860, jusqu'à 30 navires visitent la baie Cumberland chaque année, et de nombreux équipages y demeurent pendant tout l'hiver.

Des baleiniers américains et écossais construisent des maisons en bois sur Uummannarjuaq, faisant ainsi de l'île une station permanente. Toutefois, les compagnies de chasse à la baleine se rendent vite compte qu'il est beaucoup plus facile et rentable d'engager des Inuits locaux pour la chasse, et ne laissent qu'un ou deux employés par station baleinière. Les familles inuites mènent la chasse et s'occupent de la plupart des travaux de transformation et d'entretien. Des navires débarquent au cours de l'été pour récolter les produits de la baleine et réapprovisionner les stations en réserves. Les compagnies diversifient également leurs activités en s'engageant dans le commerce de l'huile de phoque, des fourrures et de l'ivoire.

La population d'Uummannarjuaq fluctue au cours de la période de chasse à la baleine. Dans les années 1870, il semble que la population de baleines boréales diminue, et de nombreuses familles inuites ne visitent l'île que de façon saisonnière. Les gens s'y concentrent à nouveau au tournant du XXe siècle, lorsque les prix de la baleine sont si élevés qu'une seule prise est suffisante pour justifier le déplacement d'un navire. En 1909, l'explorateur allemand Bernhard Hantzsch répertorie 168 Inuits vivant autour d'Uummannarjuaq; parmi ceux-ci, 19 sont nés de pères étrangers.

En 1894, les missionaires anglicans choisissent Uummannarjuaq comme emplacement pour leur première mission permanente dans la baie Cumberland. La première église, construite par les Inuits avec des peaux de phoque, est mangée par des chiens affamés. Le révérend Edmund Peck (Uqammak) persiste dans ses efforts et enseigne aux Inuits un système d'écriture syllabique adapté pour l'inuktitut. Ceux qu'il convertit répandront plus tard ce système et le christianisme dans toute la région. La mission devient un lieu de rassemblement populaire où les gens se réunissent pour prier et étudier la Bible, mais aussi pour fumer du tabac, jouer à des jeux, regarder des livres d'images, et faire de la musique.

Uummannarjuaq est souvent un lieu de joyeuses célébrations, surtout lorsqu'une baleine y est capturée, mais la vie y est parfois aussi très dure. En effet, il n'est pas toujours aisé de fournir en viande un si gros campement ainsi que tous les chiens d'attelage qui s'y trouvent et ce, surtout pendant la période de gel à l'automne et lors de la débâcle du printemps. Il y a parfois des pénuries de nourriture et de vêtements de fourrure, et de nombreux Inuits sont atteints de maladies apportées par les navires. Considérant les énormes bénéfices réalisés par les compagnies baleinières, la plupart des baleiniers inuits et non inuits sont très mal rémunérés pour leur travail.

Lors de Première Guerre mondiale, un seul étranger, le commerçant écossais James Law, vit encore sur Uummannarjuaq. Lorsqu'aucun navire ne vient renouveler ses réserves de marchandises commerciales, les Inuits l'aident à survivre. La plupart des familles quittent la station à cette époque et se dispersent, formant de petits campements dans les environs et au-delà de la baie Cumberland. La population de baleines boréales a été décimée. En 1921, une dernière baleine est ramenée à Uummannarjuaq, mais la période de chasse à la baleine commerciale est terminée. La même année, la Compagnie de la baie d'Hudson ouvre un magasin à Pangnirtung, tout en continuant à exploiter de façon intermittente, pendant la décennie qui suit, un petit avant-poste de traite à Uummannarjuaq. Les Inuits, qui ont toujours été baleiniers, se tournent vers un nouveau mode de vie sans la baleine boréale. Aujourd'hui, la population de baleines boréales récupère et un petit nombre de chasses menées par les Inuits prennent place au Nunavut chaque année.

Uummannarjuaq fut reconnu comme lieu historique national en 1985, en raison de son importance en tant que station baleinière et site d'hivernage des navires dans l'Arctique de l'Est entre les années 1860 et le début du XXe siècle, et du large camp inuit présent sur l'île au début de la période de contact.

Lecture supplémentaire

Liens externes