Le Traité de l’Oregon était une entente conclue entre la Grande-Bretagne et les États-Unis. Il est entré en vigueur le 15 juin 1846. Il a officialisé la frontière entre les États-Unis et l’Amérique du Nord britannique à l’ouest des Rocheuses. Il a prolongé la frontière longeant le 49e parallèle, puis l’a fait passer « au milieu » du détroit séparant l’île de Vancouver du continent jusqu’à l’océan Pacifique. Le traité a ainsi résolu un différend important entre les deux nations. Toutefois, comme il ne précisait pas exactement quels canaux la frontière traversait entre l’île de Vancouver et le continent, les deux puissances ont fini par se disputer les îles San Juan. Un conflit diplomatique en a résulté en 1859. Il est connu sous le nom de guerre du cochon.
Origines
À la fin du 18e siècle, plusieurs puissances impériales, notamment l’Espagne, la Russie, les États-Unis et la Grande-Bretagne, cherchent à contrôler la côte du Nord-Ouest nord-américaine. Après 1824, seuls les États-Unis et la Grande-Bretagne poursuivent leurs revendications territoriales dans la région. Ils revendiquent tous deux tout ce qui se trouve à l’ouest de la ligne continentale de partage des eaux, et ce, jusqu’à l’Alaska russe au nord et jusqu’au Mexique au sud (qui, à l’époque, comprend la plus grande partie de la Californie actuelle). Les Américains nomment cette zone le territoire de l’Oregon et les Britanniques, la région de Columbia.
La Convention de 1818 résout certains différends territoriaux hérités de la guerre de 1812 et de litiges précédents. L’entente prévoit que les deux nations occuperont et administreront conjointement le territoire pendant dix ans. Au cours de cette période, les droits de leurs sujets seraient respectés et ceux-ci pourraient faire du commerce librement, comme ils l’entendent. Les revendications de la Grande-Bretagne sont plus solides que celles des États-Unis principalement en raison des activités de la Compagnie du Nord-Ouest.
Quand les discussions entre les deux nations reprennent, les Américains proposent d’établir leur frontière nordique le long du 51e parallèle. Les Britanniques répliquent qu’ils veulent plutôt prolonger celle du 49e parallèle jusqu’au fleuve Columbia. Ils souhaitent ainsi continuer de contrôler la région au nord du fleuve pour protéger leurs intérêts commerciaux dans la traite des fourrures. Cependant, ces négociations ne sont pas concluantes.
« Le 54 o 40 ’ ou la bagarre! »
Le problème demeure non résolu et devient un véritable enjeu politique lors de l’élection présidentielle américaine de 1844. Le candidat James K. Polk, du Parti démocrate, est élu grâce à une plateforme expansionniste axée notamment sur la réannexion de la république du Texas.
Le gouvernement de James K. Polk fait face à d’importantes pressions expansionnistes. Certains commentateurs américains soutiennent que leur pays peut légitimement revendiquer le territoire s’étendant jusqu’à la frontière de l’Alaska russe, à 54 degrés et 40 minutes de latitude. Le populaire slogan « 54-40 or Fight! » (« Le 54 o 40 ’ ou la bagarre! ») représente la position des expansionnistes les plus radicaux. Selon eux, les États-Unis devraient déclarer la guerre à la Grande-Bretagne si celle-ci ne leur laisse pas le contrôle total de la région. (Le slogan est à l’origine du nom du groupe musical vancouvérois 54-40.)
L’annexion de la république du Texas en tant qu’« État esclavagiste » complique également la situation. Annexer le territoire de l’Oregon comme un « État libre » est considéré comme nécessaire pour maintenir l’équilibre entre les États libres et esclavagistes dans les États-Unis d’avant la guerre civile. (Voir aussi La guerre de Sécession et le Canada.)
Signature du traité
James K. Polk est sous pression : on lui dit de n’accepter aucun compromis. Cependant, l’annexion du Texas entraîne une détérioration rapide des relations entre les États-Unis et le Mexique. Une guerre semble imminente et le gouvernement sait qu’il ne peut pas vraiment se permettre de s’engager dans deux conflits en même temps. Les Américains communiquent donc avec les représentants britanniques pour parvenir à un accord.
Les Britanniques désirent également éviter une guerre contre les États-Unis pour ce territoire. Ils acceptent donc les termes du Traité de l’Oregon. (Il s’agit une version modifiée d’une proposition américaine antérieure.) L’entente prolonge la frontière le long du 49e parallèle jusqu’à l’océan Pacifique, mais permet à l’île de Vancouver de demeurer dans l’Amérique du Nord britannique. Les deux puissances s’entendent également pour que les sujets britanniques vivant sur le territoire de l’Oregon au sud du 49e parallèle conservent des droits de navigation sur le fleuve Columbia.
La guerre du cochon
Le Traité de l’Oregon de 1846 ne résout pas complètement le différend frontalier. Le libellé du traité est vague en ce qui concerne le « canal qui sépare le continent de l’île de Vancouver ». Comme il existe plusieurs canaux navigables entre l’île de Vancouver et le continent nord-américain, la propriété des îles San Juan demeure contestée.
Les colons britanniques et américains de l’île San Juan (située à environ 20 km au nord-est du fort Victoria) se méfient les uns des autres. Des accrochages surviennent depuis 1855. En 1859, un cochon s’échappe du côté britannique et traverse du côté américain. Il se retrouve dans le jardin d’un colon américain, qui le tue par balle. Les Britanniques exigent une compensation, et des troupes américaines sont envoyées pour occuper l’île pendant que des navires de guerre britanniques patrouillent le long de la côte.
Les tensions persistent, mais le conflit ne dégénérera jamais en guerre. L’empereur allemand Guillaume 1er se fait arbitre et permet la résolution du différend : en 1872, les États-Unis obtiennent les îles San Juan. C’est ainsi que la frontière entre les États-Unis et la Colombie-Britannique a été officiellement complétée.
Voir aussi L’histoire de la frontière canado-américaine dans l’Ouest; La ruée vers l’or du fleuve Fraser et la création de la Colombie-Britannique; Conflit concernant la frontière avec l’Alaska; Frontières historiques du Canada.