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Télévision payante

La télévision payante, une initiative mise sur pied à titre d'expérience à Etobicoke, en Ontario, entre 1960 et 1965, n'est autorisée officiellement qu'en mars 1982 après dix ans de controverse. L'industrie de la CÂBLODISTRIBUTION la réclamait depuis longtemps pour son potentiel lucratif.

La télévision payante, une initiative mise sur pied à titre d'expérience à Etobicoke, en Ontario, entre 1960 et 1965, n'est autorisée officiellement qu'en mars 1982 après dix ans de controverse. L'industrie de la CÂBLODISTRIBUTION la réclamait depuis longtemps pour son potentiel lucratif. L'idée avait toujours été rejetée par les radiodiffuseurs établis, qui craignaient la concurrence; par les compagnies de téléphone, qui s'opposaient à la prolifération des services de câblodistribution et aux progrès techniques; et par les groupes culturels nationalistes. Le CONSEIL DE LA RADIODIFFUSION ET DES TÉLÉCOMMUNICATIONS CANADIENNES (CRTC) procède, en 1975 et en 1978, à des enquêtes sur le bien-fondé d'une telle entreprise et conclut qu'il serait « prématuré » d'autoriser la télévision payante au Canada. Le CRTC estime que cela ne ferait que fournir un autre créneau pour la programmation américaine et ébranlerait l'assise financière de la radiodiffusion canadienne (voir RADIODIFFUSION ET TÉLÉDIFFUSION; PROGRAMMATION TÉLÉVISUELLE).

Néanmoins, à la demande du ministère fédéral des Communications en 1979, le CRTC entreprend une troisième enquête. À son terme, en 1980, le Comité Therrien recommande l'autorisation d'une industrie concurrentielle. Le ministère des Communications, dont le mandat dépasse celui des objectifs culturels du CRTC, voit dans la télévision payante un bon moyen de stimuler l'utilisation des satellites et d'encourager les progrès dans l'industrie de la HAUTE TECHNOLOGIE. Le gouvernement et le CRTC adoptent alors les recommandations du Comité Therrien.

En 1982, le CRTC instaure donc dans le secteur privé une industrie discrétionnaire de télévision payante sur la base d'une tarification par canal. Six services sont alors autorisés : un service national d'intérêt général (en anglais et en français), trois services régionaux d'intérêt général, un service des arts du spectacle et un service régional multilingue. Par la suite, d'autres services régionaux s'ajoutent à la liste. On impose progressivement à tous les titulaires de licences, sauf au service multilingue, des quotas de plus en plus élevés en ce qui concerne le temps et les revenus qu'ils doivent consacrer à la programmation canadienne. Toutefois, le CRTC choisit de ne pas réglementer les transactions entre les entreprises de télévision payante et les fournisseurs d'émissions, ou les exploitants. Il décide en outre de ne pas réglementer les frais d'abonnement. En février 1983, les services de télévision payante sont opérationnels et ce sont les SATELLITES ARTIFICIELS qui assurent la distribution de la programmation aux compagnies de câblodistribution, qui à leur tour facturent les abonnés environ 16 $ par mois pour l'accès à un seul canal (voir SATELLITE, COMMUNICATION PAR).

La controverse éclate toutefois à nouveau. First Choice, le titulaire de la licence pour le service national d'intérêt général, annonce, en janvier 1983, qu'il se lance dans une entreprise conjointe avec une maison de production américaine en vertu de laquelle 30 millions de dollars seraient consacrés à la réalisation de films « pour adultes » afin de satisfaire aux obligations imposées par la réglementation canadienne. Des manifestations et des milliers de lettres de protestation au CRTC s'ensuivent (voir PORNOGRAPHIE). Le Conseil demande alors à l'industrie d'établir des directives portant sur l'auto-réglementation. Au printemps 1983, il devient évident que des titulaires de licences gonflent leurs investissements pour remplir leurs obligations en matière de programmation. Par exemple, ils inscrivent à leur bilan une importante somme d'argent provenant d'une compagnie américaine et utilisée pour la préproduction d'un projet commun. Ils considèrent que c'est leur contribution exigée par la réglementation du CRTC.

L'industrie est fortement secouée en 1983 et en 1984 lorsque le nombre d'abonnements escompté n'est pas atteint. Le réseau des arts, C-Channel, disparaît après 17 semaines; Star Channel, qui assure les services régionaux de l'Atlantique, connaît le même sort; le service régional de langue française, TVEC, fusionne avec First Choice qui, à son tour, est absorbé par une compagnie de production et de distribution de films. Malgré tout, une nouvelle série de licences est attribuée en 1984 après qu'on ait autorisé les câblodistributeurs à diffuser par satellite des canaux spécialisés, canaux dont les revenus proviendraient à la fois de la PUBLICITÉ et des tarifs d'abonnement. On autorisera par la suite d'autres canaux spécialisés (p. ex., des chaînes d'information, à caractère religieux, pour enfants, etc.). En 1987, il ne reste que deux des chaînes payantes autorisées en 1982, et celles-ci détiennent le monopole régional : First Choice, à l'est du Manitoba, et Superchannel. En ajoutant le canal de films à la gamme des services spécialisés et en éliminant la concurrence directe, l'industrie de la télévision payante devient enfin rentable.

La télévision payante déroge radicalement à la politique de télédiffusion établie à l'origine. D'abord, l'industrie n'a aucune composante de propriété publique ou sans but lucratif. En effet, on met immédiatement sur pied une structure concurrentielle dans le but de faire jouer un rôle important aux forces du marché. Ensuite, on accorde la priorité à une plus grande diversité des sources de production et des choix de visionnement, ce qui contraste avec les objectifs culturels et politiques qui prédominaient jusqu'alors. Enfin, les décisions prises démontrent que, de plus en plus, la politique de l'information est formulée de façon à stimuler la TECHNOLOGIE DES COMMUNICATIONS et que les préoccupations culturelles rattachées à la nature de la programmation perdent de l'importance.

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