L'Office québécois de la langue française est une institution publique québécoise ayant pour mission de définir et de conduire la politique québécoise en matière d'officialisation linguistique, de terminologie ainsi que de francisation de l'administration et des entreprises. L’Office est également chargé d'assurer le respect de la Charte de la langue française. Enfin, il surveille l'évolution de la situation linguistique au Québec et en fait rapport au ministre de la Culture et des Communications, au moins tous les cinq ans.
Historique
Office de la langue française (1961-1974)
Créé en avril 1961, à l’initiative de George-Émile Lapalme, ministre des Affaires culturelles de Jean Lesage, en même temps que tout le ministère des Affaires culturelles et comme prolongement de ce dernier, l’Office de la langue française s’occupe initialement de la promotion strictement incitative du bon parler français, des canadianismes de bon aloi et de toutes sortes de questions concernant la bonne tenue linguistique générale des Québécois francophones, à l’oral et à l’écrit.
Régie de la langue française (1974-1977)
Dès 1969, le mandat de l’Office de la langue française est sensiblement élargi, pour incorporer la promotion du droit de travailler en français. Mais c’est en 1974, sous Robert Bourassa, avec la Loi sur la langue officielle du Québec (dite « Loi 22 »), que l’organisme devient la Régie de la langue française. Son rôle gagne alors une nette dimension juridique puisque la Régie est responsable de formuler puis de « régir » un ensemble de dispositions faisant du français la langue officielle du Québec.
Office de la langue française (1977-2002)
Dans sa version mise en place en 1977, sous René Lévesque, par le ministre d'État au développement culturel Camille Laurin, l'Office de la langue française est profondément réorganisé par la Charte de la langue française (dite « Loi 101 »). Remplaçant la Régie de la langue française, l'Office devient alors responsable de la mise en oeuvre de la charte. S’instaure alors une série d’interventions fermes en matière de langue de scolarisation et d’affichage qui suscitent des débats particulièrement acrimonieux (voir Politique linguistique du Québec). Le travail de l’Office se complète alors aussi de celui d’organismes associés mais distincts de lui, la Commission de toponymie du Québec, la Commission de surveillance et des enquêtes et le Conseil de la langue française.
Office québécois de la langue française (depuis 2002)
Comme des jugements de la Cour Suprême du Canada invalident, à partir de 1979, certaines des dispositions de la Charte de la langue française, l’année 2002 voit se mettre en place, sous Bernard Landry, un certain nombre d’atténuations des pouvoirs discrétionnaires de l’Office en matière de langue d’affichage et d’enseignement. S’il est graduellement restreint, d’une part, par les contraintes issues des jugements de la Cour Suprême du Canada, le pouvoir de l’Office se trouve d’autre part augmenté. En effet, il absorbe la Commission de surveillance et des enquêtes et, de ce fait, il devient l’organisme québécois chargé en exclusivité du traitement des plaintes que peuvent soumettre les citoyens, dans l’éventualité d’infractions présumées à la Charte de la langue française.
Rôles de l’Office
Constitution d’un corpus terminologique officiel
L'Office administre le Grand dictionnaire terminologique du Québec, un volumineux dictionnaire informatisé et bilingue. Aussi, depuis ses débuts, l'Office a publié plus d'une centaine de lexiques, de brochures et de listes prescriptives concernant la dénomination et la traduction terminologique, notamment dans les domaines suivants : l’alimentation, l’assurance, l’automobile, le bureau, la construction, la gestion, l’industrie, l’informatique, la santé et les affaires sociales, les technologies de pointe. Comme l’Office compte au nombre de ses fonctions celle de définir et de mettre en application les politiques de francisation émanant de ses recherches en linguistique et en traduction, le contenu de ses traités et de son dictionnaire de terminologie ont statut de recommandations terminologiques officielles. Si l’Office ne formule jamais vraiment de recommandations directes pour l’entrée de nouveaux mots dans les différents dictionnaires du français, il est entendu que les termes qu’elle promeut ont valeur de soumissions lexicographiques implicites.
Conduite de la politique de planification linguistique québécoise
L’Office est chargé de mettre en application la Charte de la langue française adoptée par l'Assemblée nationale du Québec en 1977. L’Office doit donc garantir que le français soit au Québec la langue usuelle des communications, des milieux de travail, du commerce et des affaires, tant dans la fonction publique que dans les entreprises qui emploient 25 personnes ou plus. Pour réaliser ces objectifs, l'Office offre divers services incluant des avis d'ordre linguistique et des ateliers à l'intention du personnel de bureau. Il est mandaté pour intervenir d’office ou sur plaintes (soumises par écrit et confidentielles, quoiqu’obligatoirement signées) des citoyens, dans l’éventualité d’infractions présumées à la Charte de la langue française. Notons que, pour sa part, le Conseil supérieur de la langue française saisit le ministre de la Culture et des Communications de toutes questions générales qu’il juge utile de soulever concernant la langue française au Québec. Pour ce faire, le Conseil peut mener ses propres recherches ou recevoir des mémoires émis par les intervenants sociaux qu’il décide de solliciter. Mais cette activité s’effectue indépendamment du travail de l’Office québécois de la langue française et surtout, l’Office est la seule instance gouvernementale habilitée à directement traiter les plaintes individuelles de citoyens concernant l’application au jour le jour de la Charte de la langue française.
Recherche et documentation sur l’évolution de la situation linguistique au Québec
L’Office mène ou encadre des travaux de recherches descriptifs portant sur l’évolution de la situation linguistique, sociolinguistique et démolinguistique du Québec. Ces travaux sont publiés sur une base régulière et sont rendus disponibles au grand public sur supports papier et électronique, notamment par une bibliothèque virtuelle. L’Office offre également des bourses destinées à la recherche dans le domaine de la linguistique descriptive et prépare les examens de français destinés aux futurs membres des ordres professionnels dont les compétences en français doivent se conformer aux exigences de la charte. L’Office doit faire rapport sur les résultats, globaux ou spécifiques, des recherches linguistiques qu’il mène ou encadre, au ministre de la Culture et des Communications et ce, au moins sur une base quinquennale.
Perception de l’Office par le public
En un peu plus de 50 ans d’activités et d’efforts honorables en francisation et en aménagement linguistique, l’Office s’est taillé, au Québec (et aussi dans le reste de la Francophonie), une réputation d’institution culturelle incontournable. Cette réputation n’est cependant pas toujours favorable ou positive et l’Office a parfois de la difficulté à se détacher d’une image un peu caricaturale de « policiers de la langue » (selon le mot de Léandre Bergeron). Chez les Québécois francophones, l’Office apparaît comme une instance normative un peu vétillarde et presque ridicule, corsetant arbitrairement la langue usuelle des Québécois et entravant la liberté verbale du joual. Chez les Québécois anglophones, l’Office apparaît comme l’instance gouvernementale compromettant la liberté d’expression en restreignant l’anglais dans la langue de travail et de l’affichage commercial. Aussi, au fil des ans, un autre des rôles non écrits de l’Office est graduellement devenu celui d’assurer son propre exercice de relations publiques en justifiant et en légitimant ses activités de planification linguistique et de promotion active de la langue française normée.