Naked Poems, de Phyllis Webb (1965), est une des oeuvres de poésie les plus importantes de son époque car elle propose une nouvelle vision du livre-poème qui va profondément inspirer de nombreux poètes des générations ultérieures. D'une intensité lyrique qui dépasse tout de même la simple déclamation lyrique, Naked Poems est le premier chef-d'oeuvre canadien à avoir créé une poétique : c'est-à-dire que l'oeuvre se compose d'une suite de textes minimalistes ciselés avec précision, ouverte cependant aux possibilités de ce que la troisième section appelle le « non-linéaire ». Robert Kroetsch a peut-être le mieux défini cette oeuvre concise et séminale : « S'agissant de nudité et de lyrisme, comme d'une issue, peut-être d'un réveil, l'être se vit expulser de l'univers lyrique par la force irrépressible du lyrisme même et les principes féroces de la clôture. »
Ce long poème, qui retrace sa propre gestation et où le désir sexuel et le désir d'écrire sont interrogés et intégrés d'une manière novatrice dans la poésie canadienne, trouve maints prolongements ou incarnations chez des poètes tardifs notamment George Bowering, Douglas Barbour, Diana Hartog, Roy Kiyooka, Daphne Marlatt, bp Nichol, Michael Ondaatje, Stephen Scobie, Sharon Thesen et Lola Lemire Tostevin.
Bien qu'il ait manqué de l'inclure dans la première Long Poem Anthology (1979), qui fait valoir l'importance de cette forme dans la poésie canadienne depuis les années 60, Ondaatje écrit à propos de Naked Poems : « Pour moi, cette oeuvre reste l'une des plus belles et des plus fécondes de la dernière décennie. » C'est à ce titre d'ailleurs qu'elle a trouvé sa place dans The New Long Poem Anthology (1991) de Sharon Thesen, une place tout aussi légitime car Naked Poems est un exemple incontournable des poèmes étendus narrant leur devenir propre.