Lucie Pagé, journaliste, réalisatrice et écrivaine québécoise (née le 29 novembre 1961 à Greenwood, Nouvelle-Écosse). Correspondante pour la Société Radio-Canada en Afrique du Sud, Lucie Pagé a été un témoin privilégié de la fin du régime de l’apartheid et de l’avènement du gouvernement de Nelson Mandela. En 25 ans, elle a signé plus de 1 000 reportages, documentaires, articles et conférences sur son pays d’adoption.
Formation et début de carrière
Née de parents québécois, Lucie Pagé a passé les 12 premières années de sa vie en Nouvelle-Écosse, en Ontario et au Manitoba. Lorsqu’elle a 12 ans, ses parents décident de revenir au Québec et elle y fait ses études secondaires et collégiales. Elle décroche un Diplôme d’études collégiales en psychologie au Cégep de l’Outaouais, puis elle s’exile pendant un an en Asie afin de réaliser plusieurs documentaires, entre autres sur la Chine et le Népal.
Revenue au Québec, elle complète en 1985 un baccalauréat en journalisme à l’Université du Québec à Montréal (UQAM). Parmi les premières de sa promotion, elle décroche un stage d’été à Radio-Canada. Elle y restera 30 ans, d’abord comme contractuelle, puis en tant que pigiste. À Radio-Canada, elle collabore à Contrechamp et Le magazine économique et à Radio-Québec (aujourd’hui Télé-Québec) aux émissions l’Indice, Visa Santé et Nord-Sud.
Correspondante à l’étranger
Le 11 février 1990, Nelson Mandela est libéré de prison après 27 ans de détention. Envoyée par l’émission Nord-Sud, elle quitte le Québec pour l’Afrique du Sud et réalise une dizaine de documentaires sur la situation politique et sociale du pays. En 1991, elle devient correspondante pour Radio-Canada en Afrique du Sud et directrice du Département de radiotélédiffusion à l’Institut pour l’avancement du journalisme à Johannesburg (The Institute for the Advancement of Journalism). C’est ainsi qu’entre 1992 et 1993, elle est responsable de la formation des journalistes et des politiciens sud-africains, dont Nelson Mandela.
Au cours de son premier séjour en Afrique du Sud, elle fait la connaissance de son mari Jay Naidoo, un militant politique antiapartheid sud-africain d’origine indienne, devenu ministre responsable du Programme de reconstruction et de développement et puis ministre des Télécommunications dans le gouvernement Mandela (1994-1999). Le couple aura deux enfants. Également mère d’un petit garçon dont elle a la garde partagée, elle fait sans cesse la navette entre son nouveau pays d’adoption et le Québec. Ces déchirements entre deux continents, entre deux vies, marque ses premiers livres.
Essayiste et romancière
Témoin privilégié de la fin du régime de l’apartheid, Lucie Pagé évoque, dans son premier livre intitulé Mon Afrique (2001), les grands bouleversements qui marquent la libération et l’élection de Mandela jusqu'à la fin de sa présidence (1990-1999). Elle partage avec ses lecteurs la vie africaine à travers son expérience de femme, de mère, d’épouse de ministre et de correspondante à l’étranger. Véritable succès de librairie (l’ouvrage est vendu à près de 50 000 exemplaires), Mon Afrique est publié dans plusieurs pays et traduit en anglais sous le nom de Conflict of The Heart. La chaîne de télévision TV5 (France) produit également un documentaire à partir du livre.
Eva, son second livre et premier roman paraît en 2005. Roman historique, il raconte l’histoire d’amour impossible entre une Blanche et un Noir dans l’Afrique du Sud des années 1960 à 1990. Dans Notre Afrique (2006), suite de Mon Afrique, elle décrit l’état de la situation en Afrique du Sud après dix ans de démocratie. Elle traite avec franchise et sensibilité des mariages mixtes et de la situation de l’Afrique à l’heure de la mondialisation.
En 2010, elle publie Encore un pont à traverser, une fable sociale occidentale à saveur sud-africaine, et en 2011, le guide Comprendre l'Afrique du Sud chez Ulysse. À travers ces deux ouvrages, elle tente une fois de plus de faire connaître et aimer l’Afrique et souhaite abattre les préjugés concernant ce continent. En 2014, elle présente au public Demain, il sera trop tard, mon fils, une conversation entre une mère et son fils sur l'état de la planète.
Engagement social et politique
Lucie Pagé a assuré la direction artistique en 2004 de la Grande fête d’ouverture du 25ᵉ Festival international de Jazz de Montréal qui soulignait les dix ans de la fin du régime de l’apartheid. Le spectacle mettait en scène les artistes sud-africains Johnny Clegg, Ladysmith Black Mambazo et la montréalaise d’origine sud-africaine Lorraine Klaasen (voir Musique africaine au Canada). Elle a également réalisé et produit plusieurs documentaires, notamment sur le viol (Toutes les 83 secondes / Every 83 seconds, 1992) et sur les chants de libération d’Afrique du Sud (La route des chants de libération, 2000).
Journaliste indépendante, elle collabore régulièrement au journal La Presse et L’Actualité. On peut aussi l’entendre sur les ondes de Radio-Canada. Elle prononce des conférences sur le métier de journalisme, les questions de justice et de solidarité sociale. Ayant eu la chance de côtoyer pendant plusieurs années Nelson Mandela, elle souhaite continuer à livrer son message d’espoir, de liberté et de résilience : « Le monde est une scène et les gestes de tous les habitants font partie du même drame ».
Prix et récompenses
En 1985, elle remporte le Concours de journalisme des universités francophones de l'est du Canada. Elle obtient aussi, en 1991, une mention spéciale au Festival Vues d’Afrique pour son documentaire sur la santé en Afrique du Sud et en 1993, le Festival des films de l’Afrique australe lui rend le même honneur pour son documentaire sur la violence domestique (When Love Hurts, 1993).
En 2004, le Prix du magazine canadien (National Magazine Awards) lui décerne la médaille d’argent catégorie santé et une mention d’honneur pour son article sur le Phelophepa, un train médical qui voyage dans les zones rurales de l’Afrique du Sud. Cette même année, elle est Présidente d’honneur du Salon du livre de l’Outaouais.
Publications
Mon Afrique (Libre Expression, 2001).
Eva (Libre Expression, 2005).
Notre Afrique (Libre Expression, 2006).
Encore un pont à traverser (Libre Expression, 2010).
Comprendre l’Afrique du Sud (Ulysse, 2011).
Demain, il sera trop tard, mon fils, avec la collaboration de Kami Naidoo-Pagé et Jay Naidoo (Stanké, 2014).