William (Bill) Johnston, hors-la-loi (né le 1er février 1782 à Trois-Rivières, au Québec; décédé le 17 février 1870 à French Creek [Clayton], dans l’État de New York). Surnommé le « pirate du fleuve Saint-Laurent », Bill Johnston était un bandit, un contrebandier et un rebelle qui opérait dans la région des Mille-Îles, entre ce qui est aujourd’hui l’Ontario et l’État de New York.
Jeunesse
En 1784, la famille de Bill Johnston déménage à Bath, près de Kingston, dans le Haut-Canada, où il grandit. Jeune homme, il est fermier, marchand et affréteur (expéditeur de marchandises) sur le fleuve Saint-Laurent. Il décide de participer à la contrebande qui est répandue le long de la frontière avec les États-Unis, surtout à la suite de l’adoption de l’Embargo Act of 1807 par le gouvernement américain, qui restreint le commerce avec les Britanniques. En 1810, Bill Johnston épouse Ann Randolph, une Américaine.
Guerre de 1812
Après le déclenchement de la guerre entre la Grande-Bretagne et les États-Unis en 1812, Bill Johnston fait l’objet de soupçons en raison de ses liens conjugaux et de sa franche amitié avec plusieurs Américains. Les autorités britanniques le soupçonnent de collaborer avec l’ennemi. En juin 1813, il est arrêté et emprisonné. On lui dit qu’il sera détenu pour la durée de la guerre. Tous ses biens, qui valent environ 1 500 £, sont saisis.
Bill Johnston s’évade de prison et s’enfuit vers Sackets Harbor, dans l’État de New York. Aigri de ses pertes et de son traitement par les Britanniques, il offre ses services aux Américains. À l’aide de petits bateaux dont l’équipage est armé et en utilisant ses connaissances des voies navigables des Mille-Îles, il travaille comme espion et voleur. Il terrorise la rive canadienne, et attaque le trafic britannique et canadien sur le fleuve. Il semble être motivé autant par le désir de piller que de se venger. Au Canada, on le considère comme un traître.
Pirate et rebelle
Après la guerre, Bill Johnston s’établit comme marchand à French Creek (aujourd’hui Clayton), dans l’État de New York, centre de contrebande notoire. Il s’impose comme l’un des contrebandiers les plus prospères sur le fleuve. Il compte sur une flotte de bateaux et de nombreuses cachettes dans les îles situées des deux côtés de la frontière internationale. On sait que les îles qui portent aujourd’hui les noms de Wellesley, Abel et Fort Wallace étaient des bases de son gang.
Au début de 1838, Bill Johnston se joint aux chasseurs patriotes, une organisation composée d’aventuriers américains et de fugitifs canadiens de la Rébellion du Haut-Canada ratée de 1837. Les chasseurs patriotes visent à « libérer » le Canada de la Grande-Bretagne. Bill Johnston est nommé « commodore de la marine dans l’Est ». L’« invasion » du Canada par les chasseurs patriotes près de Kingston est ridicule. Toutefois, c’est peu après cette attaque que Bill Johnston commet son acte de piraterie le plus spectaculaire.
Le 30 mai 1838, près des îles Wellesley, Bill Johnston et ses hommes capturent le bateau à vapeur Sir Robert Peel, qui transportait la paie des troupes britanniques du Haut-Canada. Ils débarquent les passagers et les membres de l’équipage, puis transportent plus de 175 000 $ en argent comptant, en bijoux et en argenterie avant de brûler le bateau. Lord Durham, gouverneur général du Canada, offre une récompense de 5 000 $ pour la capture de Bill Johnston. Ce dernier émet une proclamation justifiant la capture du bateau comme étant un acte légitime de guerre.
Le 12 novembre 1838, Bill Johnston participe activement au raid des chasseurs contre le Haut-Canada à Prescott. Il transporte des hommes et des armes de l’autre côté du fleuve. Toutefois, son bateau s’échoue pendant qu’il est sous le feu d’une canonnière britannique. Quatre jours plus tard, les chasseurs sont défaits par les troupes britanniques et la milice canadienne lors de la bataille de Windmill, à Prescott, mais Bill Johnston et un groupe de ses partisans avaient déjà fui la bataille pour retourner du côté américain.
Le gouvernement colonial du Haut-Canada accuse les Américains de soutenir la piraterie. C’est pourquoi les troupes fédérales américaines arrêtent entre autres Bill Johnston et l’amènent à Auburn, dans l’État de New York, pour subir un procès. Il est acquitté des accusations ayant trait au raid de Prescott, mais on l’arrête tout de suite après pour des crimes précédents. Il est amené à Albany, capitale de l’État de New York, où il est déclaré coupable et condamné à un an de prison.
Six mois plus tard, il s’évade et disparaît dans les Mille-Îles. Il réapparaît à Washington avec en main une demande de grâce signée par de nombreux amis et citoyens notables. Le président américain Martin Van Buren ne voulait rien faire à ce sujet, mais le président nouvellement élu William Henry Harrison lui a plus tard accordé un pardon complet.
Héritage
En 1853, Bill Johnston devient gardien du phare de Rock Island, dans les Mille-Îles, poste qu’il occupe jusqu’en 1861. La même année, au début de la guerre de Sécession, lui qui a alors 80 ans se porte volontaire pour l’armée américaine, mais il est rejeté.
Il tient une taverne à Clayton et se livre prétendument encore à la contrebande. On dit que lors de fêtes, la famille Johnston et ses invités mangeaient dans de l’argenterie volée sur le Sir Robert Peel. Il meurt de causes naturelles à 88 ans.
Des chansons et des poèmes célèbrent les exploits de Bill Johnston. Il est aussi le personnage principal d’une pièce de théâtre : Bill Johnston: The Hero of the Lakes. Deux romans romantiques, The Empress of the Isles et The Prisoner of the Border, sont fondés sur son histoire.