Imprimerie
La reproduction de copies multiples est généralement associée à la presse à imprimer. Toutefois, elle peut également comprendre des procédés de reproduction par photocopieur ou copieur électrostatique. Au XXe siècle, l'imprimé n'est plus qu'une partie d'un processus de COMMUNICATION complexe, qui évolue rapidement. Dans sa propre sphère, l'imprimerie est associée à l'industrie des arts graphiques, ce qui comprend la préparation, l'impression proprement dite et les procédés de finition.
Avant de pouvoir imprimer sur du papier, une feuille métallique, du plastique ou du tissu, il faut procéder à des étapes préliminaires : croquis, dessin, graphisme, création de caractères ou de graphiques, préparation du film et du cliché et préparation de la presse. Par le passé, on effectuait toutes ces opérations manuellement ou à la caméra. De nos jours, des photocomposeuses pilotées par des micro-ordinateurs servent à fixer les caractères et à les reproduire directement sur film (positif ou négatif). Les résultats peuvent être stockés et repérés sur bandes ou disques magnétiques et être manipulés dans toutes les formes.
Les procédés de pagination permettent de combiner la similigravure ou l'infographie, la disposition des caractères et la mise en page en une seule opération. Il reste très peu de travail manuel à faire après la remise du manuscrit ou le travail du dessinateur. Avec le matériel moderne, on peut combiner ces éléments dans une page, produire automatiquement un cliché et envoyer l'information par câble ou SATELLITE dans tous les coins du globe, même les plus éloignés. L'édition nationale du GLOBE AND MAIL est transmise par satellite à différents endroits au Canada, où elle est imprimée et distribuée. De plus en plus, on utilise les liaisons par CÂBLODISTRIBUTION et vidéotex pour transmettre l'information ou remplacer l'imprimerie dans de nombreux secteurs (voir TÉLIDON).
Il y a quatre grands procédés d'impression : la typographie, ou impression en relief, qui consiste à soulever l'aire à imprimer par rapport au reste, à encrer ce relief et à l'imprimer directement sur le papier ou le substrat; l'impression à plat, ou impression offset ou lithographie, qui consiste à garder sur un même plan l'image et l'aire à imprimer tout en les gardant distinctes en appliquant le principe selon lequel la graisse et l'eau ne se mélangent pas; l'impression en creux, ou héliogravure, par laquelle l'image est gravée sur une surface cylindrique ou plane, puis encrée et imprimée sur le substrat; la sérigraphie, ou recopie d'écran, par laquelle l'encre est poussée à travers un écran jusqu'au substrat.
Ces dernières années, d'autres méthodes de reproduction de copies multiples ont été élaborées à partir d'un original : la flexographie, impression en relief au moyen de clichés en caoutchouc et d'encres d'aniline; l'impression électrostatique, soit par photocopieur, soit à travers un écran fin; et l'impression par jet d'encre, qui consiste à faire gicler de minuscules gouttelettes d'encre sur le substrat, opération souvent assistée par ordinateur ou ruban magnétique. L'impression par rayon laser est maintenant productive et rentable, et l'impression par électroérosion semble avoir un avenir très prometteur.
Après l'impression proprement dite, il y a les étapes de reliure ou de finition, dont bon nombre d'opérations sont exécutées en continu. Ces étapes peuvent comprendre le pliage, le brochage et le rognage par des coupeuses informatisées ou des dispositifs de découpage sur la presse même. Elles peuvent comprendre aussi le poinçonnage, le perforage en pointillé, le pliage en accordéon comme dans le cas les imprimés commerciaux, le collationnement de nombreuses signatures, l'arrondissage des coins, l'insertion de papier carbone, le laminage et le gaufrage.
Historique
Dans les années 1750, la presse en bois actionnée manuellement (presse à plat ou de « type commun ») est importée des États-Unis ou de la Grande-Bretagne et introduite dans l'Est du Canada. Ce n'est que dans les années 1830 qu'elle est remplacée dans les grands centres par la presse métallique à bras de type Washington. En 1751, Bartholomew Green fils, de Boston, installe à Halifax la première presse, semble-t-il, et en 1752, son associé, John Bushell, lance le premier journal au Canada, le Halifax Gazette. En 1775, peu après le début de la Guerre de l'indépendance américaine, un grand nombre d'imprimeurs expérimentés LOYALISTES arrivent de la Nouvelle-Angleterre, et dès le milieu des années 1780, on trouve des presses à Saint-Jean et à Charlottetown.
En 1764, à Québec, William Brown et Thomas Gilmore, les deux plus importants pionniers de l'imprimerie, fondent La Gazette de Québec. En plus du journal, ils impriment des calendriers, des bons de commande et, un peu plus tard, des brochures et des livres. En 1776, Fleury Mesplet, qui a appris son métier d'imprimeur en France, apporte la première presse à Montréal. Il publie d'abord des ouvrages à caractère religieux, puis en 1778, il commence à publier La Gazette de Montréal (Gazette du commerce et littéraire).
Après sa nomination au poste de lieutenant-gouverneur du Haut-Canada en 1791, John Graves SIMCOE persuade Louis Roy, un Canadien français, d'installer sa presse à Newark (Niagara-on-the-Lake), capitale de la province. Malgré son bref séjour dans la capitale, Roy lance en 1793 le premier journal de la province, l'Upper Canada Gazette. À cette époque, vu l'état embryonnaire du commerce au Canada, la survie des imprimeurs repose surtout sur les abonnements aux journaux, les commandes gouvernementales (impression de proclamations et de lois) et de l'Église (production de tracts innombrables, conséquence des controverses religieuses de l'époque).
Le zèle des missionnaires contribue à accélérer l'introduction de l'imprimerie dans l'Ouest canadien. En 1841, le pasteur méthodiste James EVANS compile un système de signes syllabiques de la langue crie. Incapable de trouver le financement nécessaire à l'achat d'une presse à imprimer, il taille des moules en bois, fait fondre d'anciennes boîtes de thé pour en soustraire le plomb qu'il utilisera pour mouler des caractères, fabrique une presse à bras et, avec de l'encre faite à partir de suie, imprime son livre sur de l'écorce de bouleau. Dans la COLONIE DE LA RIVIÈRE ROUGE, l'impression commerciale voit le jour en 1859 lorsque William Buckingham et William Coldwell commencent la publication du Nor'Wester.
L'imprimerie en Colombie-Britannique naît avec le lancement du journal Victoria Gazette en 1858. Les presses du journal servent également à imprimer différentes proclamations gouvernementales. En 1878, à Battleford, Patrick Laurie fonde le Saskatchewan Herald, et en 1880, Frank OLIVER transporte une presse dans un chariot à boeufs de Winnipeg à Edmonton et commence à publier l'Edmonton Bulletin. En 1897, l'installation de la première presse à Dawson, au Yukon, marque le début de l'impression du Caribou Sun.
Avant les années 1830, les imprimeurs du Canada doivent s'approvisionner aux États-Unis ou en Grande-Bretagne pour acheter des presses, de l'encre, des caractères ou du papier. La presse à cylindre, par exemple, mise au point aux États-Unis en 1830, est adoptée au Canada au cours de la décennie suivante pour les JOURNAUX à grand tirage. En août 1844, George BROWN achète la première presse du genre dans le Canada-Ouest pour son journal The Globe. En 1826, l'Eastwood and Skinner est la première à fabriquer du papier à partir de chiffons dans la région de Toronto, et l'on attribue à Alexander Buntin l'adoption, dans les années 1860, du procédé de fabrication de pâte mécanique en Amérique du Nord, à sa papeterie de Valleyfield (maintenant Salaberry-de-Valleyfield) (voir PÂTES ET PAPIERS, INDUSTRIE DES).
Dans les années 1830, la Montreal Type Foundry (MTF) ouvre ses portes à Montréal. Jusqu'à sa fermeture 40 ans plus tard, elle compte parmi les premiers fabricants de caractères au Canada et est l'un des fournisseurs de presses importées et fabriquées au pays. En 1887, la Toronto Type Foundry (TTF) voit le jour, signe du déplacement du centre de l'industrie de l'impression de Montréal à Toronto. Dès 1898, cette entreprise compte des succursales dans tout le pays, de Halifax à Vancouver. La TTF utilise exclusivement des matrices provenant des États-Unis, et ce n'est qu'en 1967 que Carl DAIR crée Cartier, premier caractère typographique conçu au Canada (voir ARTS GRAPHIQUES ET GRAPHISME).
Parmi les quelques fabricants de presses à imprimer au Canada, aucune entreprise n'est aussi productive et rentable ni ne dure aussi longtemps que la Westman and Baker de Toronto. De 1874 à 1922, cette entreprise fabrique des presses Gordon (invention de l'Américain G.P. Gordon en 1858) ainsi qu'un vaste éventail de matériel pour les imprimeurs et relieurs de tout le pays.
Deux modèles de machine Linotype sont fabriqués au Canada. Le premier modèle est fabriqué à Montréal par la Linotype Company en 1891, et le deuxième, par la firme canado-américaine Linotype Co. Ltd. de Toronto, après avoir fait l'acquisition de l'entreprise de Montréal. Les deux modèles sont exportés en Australie, en Amérique du Sud et en Afrique du Sud et font concurrence à la Mergenthaler Linotype fabriquée aux États-Unis.
Au fur et à mesure que les ateliers d'imprimerie se multiplient entre 1810 et 1830, des associations ou des syndicats d'imprimeurs se forment à Québec, à Montréal, à Hamilton et à Toronto. En 1832, par exemple, un groupe de 24 compagnons imprimeurs fonde la York Typographical Society en vue d'améliorer leurs conditions de travail. Le mouvement syndical avorte après d'âpres luttes, mais renaît en 1844 sous le nom de Toronto Typographical Union, organisation qui est aujourd'hui le plus ancien syndicat au pays. Ces syndicats représentent d'abord les typographes, les imprimeurs ou les relieurs qui effectuent tout leur travail manuellement, mais au fur et à mesure que le nouvel équipement est introduit et que le travail de composition et d'impression devient de plus en plus mécanisé, les syndicats commencent à représenter divers métiers spécialisés, de sorte qu'à la fin du XIXe siècle, on trouve des syndicats de pressiers, de compositeurs typographes, de stéréotypeurs, d'expéditeurs et de relieurs.
Dès 1900, il existe dans les grandes villes des fédérations comme le Toronto Allied Printing Trades Council. En 1892, John Bayne MACLEAN lance le mensuel Canadian Printer and Publisher, organe officiel de la Canadian Press Association.
Au cours des trois dernières décennies du XIXe siècle, on note de nombreux changements technologiques dans l'industrie de l'imprimerie au Canada. On attribue à W.A. Leggo et à G.-É. DESBARATS, de Montréal, l'invention, en 1871, de la similigravure pour la reproduction graphique. Bien que d'autres personnes aient aussi réclamé cet honneur, il ne fait nul doute que ces Canadiens ont joué un important rôle dans la découverte de ce procédé.
En 1873, l'hebdomadaire Grip est fondé et devient le premier journal à produire ses propres clichés. En 1882, le directeur de la production, Samuel Moore, quitte le journal pour fonder la Moore Business Forms. Cette entreprise fabrique et vend les livrets carbones Paragon Sales. En 1905, le Grip fabrique les quatre premières plaques en quadrichromie au Canada, après quoi les MAGAZINES commerciaux utilisent davantage la couleur dans leurs annonces et illustrations.
Progrès contemporains
Dans les années qui suivent la Deuxième Guerre mondiale, l'impression, la publication et l'édition commerciale connaissent une progression non spectaculaire mais constante. Selon Statistique Canada, dans le secteur regroupé sous l'appellation « imprimerie, édition et industries connexes » (qui comprend les entreprises de clichage, de composition et de reliure), on notait que le nombre d'établissements était passé de 3 650 en 1970 à 5 280 en 1984. On enregistrait également une augmentation du nombre d'employés, qui était passé de 84 041 à 114 047, avec des salaires totalisant 2,76 milliards de dollars. La valeur des livraisons était également à la hausse (de 1,5 milliard à 8,66 milliards de dollars), et l'on prévoyait, pour l'année 1986, qu'elle allait atteindre près de 10,6 milliards de dollars.
En même temps, bon nombre d'ateliers d'« impression instantanée » ont vu le jour, et même des industries n'ayant aucun lien avec l'imprimerie ont établi des ateliers d'impression et de finition dans leur usine même, ce qui représente maintenant une part substantielle du monde de l'imprimerie. Par conséquent, le nombre d'imprimeries commerciales a peu augmenté. Cette croissance a en quelque sorte été ralentie par les fusions et les acquisitions réalisées par les grandes entreprises et par l'installation d'ateliers d'imprimerie dans les secteurs gouvernemental et privé.
Depuis l'invention et l'utilisation généralisée des ordinateurs personnels, on note un changement majeur dans la production de documents imprimés. Les ordinateurs personnels permettent de faire de l'édition et de la mise en page électronique, et, grâce aux imprimantes laser, on peut photographier ou produire directement les textes ou illustrations sur des plaques offset, prêts à être imprimés. Il est aussi possible maintenant d'effectuer le travail polychrome au scanner, instrument permettant de séparer les couleurs sur film et d'envoyer les séparations directement à un clicheur électronique.
Le Canada est un grand producteur de papier, dont une grande quantité est exportée sous forme de papier journal aux États-Unis et dans les Antilles. Il importe toutefois aussi beaucoup de papiers fins. La plupart des encres servant à l'impression, à l'édition et à l'emballage, y compris celles utilisées dans les ateliers d'usine, sont fabriquées au Canada. Deux entreprises, une située au Québec, l'autre en Ontario, conçoivent et produisent des imprimés commerciaux, des presses et des désenliasseurs. Une entreprise ontarienne crée et fabrique des machines à plier, des machines à encarter, des machines à estamper à grande vitesse et des massicots. Presque toute cette production est exportée principalement en Europe, en Asie et aux États-Unis. En outre, un petit ordinateur inventé à Toronto permettra de convertir des coupeuses et des massicots non informatisés pour qu'ils fonctionnent automatiquement. Le marché intérieur est créé, mais les exportations représentent la majorité des activités commerciales. Du matériel d'étiquetage est également fabriqué au Canada.
En 1974, Mitel Corporation s'est établie à Kanata, en Ontario, en vue de concevoir et de distribuer des dispositifs microélectroniques utilisés dans les communications électroniques. Elle a été la première entreprise à concevoir un matériel complet d'éditique utilisant le laser (Xerox 9700). Les systèmes de Mitel ont été adoptés dans le monde entier et sont utilisés par bon nombre de fabricants américains dans la production de systèmes de communication.
En 1986, la valeur des importations d'encres d'imprimerie atteignait quelque 22,6 millions de dollars, et 95,1 p. 100 (près de 21,5 millions de dollars) de ces importations venaient des États-Unis. Au cours de cette même année, les importations de matériel d'arts graphiques totalisaient environ 39,6 milliards de dollars, et les États-Unis conservaient leur rang du plus important fournisseur au Canada (30,5 milliards de dollars, soit 77,1 p. 100). Les importations, par catégories, ont atteint les montants suivants, en dollars canadiens : machinerie et outillage, 708,1 millions de dollars; papier et produits du papier, 942,8 millions de dollars; matériel imprimé, 1,47 milliards de dollars; pellicules et feuilles en matière plastique, 478 millions de dollars; autres produits divers, 292,6 millions de dollars.
Voir aussi ALMANACHS ANCIENS; ÉDITION DE LANGUE FRANÇAISE; GRAVURE.