Géographie
L'île entière est entrecoupée de fjords et la côte Nord est prolongée par des banquises de glace, soit des nappes de glace de mer fusionnées au rivage. Le Nord est dominé par les montagnes Grant Land, une chaîne irrégulière de roches sédimentaires vieille de quelque 100 000 ans et enveloppée d'une épaisse couche de glace de près de 2 000 m, vestige de la dernière époque glaciaire. Des flèches rocheuses, appelées nunataks, émergent de la glace, le pic Barbeau (2616m) étant le plus haut sommet de l'Est de l'Amérique du Nord. Les terres plongent vers le sud jusqu'au plateau de Hazen, presque entièrement recouvert par le lac Hazen, le plus grand lac de la région polaire. Au centre de l'île, les montagnes de la ceinture orogénique atteignent 2000m.
Écologie
L’île d’Ellesmere est un véritable désert polaire. Elle ne reçoit que 70 mm de précipitations annuelles en certains endroits. La végétation y est par conséquent très clairsemée. L’île abrite cependant une flore diverse malgré sa situation dans l’Extrême-Arctique. On y a notamment dénombré 151 espèces de mousse. Le parc national du Quttinirpaaq a été créé en 1988 dans la partie nord de l’île.
Faune
Le paysage d'Ellesmere est spectaculaire et l'environnement y est exceptionnel, bien que fragile. De petits troupeaux de bœufs musqués sont dispersés ça et là sur le plateau de Hazen. Il en est de même des vestiges d'un troupeau de caribous décrit par l’explorateur de l’Arctique Robert E. Peary lorsqu'il a tenté d'atteindre le pôle Nord en 1909. De nombreuses espèces d'oiseaux et plusieurs autres mammifères terrestres y vivent, mais les glaces marines côtières découragent la présence de mammifères marins. On trouve 13 espèces d'araignées sur l'île d'Ellesmere. Bien que le climat y soit extrême, l'étrange microclimat du lac Hazen produit des étés étonnamment chauds. La période exempte de gel du fjord Tanquary dure en moyenne de 50 à 60 jours.
Préoccupations environnementales
La glace de mer autour de l’île d’Ellesmere a diminué de manière importante au cours des 25 à 50 dernières années. Le réchauffement climatique se poursuivant, les climatologues pensent que la glace va continuer à régresser. D’énormes plaques glaciaires telles que les plateformes de glace Ward Hunt et Ayles ont perdu des centaines de kilomètres carrés en superficie. Ces changements altèrent l’habitat des communautés microbiennes aquatiques qui jouent un rôle important dans l’écosystème de l’Arctique.
Le rétrécissement des plaques glaciaires menace d’extinction non seulement les ours polaires mais aussi les phoques, les morses, les caribous et bien d’autres espèces. Aucun des modèles climatiques standards qui incorporent la glace de mer n’a permis de prévoir un déclin aussi rapide, ce qui montre que la glace de mer de l’Arctique est plus sensible que ce que l’on pensait aux changements climatiques. Durant l’été 2005, une plaque de glace de 65 km2, le plateau de glace Ayles, qui s’est jeté dans l’océan Arctique pendant plus de 3000 ans, s’est abruptement détachée et s’est mis à dériver le long d’un fjord sur la côte nord de l’île d’Ellesmere. En fait, 90 pour cent des 10 000 km2 de plaques glaciaires qui existaient encore en 1906 lorsque Peary a arpenté pour la première fois la région ont aujourd’hui disparu.
Histoire
L'un des endroits les plus isolés au monde, l'île d'Ellesmere est peu fréquentée (voir Exploration de l'Arctique). Des observations archéologiques démontrent toutefois que les fjords du plateau de Hazen furent habités il y a quelque 4000 ans.
Le peuple de Dorset a occupé la Côte Est de l’Arctique pendant près de 2000 ans avant de disparaître aux alentours de 1400 après J.-C. Le peuple de Thulé (ancêtres des Inuits) sont arrivés dans la région aux alentours du 12e siècle. De nombreux artefacts Scandinaves, notamment des lames de couteau et une épave de bateau, ont été retrouvés sur la presqu'île Bache (au centre de l'île) lors des fouilles des maisons d'hiver de la culture Thulé datant de 1250 à 1350 après J.-C.
L’île a été aperçue parWilliam Baffin, mais n’a été explorée qu’à partir du 19e siècle. John Ross découvre une partie du littoral en 1818, mais l'île reçoit son nom du comte d'Ellesmere au cours de l'expédition d'Inglefield en 1852.Sir George Nares mène des recherches approfondies dans la région en 1875-1876. Dans le cadre des activités de la Première Année polaire internationale, un groupe d'Américains dirigé par A. W. Greely explore à fond la partie Nord de l'île depuis une base installée à Discovery Harbour (1881-1884). L'expédition se termine de façon tragique, les navires de ravitaillement n'arrivant pas à destination; seulement 7 des 26 membres de l'équipe survivent.
La plus grande partie de l'exploration de l'île se fait en marge d'autres expéditions pour découvrir le pôle Nord. Entre 1898 et 1902, Otto Sverdrup dresse la carte de plusieurs îles de la région de l'île d'Ellesmere. En 1903 et 1904, le gouvernement canadien y envoie Albert P. Low pour établir la souveraineté canadienne; il érige un cairn au point le plus septentrional et y plante un drapeau.
Un camp de recherche est installé au lac Hazen pendant l'Année géophysique internationale (1957-1958). De nos jours, on trouve un poste saisonnier de la Gendarmerie royale du Canada à Alexandra Fjord. Grise Fiord, en outre, est une importante collectivité autochtone. Des Arctique sont établies à Eureka et à Alert, la station la plus au nord de l'Arctique canadien (82°29´57” de latitude nord). Au laboratoire de recherche atmosphérique dans l’environnement polaire, à Eureka, les chercheurs peuvent effectuer des mesures toute l’année sur toute la hauteur de l’atmosphère, de la surface des océans jusqu’à la stratosphère, afin de suivre sa composition, notamment la concentration de l’ozone et d’autres gaz connexes. L’île d’Ellesmere a également été le siège d’une campagne de recherche durant l’Année polaire internationale, en 2007 – 2008. En 2012, Canada Coal Inc. a lancé des travaux d’exploration visant à étudier les immenses dépôts de charbon de la péninsule Fosheim, sur l’île Ellesmere.