Guibord, affaire
L'un des épisodes les plus dramatiques du conflit entre le catholicisme et le libéralisme au Québec est la fermeture de l'INSTITUT CANADIEN ordonnée par l'évêque de Montréal. Fondé en 1844, l'Institut met à la disposition de ses membres une bibliothèque qui contient des livres interdits par la Congrégation de l'Index du Vatican. Mgr Ignace BOURGET considère que les activités de l'organisme menacent la foi des Canadiens français et que son existence même est un défi à l'autorité de l'Église. En juillet 1869, avec l'appui de Rome, l'évêque prononce l'interdit contre l'Institut. En novembre 1869, Joseph Guibord, qui n'a jamais renoncé à son statut de membre, meurt. Mgr Bourget refuse qu'il soit inhumé en terre consacrée. Ce geste déclenche une lutte violente qui dure plus de cinq ans. La veuve de Guibord, Henriette, poursuit l'évêque et, en 1874, après une série d'appels, le comité judiciaire du Conseil privé renverse la décision de Bourget. Entre-temps, la dépouille de Guibord repose dans un cimetière protestant. Le 2 septembre 1875, une foule de catholiques indignés fait échouer la tentative d'enterrer le corps dans un cimetière catholique. L'inhumation a finalement lieu le 16 novembre, grâce à la présence d'une escorte militaire armée. Mais Mgr Bourget a tout de même le dernier mot. Après l'enterrement, il désacralise le lot du cimetière où repose Guibord. L'Institut canadien ne survit pas à cette affaire. N'ayant plus qu'une poignée de membres, il disparaît bientôt de la vie publique.