George Brown et le Globe | l'Encyclopédie Canadienne

Éditorial

George Brown et le Globe

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La devise qu'adopte George Brown dans son nouveau journal, le Globe, lui donne un ton combatif. Elle est tirée des lettres de Junius, ardent défenseur de la liberté qui ne mâche pas ses mots face au gouvernement de George III : « Le sujet qui est vraiment loyal au premier magistrat ne conseillera jamais des mesures arbitraires ni ne s'y soumettra. » [traduction libre] En quelques années, le Globe, paru pour la première fois le 5 mars 1844, se retrouve au cœur du discours politique au Canada.

Brown grandit à Edinburgh, en Écosse, couvé par sa mère et ses sœurs qui l'idolâtrent. Il fréquente la célèbre école secondaire qui a formé des hommes comme David Hume et Adam Smith. Il y développe un intellect puissant qui sera au service de sa forte personnalité.

Les réformistes de George Brown se décrivent eux-mêmes comme « honnêtes et transparents » (Avec la permission de Bibliothèque et Archives Canada/C-26415).

Les Brown immigrent à New York où ils lancent un hebdomadaire, le British Chronicle. George plaide pourtant en faveur d'un déménagement au Canada où « il n'existe aucun poste qu'un homme énergique qui a du caractère ne peut raisonnablement espérer obtenir - s'il le veut vraiment et s'il est sain d'esprit!. »

Au Canada, les Brown rebaptisent leur journal le Banner et se rangent rapidement du côté des réformistes de Baldwin. Leurs éditoriaux percutants attirent l'attention, mais l'aîné des Brown demeure néanmoins préoccupé par les questions religieuses. George a besoin d'un journal à lui - une tribune où il pourra se concentrer sur la politique, promouvoir la réforme, attaquer ses adversaires et soulever l'opinion publique. À 26 ans, il fonde le Globe.

Les journaux de l'époque n'ont pas grand-chose à voir avec les productions volumineuses et brillantes d'aujourd'hui. À ses débuts, le Globe compte quatre pages totalement imprimées sur six colonnes. Un exemplaire coûte cinq pence et l'abonnement, une livre par an. La une reprend habituellement des articles substantiels tirés de la presse britannique ou américaine ainsi que des rapports denses des débats parlementaires.

La deuxième page est celle des éditoriaux enflammés et des résumés des événements mondiaux (les dernières nouvelles colportées par le vapeur Hibernia!). La troisième page fait place à la scène locale, notamment une rubrique sur la criminalité en milieu urbain, où il peut être question de pistolets vendus à des enfants et des chiens, une nuisance publique.

La quatrième page est consacrée à des publicités pour des produits tels que le Magical Pain Extractor de Dalley, un antidouleur magique aux propriétés miraculeuses, et les plaisirs incomparables du The Turkish Coffee House and Oyster Depot, un café turc et dépôt d'huîtres. On y décrit aussi les activités d'organismes tels que le bureau anti-esclavage.

Brown est le maître de la dénonciation, et ses ennemis l'accusent d'introduire le terrorisme journalistique au Canada. Quand il s'attaque à un adversaire comme Francis Hincks, par exemple, il est impitoyable. Des mots comme empereur, resquilleur et hyène hypothèquent sérieusement la carrière de Hincks. Les lecteurs de l'époque s'amusaient des éditoriaux comme ceux d'aujourd'hui se distraient avec les pages sportives ou les déclarations péremptoires des chroniqueurs.

Le bureau du Globe de George Brown.

Au fur et à mesure que les opinions politiques de Brown évoluent, le Globe devient le porte-parole du nouveau parti des réformistes, les clear grits, l'ancêtre du parti libéral. Ils partagent leur foi en la démocratie populaire, en l'abolition des privilèges religieux, en un gouvernement simple et peu coûteux, et en l'opposition au pouvoir pernicieux de Rome.

Brown n'est pas un des premiers défenseurs de la Confédération. Il la voit d'abord comme une façon de camoufler l'échec de ses tenants à résoudre les problèmes des Canadas unis. S'estimant avoir été chassé par John A. Macdonald avec la "malignité d'un démon", Brown le traite en ennemi juré. Avec le temps, il doit cependant se rendre à l'évidence : une nouvelle fédération s'impose pour sortir le Canada de son perpétuel état de crise politique et pour garder l'immense potentiel du Nord-Ouest hors des visées des États-Unis.

Finalement, c'est Brown qui dénoue l'impasse politique et prend l'initiative d'assurer la réforme constitutionnelle. Il fait une proposition étonnante à ses adversaires conservateurs : il ne s'attaquera pas à leur gouvernement défaillant à condition qu'ils résolvent la question constitutionnelle.

Alors que la Confédération est encore en chantier, le Globe parvient à doubler les autres journaux, mais aussi le gouvernement canadien en publiant le projet de loi sur la Confédération quatre jours avant qu'elle parvienne au premier ministre.

Le 1er juillet 1867, il fait une chaleur étouffante. Un peu avant minuit, Brown retourne au Globe et écrit jusqu'aux petites heures du matin. L'imprimeur, impatient, attend jusqu'à sept heures le long article qui commence ainsi : « Nous saluons la naissance d'une nouvelle nationalité. » Les honneurs pleuvent sur Macdonald, Cartier et les autres. Le gouverneur général, Lord Monck, écrit à Brown pour lui dire qu'il se sent mortifié de ne pas avoir pu rendre hommage à « un homme dont la conduite en 1864 avait rendu possible le projet d'unification. »

Bien que populiste et démocrate, Brown est de ces libéraux qui croient que Dieu leur a donné le droit de maximiser leurs profits et qui n'ont aucune sympathie pour leurs travailleurs. Il tente inlassablement de payer des salaires bien inférieurs à ceux de l'échelle syndicale. Il mourra des suites d'une blessure infligée par un ancien employé mécontent.