Festival de Stratford | l'Encyclopédie Canadienne

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Festival de Stratford

Le Festival de Stratford est un des plus importants festivals de théâtre classique et contemporain au monde.
Festival de Stratford, affiche du
Conception de John Martin, 1984 (avec la permission du John Martin).
Stratford Festival Theatre
(avec la permission des Canadian Architectural Archives, U. de Calgary)

Le Festival de Stratford s’est appelé antérieurement le Festival shakespearien de Stratford (1953-1957), puis, successivement, le Festival de Stratford (1957-1999), le Festival canadien de Stratford (2000-2008) et finalement le Festival Shakespeare de Stratford (2008-2012). C’est un grand festival annuel de théâtre de répertoire. Il est reconnu internationalement comme un des plus importants festivals de théâtre classique et contemporain au monde.

Fondation et premières années du Festival

En 1951, l’homme d'affaires Thomas Patterson constitue un petit comité de gens du cru afin d'étudier la possibilité de lancer un festival annuel de théâtre dans la ville où il vit, Stratford, sur la rivière Avon, à quelque 177 kilomètres à l'ouest de Toronto. Sa motivation profonde est de trouver un moyen de revitaliser l'économie moribonde de cette ville. Déjà, avant la Seconde Guerre mondiale, Thomas Patterson avait envisagé la possibilité d’un festival en plein air. Ce n'est pourtant qu'en 1951 que l'idée prend chez lui la dimension d’une véritable hantise. Et pourtant, il ne connaît rien au théâtre professionnel et il va même jusqu’à s’imaginer que le kiosque à musique d’un parc pourra parfaitement servir de plateau théâtral, pour son futur festival.

Thomas Patterson touche une subvention de 125 $, émise par le conseil municipal de Stratford. Cela lui permet de mettre son idée en branle. Un comité de bénévoles du festival est alors constitué. Les membres en sont, notamment, Alf Bell (le vice-président de la Seal Power Pistons), son épouse Dama Bell (une architecte), Harry Showalter (le chef d'une entreprise de boissons non alcoolisées), et Dora Mavor Moore (une actrice et la fondatrice de la New Play Society de Toronto). Thomas Patterson tente, en vain, de s'assurer les services de sir Laurence Olivier pour diriger le festival de théâtre. Dora Moore obtient par contre l'aide du dramaturge John Coulter. Ce dernier fait, à son tour, des démarches auprès du célèbre metteur en scène britannique Tyrone Guthrie, qui accepte d'être directeur artistique et de présenter à Stratford un festival Shakespeare dans un théâtre sous chapiteau. Tyrone Guthrie aspire à monter Shakespeare sur une scène pouvant reproduire au mieux la dynamique qui avait cours entre les acteurs et le public dans les salles de théâtre de l’époque shakespearienne. Il convainc les organisateurs du Festival qu'une plateforme ouverte ou une avant-scène prolongée, au point d’être partiellement cernée par les estrades montantes contenant le public, se prêterait mieux à la dramaturgie shakespearienne qu'une scène conventionnelle, encadrée. Il insiste cependant pour que son dispositif scénique soit installé dans un espace couvert et non exposé aux intempéries. Pour concevoir ce dispositif scénique, il engage Tanya Moiseiwitsch, une décoratrice de théâtre déjà bien connue en Grande-Bretagne. Pendant que la décoratrice se met à l’ouvrage, le chapiteau (conçu par l'architecte canadien Robert Fairfield) est fabriqué à Chicago, puis transporté à Stratford. Il y est finalement monté, sous la supervision de Roy « Skip » Manley, un spécialiste américain des constitutions de chapiteaux, qui a travaillé partout en Amérique du Nord et en Amérique du Sud, principalement au service du Ringling Brothers Circus.

Les répétitions ont lieu dans une vieille grange cernée par des volées de moineaux en pleine danse nuptiale. Les acteurs et les actrices y sont exposés en permanence à des chutes d'œufs. L'entreprise est de plus grevée de problèmes financiers. Tyrone Guthrie accepte un très modeste cachet initial. L'entrepreneur Oliver Gaffney refuse, pour sa part, d'interrompre la construction du dispositif scénique, malgré le manque de fonds. Le Festival démarre le 13 juillet 1953. La saison s'étend sur six semaines. On présente Richard III, avec Alec Guinness dans le rôle-titre, ainsi que Tout est bien qui finit bien, mettant aussi en vedette Alec Guinness, dans le rôle du roi de France mal en point, ainsi qu’Irene Worth dans le rôle d'Hélène. L'année suivante, en 1954, la saison dure neuf semaines. On présente notamment la pièce de Sophocle Œdipe roi, dans la traduction anglaise de W.B. Yeats.

En 1955, on incorpore des programmes musicaux au Festival. Sont alors introduits des concerts de toutes sortes, du jazz, de la musique pop, de la musique symphonique, de l'opéra, de l'opéra-comique et des récitals. En 1957, le théâtre du Festival, conçu par l'architecte canadien Robert Fairfield, remplace le grand chapiteau. Son coût s'élève à plus de deux millions de dollars.

Le Festival de Stratford grandit et mûrit

Tyrone Guthrie cède la position de directeur artistique à Michael Langham (saisons de 1956 à 1967). Se succèdent par la suite dans ces fonctions : Jean Gascon (1968-1974), Robin Phillips (1975-1980), John Hirsh (1981-1985), John Neville (1985-1989), David William (1990-1993) et Richard Monette (1994-2007). Richard Monette détient le record de longévité au poste de directeur artistique du Festival et il est le seul à avoir fait monter, au cours de son mandat, toutes les pièces du canon shakespearien. Après le départ de Richard Monette, le Festival prend un nouveau virage administratif. Il installe Antoni Cimolino, ancien acteur et directeur général de la compagnie théâtrale du Festival, au poste de gérant général. On lui adjoint, en tant que codirecteurs artistiques, Des McAnuff, Don Shipley et Marti Maraden (ancienne actrice de la compagnie théâtrale du Festival et directrice de la section anglaise du Centre national des arts). En 2008, Des McAnuff est le seul directeur artistique. Il le reste jusqu'en 2012, année où il est remplacé par Antoni Cimolino. Né à Sudbury, en Ontario, Antoni Cimolino se joint, comme acteur, à la compagnie théâtrale du Festival en 1988. Il met en scène sa première production solo, en 1997. Il œuvre ensuite comme gérant général puis comme directeur général du Festival de Stratford, avant d’en devenir le directeur artistique.

Le Festival de Stratford a fait brûler les planches à de nombreux acteurs et actrices. On peut nommer William Shatner, William Hutt, Tony Van Bridge, Douglas Campbell, Richard Monette, Frances Hyland, Douglas Rain, Kate Reid, John Colicos, Christopher Plummer, Colm Feore, Brent Carver, Seana McKenna, Stephen Ouimette, Tom McCamus et Lucy Peacock. Il a aussi grandement contribué à la formation de comédiens, de scénographes, de techniciens et de metteurs en scène canadiens (voir Scénographie et conception de costumes).

Une des importantes contributions de Richard Monette au Festival est la création, en 1998, d'une école d'art dramatique, le Birmingham Conservatory for Classical Theatre Training. Cette école d'art dramatique est d'abord placée sous la direction de feu Michael Mawson et, plus tard, sous celle de David Latham. La durée du programme de formation est de 20 semaines. Cela inclut la pose de voix, l’éducation du mouvement, et le travail d'interprétation des textes. La formation se conclut par la présentation d'une pièce classique devant un auditoire invité. Les acteurs et les actrices sont ensuite intégrés à la compagnie théâtrale du Festival. En 2008, c’est l’actrice chevronnée Martha Henry qui devient la directrice de cette école d'art dramatique et David Latham devient directeur de la formation théâtrale classique.

Le dispositif scénique du théâtre principal, conçu par Tanya Moiseiwitsch en collaboration avec Tyrone Guthrie, est révolutionnaire pour son époque. Guthrie veut une scène élisabéthaine, ouverte sur trois côtés, sans toutefois chercher à reproduire un modèle archaïque de salle de théâtre. L'amphithéâtre est à pente prononcée. Il encercle la scène en un balayage de 185 degrés. La salle compte 1 838 places mais le spectateur, qu’il soit sur n’importe lequel des trois côtés de la scène, n'est jamais à plus de 19.8 mètres de celle-ci. Avec le temps, le Festival s’est porté acquéreur de deux salles supplémentaires. Le théâtre Avon (1 083 places), au centre-ville de Stratford, est acheté en 1963 et modifié par Tanya Moiseiwitsch. Il dispose, lui, d'une scène et d’une avant-scène traditionnelles. Depuis 1971, le Festival présente aussi des pièces de théâtre et des spectacles de musique au théâtre Tom Patterson, un théâtre de poche modestement équipé, tout à fait adapté aux ateliers, aux œuvres expérimentales et à la formation des jeunes acteurs. En 2002, sous la direction artistique de Richard Monette, l'ajout du Studio Theatre est un des événements faisant partie des célébrations du 50e anniversaire du Festival. Situé derrière le théâtre Avon, le Studio compte 260 places disposées sur trois côtés de sa scène. Il a été construit pour présenter des œuvres expérimentales, de nouvelles pièces, ainsi que des pièces classiques rarement montées.

Le Festival de Stratford jouit d'une renommée internationale. Son répertoire comprend des pièces classiques et modernes ainsi que des concerts. Le Festival a grandi considérablement depuis sa saison inaugurale, en 1953. Celle-ci avait duré seulement six semaines et n’avait offert que 42 représentations. Maintenant, la saison dure souvent 31 semaines avec plus de 700 représentations. Le Festival attire régulièrement plus de 600 000 visiteurs. Il dispose d'une administration permanente et fait travailler une centaine d'acteurs et d'actrices.

Le mandat du directeur artistique Antoni Cimolino est prévu pour durer jusqu’en 2022. Ceci coïncidera avec la 70e saison du Festival. En 2012, un an avant qu’Antoni Cimolino prenne les commandes, le Festival déclarait un déficit de 3.4 millions de dollars. Depuis, l’affluence a augmenté de 9 % et les avoirs financiers du Festival sont passés de 56 millions à 71 millions de dollars. Antoni Cimolino a mis en place un certain nombre d’initiatives au sein du Festival. On peut notamment mentionner le Laboratoire, un programme d’ateliers qui fournit un lieu de convergence aux artistes théâtraux pour expérimenter des approches nouvelles dans le traitement des pièces du répertoire classique. Vers la fin de la saison 2016, six productions, mises en place au sein du Laboratoire, auront été présentées par le Festival. Antoni Cimolino a aussi engagé le festival dans le grand projet de filmer l’intégralité du canon shakespearien. La Vie et la Mort du Roi Jean, Antoine et Cléopâtre et Le Roi Lear sont déjà promis à la pellicule. Ils ont été télédiffusés sur la CBC à l’automne 2015.

Subventionné par le Conseil des arts du Canada et le gouvernement de l'Ontario, le Festival de Stratford tire malgré tout le gros de ses revenus de ses ventes aux guichets ainsi que des dons de particuliers. Il possède un service d'archives où sont classés les dossiers concernant l’intégralité de ses productions. Des tournées aux États-Unis, en Australie et en Europe ont aussi affermi sa réputation de chef de file du théâtre classique en Amérique du Nord.

Liste des directeurs artistiques du Festival de Stratford

1953-1955
Tyrone Guthrie

1956-1967
Michael Langham

1968-1974
Jean Gascon

1975-1980
Robin Phillips

1981-1985
John Hirsch

1986-1989
John Neville

1990-1993
David William

1994-2007
Richard Monette

2007-2008
Des McAnuff, Marti Maraden, Don Shipley

2008-2012
Des McAnuff

2012-
Antoni Cimolino

Lecture supplémentaire

Liens externes