Au milieu du XIXe siècle, au moment où une pénurie d'huile de baleine coïncide avec l'invention d'un procédé de raffinage qui permet de transformer « l'huile de roche » en huile à lampe (voir Gesner, Abraham). Depuis, la demande en gaz et en pétrole a connu des hauts et des bas, tout comme les prix et les activités de prospection. Toutefois, indépendamment du marché des produits pétroliers, l'exploration et la production de pétrole demeurent des activités coûteuses. Même en ayant recours à la technologie de pointe, la recherche de gisements pétroliers demande une interprétation créative du territoire. Au Canada, l'exploration et la production de pétrole se pratiquent dans toutes les provinces et les territoires, à l'exception du Nunavut qui accuse un retard en matière d'exploitation pétrolière.
Géologie et géophysique
Le relief de surface offre souvent au géologue des indices au sujet du sous-sol. Parfois, ces indices sont évidents, comme un suintement de pétrole, un dégagement de gaz ou un affleurement de roches sédimentaires ou de fossiles visible sur une couche rocheuse inclinée dans une montagne. Cette couche rocheuse peut avoir jadis constitué un fond marin qui aurait été plié, incliné et exposé à la suite des mouvements constants de la croûte terrestre pendant des millions d'années (voir Tectonique des plaques).
Ces couches rocheuses repliées ou inclinées cachent souvent des gisements de pétrole ou de gaz. En revanche, les pièges à pétrole et à gaz qui servent de réservoir se trouvent souvent à des milliers de mètres sous la surface, et il arrive qu'ils soient recouverts d'une plaine. Les photographies aériennes et les cartes topographiques sont utiles pour déterminer la composition du sous-sol, et la géophysique appliquée l'est encore plus pour cartographier les structures du sous-sol.
La géophysique est l'étude des propriétés physiques des roches, comme le magnétisme, la résistivité et la radioactivité. Parmi les instruments utilisés par le géophysicien, on note le magnétomètre et le gravimètre, qui permettent d'identifier les types de roches. Ces deux instruments ont sans cesse été améliorés depuis leur invention au XIXe siècle. Les roches sédimentaires profondément enfouies sont souvent très denses, et leur teneur en fer et en autres matières détectables au magnétomètre est élevée. Le gravimètre mesure les fluctuations du champ de gravité dues à la présence de roches différentes et aide à localiser certains types de roches sous la surface.
Un autre instrument, le sismographe, permet en quelque sorte au géophysicien d'obtenir une image des formations rocheuses souterraines. Cet instrument utilise le principe de la propagation des ondes sonores, générées par de petites charges de dynamite ou par des méthodes de percussion ou de vibration. Au cours de leur déplacement vers le bas à travers divers types de roches, elles sont successivement et partiellement réfléchies vers la surface. L'intensité et la vitesse des ondes réfléchies renseignent le géophysicien sur le type et la structure des roches qu'elles ont traversées. En surface, les ondes sonores sont enregistrées par des géophones. Ces appareils très sensibles sont connectés à des ordinateurs qui produisent des « images », c'est-à-dire des sismogrammes qui révèlent au géophysicien la composition de la structure des roches situées en profondeur.
Exploration
La seule façon de connaître avec certitude ce qui se trouve dans ces roches est de forer un puits. Même avec l'utilisation des techniques modernes de la géophysique et de la géologie, le forage demeure une opération risquée. En effet, les chances de succès des forages d'exploration effectués dans une région où il n'y a jamais eu de forage (ou « forage sauvage ») sont plutôt faibles. Un seul d'exploration sur sept, huit, neuf ou dix puits forés trouvera des réserves de pétrole ou de gaz assez importantes pour être commercialisé. Pour être rentable, un puits doit produire suffisamment de gaz ou de pétrole pour justifier les coûts de forage et de mise en exploitation. Sur les terrains pétrolifères dont la richesse est indéterminée, les premiers puits d'exploration ne sont que des essais qui ne visent pas nécessairement à trouver du gaz ou du pétrole. Par contre, après l'analyse d'échantillons et de débris de roches prélevés, ils permettent d'obtenir des renseignements précieux sur la nature des roches et la probabilité d'y trouver du pétrole ou du gaz.
Lorsque les puits d'exploration indiquent la présence de quantités exploitables de pétrole ou de gaz, des puits de développement sont forés afin de déterminer les dimensions et le potentiel du champ. Les chances de succès des forages de développement sont plus élevées, puisqu'environ six ou sept forages sur dix réussissent. Toutefois, le facteur de risque subsiste, parce que la quantité de pétrole ou de gaz peut être insuffisante pour justifier l'exploitation ou la technologie nécessaire peut être trop coûteuse.
Les cycles de forte expansion et de ralentissement qui caractérisent la prospection pétrolière au Canada ne reflètent en rien les quantités de pétrole ou de gaz qu'il reste à découvrir et à exploiter, mais dépendent plutôt de l'équilibre entre l'offre et la demande. Par exemple, le champ pétrolifère Norman Wells, dans les Territoire du Nord-Ouest, découvert en 1920, était considéré comme trop éloigné pour susciter l'intérêt dans le sud du Canada. On ne raffinait sur le site que le pétrole nécessaire pour répondre à la demande locale. Au milieu des années 1970, le développement à grande échelle de Norman Wells est devenu rentable en raison de la diminution des réserves de pétrole et de la hausse des prix.
La technologie a également des effets sur les activités de prospection. Par exemple, l'exploitation intensive de grandes quantités de pétrole lourd dans la région de Lloydminster n'a pu se faire qu'avec l'amélioration des techniques d'extraction.
Forage
Au début de l'exploration pétrolière au Canada, les puits ne sont pas forés, ils sont plutôt creusés à l'aide d'un système de forage au câble. L'installation de forage au câble comporte un lourd trépan à l'extrémité affûtée qui est suspendue à une poulie ou à un câble. C'est par le pilonnage constant du trépan sur le sol que l'on creuse le trou. Vers la fin des années 1920, la plupart des installations utilisent de l'équipement de forage rotatif qui permet de creuser plus profondément et plus rapidement.
De nos jours, le forage s'effectue encore en grande partie à l'aide d'un trépan fixé à l'extrémité de sections de tubes d'acier. Chaque section d'environ neuf mètres est vissée à la section précédente. Le trépan, la masse-tige (qui alourdit le trépan) et les sections de tubes forment le « train de tiges », dont la rotation est assurée par une table de rotation. Le trépan en rotation coupe et broie les formations rocheuses tout en étant lubrifié et refroidi par la « boue de forage », un mélange d'eau ou d'huile, d'argile et de produits chimiques.
Les installations de forage conçues pour les puits très profonds (jusqu'à 5 000 m) sont beaucoup plus lourdes, plus imposantes et plus solides que celles utilisées pour forer à moins de 1 000 m. Pour le forage en mer, les installations sont généralement fixées sur des barges ou des plates-formes qui sont remorquées d'un puits à un autre. Certaines plates-formes de forage sont construites sur des navires automoteurs spécialement conçus à cette fin.
Technologies de forage de fond
Au cours des dernières décennies, de nouvelles technologies ont révolutionné la recherche et la production de pétrole. Le forage horizontal et la possibilité de forer plusieurs puits horizontaux à partir d'un même trou de forage ont notamment transformé le domaine du forage pétrolier. L'amélioration de la conception des trépans, de meilleurs moteurs de fond et de plus gros appareils de forage rendent possible le forage horizontal.
Le geo-steering est l'une des nombreuses technologies révolutionnaires de forage de fond développées depuis les années 1990. Au cours des dernières années, cette technologie a été améliorée grâce à des instruments et des techniques de mesure en cours de forage à fort impact. De manière plus importante, l'industrie peut désormais isoler plusieurs zones de complétion (zones dans lesquelles le pétrole et le gaz sont extraits) dans les puits de forage horizontaux. La fracturation des réservoirs, et donc la production, est ainsi rendue possible à partir de puits horizontaux creusés sur plusieurs kilomètres.
Des innovations rapides en matière d'outils de forage ont été nécessaires pour permettre exploiter les schistes et autres rocs à faible perméabilité porteurs d'hydrocarbures. Le tube de production concentrique est l'outil par excellence des technologies de forage. Il a transformé nombre d'aspects des opérations de forage et de reconditionnement depuis son entrée dans les activités de l'industrie autour de 1990. Il s'agit d'un tube de métal enroulé sur un grand touret utilisé dans les opérations de forage de fond. Les tubes de production concentrique sont souvent utilisés pour effectuer des opérations autrefois réalisées par travail au câble, une opération qui consiste à faire descendre des outils dans un trou de forage au moyen d'un câble électrique. L'outillage du câble transmet à la surface des données sur la condition du trou de forage. L'avantage principal du tube de production concentrique par rapport au travail au câble est qu'il permet d'injecter des produits chimiques dans le tube. Il est ainsi possible d'enfoncer les outils et les produits chimiques dans le trou de forage, alors que le travail au câble fonctionne par gravité.
Le tube de production concentrique revêt une importance particulière dans le contexte de la production de gaz de schiste puisqu'il permet de fracturer le puits au moyen d'un procédé qui pressurise le liquide à des milliers de livres au pouce carré vers un endroit précis du puits. Le roc est ainsi fracturé en gravats, ce qui permet aux hydrocarbures de s'écouler du puits.
Selon le type d'opération, le train d'outils à l'extrémité du tube peut être très simple, comme une buse d'éjection pour les travaux nécessitant l'injection de produits chimiques ou de ciment dans le tube, ou plus élaboré, comme une gamme d'instruments de diagraphie. On utilise aussi le tube de production concentrique pour des opérations de reconditionnement relativement abordables, ainsi que pour le forage à découvert.
Ces technologies ont entraîné des changements au plan économique au fur et à mesure de leur raffinement et de la baisse de leur coût relatif. En effet, les producteurs investissent dorénavant plus d'argent sous terre qu'en surface.
Complétion d'un puits
Les foreurs surveillent constamment la progression du forage pour être en mesure de décider rapidement d'achever un puits pour l'utiliser à des fins de production ou d'abandonner un puits sec. Pendant le forage, on analyse les débris de roche pour déceler des traces d'hydrocarbures. D'autres évaluations et analyses sont également réalisées. Si les résultats indiquent qu'il s'agit d'un puits sec, on lui injecte du ciment et on l'abandonne. Toutefois, si les résultats semblent positifs, on procède à la complétion du puits.
La première étape de la complétion est l'installation d'une « colonne de production », c'est-à-dire qu'on fixe solidement un tube d'acier jusqu'au fond du puits. L'installation de forage est ensuite remplacée par une plate-forme de maintenance montée sur camion. La colonne de production est perforée pour permettre la circulation des liquides et des gaz dans le puits. Les perforations permettent également d'accéder à la formation de production si des activités de complétion supplémentaires sont entreprises.
Grâce aux techniques de complétion devenues rentables, en raison du prix du pétrole et du gaz ou de l'amélioration de la technologie, on peut maintenant obtenir une production intéressante en exploitant des formations dont le potentiel était considéré comme étant minimal il y a quelques années. Par exemple, la fracturation est une technique de complétion courante. Selon ce procédé, on injecte des matières sous haute pression dans le puits pour créer des fissures dans la roche-réservoir et permettre au pétrole ou au gaz de circuler plus facilement.
Production
Puisque le pétrole brut et le gaz naturel sont des ressources non renouvelables, il est primordial d'optimiser les méthodes d'extraction. Seulement 25 % du pétrole contenu dans un gisement typique peut être extrait à l'aide des moyens naturels ou des techniques de récupération primaires. Les techniques d'extraction assistées permettent d'augmenter les quantités extraites de nombreux réservoirs. La méthode par injection d'eau est la plus utilisée. Elle consiste à injecter de l'eau dans la roche-réservoir pour pousser le pétrole vers le puits. Grâce à ces techniques, le taux d'extraction peut dépasser 80 % de la réserve de pétrole.
Le gaz naturel monte en général à la surface sous l'effet de sa propre pression. C'est pourquoi la tête d'un puits de gaz n'est en général qu'une série d'étrangleurs et de vannes qui servent à régler le débit. On appelle ce genre de tête de puits « arbre de Noël ». Le pétrole brut, qui contient généralement une certaine quantité de gaz naturel ou de gaz associés, est parfois poussé à la surface par la pression naturelle qu'il subit, mais dans la plupart des puits de pétrole brut au Canada, le pétrole doit être poussé ou pompé jusqu'à la surface. Les appareils de pompage sont connus sous plusieurs noms : chevalet de pompage, tête de cheval et balancier.
Transport
Le transport du pétrole et du gaz des régions productrices vers les régions consommatrices est d'une importance capitale. Dans les provinces productrices de l'Ouest canadien, les longs trains de wagons-citernes font partie du paysage. Ils transportent une variété de produits comme l'asphalte (produite à partir du brut lourd et utilisée pour goudronner les routes), le propane, le butane et d'autres liquides ou gaz dérivés du pétrole brut ainsi que du gaz naturel. Puisque la production de pétrole augmente au Canada et dans plusieurs régions des États-Unis, les chemins de fer connaissent une croissance rapide du nombre de wagons-citernes transportant le pétrole vers les centres industriels, où celui-ci est utilisé dans un grand nombre de procédés de fabrication industrielle (voir Industrie chimique). L'essor du transport de pétrole sur le réseau ferroviaire soulève des inquiétudes en matière de sécurité, tout particulièrement depuis le déraillement survenu le 6 juillet 2013 à Lac-Mégantic, au Québec.
Avant les années 1950, le chemin de fer et le transport routier étaient les seuls moyens disponibles pour transporter le pétrole et le gaz au Canada. Maintenant, une grande partie du transport du pétrole et du gaz jusqu'aux régions consommatrices est effectué par pipelines. Au même titre que les chemins de fer qui ont joué un rôle important dans le développement du Canada, les pipelines sont devenus partie intégrante de la croissance industrielle à partir de la seconde moitié du XXe siècle.
Raffinage
L'essence, le carburant diesel et le carburéacteur sont les produits pétroliers les plus connus, mais on trouve de tout dans la liste des produits dérivés, des insecticides jusqu'aux shampooings, sans oublier les plastiques. Les procédés de fabrication de ces produits sont souvent complexes, mais tous reposent sur la séparation des composants du pétrole brut nécessaires à la fabrication de sous-produits utiles qui se présentent sous forme solide, liquide ou gazeuse.
Le raffinage commence par le chauffage du pétrole brut jusqu'à son point d'ébullition. Au cours de ce processus de distillation, les divers composants sont vaporisés et condensés séparément en fonction de leur point d'ébullition pour produire des hydrocarbures de base. L'essence, l'huile à lampe, le carburant diesel et le carburéacteur proviennent du distillat moyen, tandis que les graisses, les huiles lubrifiantes, les cires et l'asphalte sont produits à partir de résidus.
Certains produits sont obtenus par mélange, puis améliorés à l'aide d'additifs chimiques pendant le raffinage secondaire, conçu pour leur conférer les caractéristiques voulues. Les raffineries peuvent aussi produire de l'huile de chauffage, du mazout lourd et des matières premières destinées à l'industrie pétrochimique.
Réglementation
La mise en marché du pétrole brut, du gaz naturel et de leurs produits dérivés est complexe. Différents règlements fédéraux et provinciaux régissent les divers aspects de la production et de la vente. Bien que les provinces régissent le pétrole et le gaz produits à l'intérieur de leurs frontières, les prix du pétrole et du gaz, le transport, les ventes à l'intérieur du pays et l'exportation relèvent du gouvernement fédéral. Les gouvernements partagent les revenus provenant des compagnies productrices par l'intermédiaire des taxes fédérales et provinciales et des redevances provinciales.
La propriété du pétrole et du gaz, en particulier dans le cas des réserves sous-marines, le droit au partage des revenus et la réglementation sont de véritables pommes de discorde entre les gouvernements fédéral et provinciaux (voir Politique énergétique). Le transport du pétrole et du gaz entre les provinces, ainsi que l'exportation du gaz et de l'électricité, sont régis par l'Office national de l'énergie.