Famille
Prédestiné au pouvoir, il est issu de la quatrième génération de Lougheed en Alberta. Sir James LOUGHEED, son grand-père, a été le seul Albertain à être fait chevalier et le premier conservateur à faire partie d'un conseil des ministres fédéral. Il a joué un rôle clé dans la création de la province de l'Alberta en 1905. Tout comme lui, son petit-fils, qui passera pour avoir sorti l'Alberta de l'obscurité politique et économique, a la conviction que la province doit avoir le contrôle de ses ressources naturelles et il en fait une pierre de touche de ses politiques lorsqu'il devient premier ministre.Éducation
Peter Lougheed étudie à l'Université de l'Alberta, où il obtient un baccalauréat ès arts (1951) et un baccalauréat en droit (1952). Athlète éminent, il joue au football pour les Golden Bears à l'université et, durant une courte période, pour les Eskimos d'Edmonton. En 1954, il obtient une maîtrise en administration des affaires de l'Université Harvard et est appelé au Barreau l'année suivante. Il pratique le droit à Calgary avant de joindre les rangs de la Mannix Corporation (1956), l'une des plus importantes firmes de construction du Canada, grimpant rapidement les échelons jusqu'à en devenir vice-président (1959), puis directeur (1962).
Chef du Parti progressiste-conservateur de l'Alberta
En 1965, à 36 ans, Peter Lougheed est élu chef de la petite formation politique qu'est alors le Parti progressiste-conservateur de l'Alberta. Au début, il semble bien improbable de pouvoir mener une carrière politique couronnée de succès à la tête d'un parti aussi marginal. Quand Peter Lougheed entre en fonction, le parti n'a aucun député.
Alliant des principes financiers conservateurs à des politiques sociales libérales, P. Lougheed reconstruit le parti pour en faire une force politique reflétant un point de vue moderne et urbain. Il réussit à se faire élire à l'Assemblée législative en 1967 avec une majorité plus grande qu'aucun autre candidat. Les cinq candidats progressistes-conservateurs et lui-même forment alors l'opposition officielle. Le premier ministre social-créditiste Ernest C. MANNING démissionne l'année suivante et est remplacé par Harry STROM. Peter Lougheed considère le Crédit social comme mourant et à l'élection de 1971, les conservateurs sont portés au pouvoir avec 49 sièges sur les 75 de l'assemblée législative. À chacune des élections suivantes, en 1975, 1979 et 1982, la majorité de Lougheed et de son parti augmente, ainsi que le vote populaire en leur faveur.
Le premier ministre Lougheed
Sa première grande mesure est d'augmenter les redevances que les sociétés pétrolières doivent verser à la province. Il est aussi aidé par les événements internationaux, car le cartel dirigé par l'OPEP fait monter le prix du pétrole. Dès le départ, Peter Lougheed s'avère un négociateur tenace, tant en affaires qu'en politique. Il est également habile dans ses relations avec les médias. Sous sa direction, le gouvernement tâche de faire en sorte qu'une plus grande partie des richesses générées par les ressources naturelles de la province reviennent aux Albertains, faisant la promotion du développement industriel et de la décentralisation urbaine tout en améliorant les soins de santé et les sites récréatifs. Cela comprend la construction de nouveaux hôpitaux, le soutien à la recherche médicale, la création de parcs urbains et l'aménagement de l'immense parc « Kananaskis Country », lequel sera rebaptisé en l'honneur de Lougheed en 1986.
La grande réalisation de Peter Lougheed quant au maintien de la qualité de vie des Albertains dans le futur est la création, en 1976, du FONDS DU PATRIMOINE DE L'ALBERTA, qui met de côté une partie des revenus provenant du pétrole et du gaz et qui effectue des placements à long terme. Dans le cadre de ses politiques de développement industriel, Lougheed favorise l'exploitation des immenses réserves de pétrole lourd et de sables bitumineux au moyen de mesures fiscales favorables et d'investissements directs. En 1978, le projet de sables bitumineux de Syncrude Canada, le plus important complexe de combustibles synthétiques au monde, est réalisé avec la participation du gouvernement provincial. On crée également le BUREAU DE RECHERCHE ET DE TECHNOLOGIE DES SABLES BITUMINEUX DE L'ALBERTA afin d'améliorer la technologie de la production de produits pétroliers non conventionnels.
Peter Lougheed s'intéresse également à la diversification agricole, à la recherche médicale et au soutien à la croissance des petites et moyennes entreprises (PME). En 1980, avec un fonds de 300 millions de dollars, son gouvernement crée l'Alberta Heritage Foundation for Medical Research, qui a jusqu'à maintenant attribué directement plus de 650 millions de dollars à la communauté scientifique canadienne. En 1972, le gouvernement met sur pied la Société d'exploitation des possibilités offertes par l'Alberta pour financer les PME innovatrices à risque élevé à qui les institutions traditionnelles ne veulent pas prêter d'argent. En 2001, elle a aidé à financer plus de 7000 entreprises et individus.
Dans les années 70, Lougheed travaille à donner un rôle plus important à l'Alberta dans les prises de décisions à l'échelle nationale, un rôle qui corresponde à son économie en croissance. Il ne tolère aucune incursion du fédéral dans les affaires de la province tout en demeurant partisan d'un Canada uni. Son plus grand affrontement avec Ottawa relativement aux revenus pétroliers donne finalement lieu en 1981, à une entente sur la tarification de l'énergie puis à des accords ultérieurs qui obligeront le fédéral à négocier les ententes sur les prix et les recettes du pétrole et du gaz plutôt que de procéder unilatéralement.
À l'issue des négociations qui ont mené à la LOI CONSTITUTIONNELLEde 1982, il défend avec force la procédure de modification qui, sans donner un droit de veto, offre quand même aux provinces en désaccord une option de retrait devant tout amendement pouvant réduire leurs pouvoirs. Bien qu'il soit plus tard accusé par le Québec d'avoir trahi, lors de la « nuit des longs couteaux », l'entente du « groupe des huit » (toutes les provinces sauf l'Ontario et le Nouveau-Brunswick) pour, selon ses propres paroles, « défendre les provinces contre la technique du rouleau compresseur de [Pierre] TRUDEAU , Peter Lougheed partage plusieurs des préoccupations du premier ministre René LEVESQUE. Il s'oppose à la CHARTE CANADIENNE DES DROITS ET LIBERTÉS, soutenant que « la primauté du pouvoir législatif doit être préservée ».
Le philanthrope
L'un des regrets de Peter Lougheed, en ce qui concerne ses années au pouvoir, est qu'il n'a pas eu assez de temps pour se consacrer à sa passion pour la culture et l'éducation. Toutefois, il a pu concilier les deux en appuyant L'Encyclopédie canadienne, lancée en 1985 pour célébrer le 75e anniversaire de l'Alberta. Lougheed en a financé la recherche, mais a également donné un exemplaire à chaque école et à chaque bibliothèque au Canada.
Les Albertains tiennent P.Lougheed en très haute estime pour ses talents de gestionnaire, son intégrité, son engagement envers le bien-être de la province et ils le lui ont prouvé aux élections de 1975, 1979 et 1982, élections que Lougheed remporte dans des victoires éclatantes. Lougheed domine la politique provinciale de la même façon que Manning l'avait fait, une génération avant, et il donne voix au chapitre aux Albertains, qui sont alors blessés dans leur orgueil et grandement déterminés à se faire entendre sur la scène nationale. Il se retire de la politique à l'automne 1985 pour retourner dans le secteur privé. Au même moment, la tradition « conservatrice rouge » que Peter Lougheed représente est en déclin, aussi bien dans la province qu'au pays.
En 1987, Donald S. MACDONALD et lui sont à la tête de l'Alliance canadienne pour le commerce et l'emploi pour promouvoir le LIBRE-ÉCHANGEavec les États-Unis et, de 1991 à 1996, sur l'invitation de Brian MULTONEY, il copréside le Forum Canada-Japon. En tant que membre de conseils d'administration d'entreprises dont les actifs dépassent les 230 milliards de dollars, Peter Lougheed est une figure unique du monde des affaires, quelqu'un qui croit que le Canada est plus que la somme de ses parties économiques. Malgré son appui inébranlable au libre-échange entre le Canada et les États-Unis, Lougheed s'inquiète de ce que les valeurs américaines gagnent de plus en plus de terrain au Canada.
En 2002, Lougheed accepte de présider le groupe de travail albertain contre l'accord de Kyoto, soutenant qu'il est impossible à mettre en application et se faisant le défenseur d'une solution canadienne. Lors d'une autre campagne, il exprime ses préoccupations quant à la protection des réserves d'eau douce du Canada. Dans un discours de 2004, il insiste sur le fait que le gouvernement de l'Alberta doit traiter l'eau - et non le pétrole ou le gaz - comme la ressource la plus importante de la province. Il demande au gouvernement de résister à toute tentation d'exporter l'eau aux États-Unis.
Honneurs
Peter Lougheed s'est mérité de nombreux honneurs. En 1971, il est nommé conseil de la Reine, en 1982, membre du Conseil privé du Canada et, en 1987, il est fait Compagnon de l'Ordre du Canada. Il est aussi fait chef honoraire (« Thunderbird », 1971) des Cris et des Gens du Sang ou Kainahs (« Crop Eared Wolf ») en 1974. Il reçoit huit doctorats honorifiques et est chancelier émérite de l'Université Queen. En 2001, il est intronisé au Temple de la renommée médicale canadienne en reconnaissance de son engagement permanent pour la recherche en santé. De plus, comme il est un des « éminents champions canadiens de l'investissement du secteur privé dans la recherche en santé », la bourse de nouveau chercheur Peter Lougheed-IRSC est créée en 2005 pour encourager les jeunes chercheurs en début de carrière. Par ailleurs, l'édifice des arts électroniques du Centre d'arts de Banff est nommé en son honneur et en celui de sa femme.
Peter Lougheed a siégé à plusieurs conseils d'administration d'entreprises et, depuis 2000, il est l'un des 13 membres de la Commission trilatérale, un groupe de discussion non gouvernemental axé sur les politiques, et qui compte 325 membres de l'Amérique du Nord, de l'Union européenne et du Japon. De 2003 à 2007 il a servi comme président du Conseil Historica, signe de son intérêt continu pour la culture et l'éducation. Dans les années qui suivent son retrait de la vie politique, Peter Lougheed devient une idole canadienne, étant respecté pour les valeurs qui l'ont guidé dans sa carrière politique - compétence, intelligence et intégrité - ainsi que son dévouement inconditionnel au bien-être des Albertains et des Canadiens.