District de la Distillerie/ Lieu historique national Gooderham & Worts | l'Encyclopédie Canadienne

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District de la Distillerie/ Lieu historique national Gooderham & Worts

En 1832, les immigrants anglais et beaux-frères James Worts et William Gooderham construisent un moulin à vent en brique de 70 pieds en bordure de la baie de Toronto. Celui-ci devient vite un symbole de cette jeune ville.
La distillery Gooderham & Worts
La distillery Gooderham & Worts à son apogée victorien, 1896 (avec la permission du District historique de la distillerie)
Le calage de bois stabilise la rive au sud et à l'est de la distillerie de pierre et forme un quai pour l'élévateur à grains (avec la permission du District historique de la distillerie).

District de la Distillerie/ Lieu historique national Gooderham & Worts

Commémoré en tant que Lieu Historique national, le District historique de la Distillerie de Toronto compte plus de 40 édifices victoriens qui témoignent de l'héritage architectural et industriel de la ville et du pays. Entre les années 1830 et 1890, l'entreprise de Gooderham & Worts se développe, d'un petit moulin à vent situé dans l'arrière-pays, en la plus large distillerie de l'Empire britannique et, pour un temps, du monde entier. Le 20ème siècle apporte la guerre, la prohibition de l'alcool, la globalisation, le déclin et la renaissance en un vibrant district artistique et culturel.

En 1832, les immigrants anglais et beaux-frères James Worts et William Gooderham construisent un moulin à vent en brique de 70 pieds en bordure de la baie de Toronto. Celui-ci devient vite un symbole de cette jeune ville.

Worts apporte au projet ses 20 ans d'expérience en tant que meunier, alors que Gooderham contribue la plus grosse partie du capital ainsi que son sens des affaires. Suite à la mort prématurée de Worts en 1834, Gooderham poursuit le projet seul. La vapeur remplace bientôt l'Énergie éolienne peu fiable. En 1837, Gooderham ajoute une distillerie au moulin à farine, lançant ainsi l'industrie qui deviendra le fondement de plusieurs fortunes et transformera le secteur riverain de Toronto. En 1845, le neveu de Gooderham, James Gooderham Worts, devient partenaire dans l'entreprise; George, le fils de Gooderham, s'y associe également en 1856.

L'entreprise prospère sous leur direction dynamique. Un moulin et une distillerie de cinq étages en calcaire, conçu par David Roberts Sr., ouvre au début de 1861, augmentant la capacité de production de 80 000 à deux millions de gallons par année. La Stone Distillery représente aujourd'hui le plus ancien et large édifice historique du district. Le moulin à vent est démoli au début des années 1860 pour faire place aux édifices servant à la production de tonneaux (Cooperage) et de malt (Maltings), ainsi qu'à d'autres édifices de brique rouge, le long du côté ouest de la rue Trinity.

Les derniers édifices victoriens, principalement conçus par le célèbre architecte torontois, David Roberts Jr., viennent compléter le site au milieu des années 1890. À cette période, les bateaux et le chemin de fer desservent encore tous deux la compagnie, et la bande côtière est allongée afin d'accommoder de nouvelles structures et des quais. Les cheminées fumantes sont symbole de « progrès ».

Au cours de la première guerre mondiale, la distillerie est convertie en industrie de guerre, British Acetones, qui produit un ingrédient clé pour la manufacture de poudre à canon sans fumée. Suite à la guerre, la prohibition de l'alcool se poursuit, et l'entreprise familiale est vendue à Harry C. Hatch, qui fusionne, en 1927, Gooderham & Worts avec Hiram Walker à Windsor. Cela se déroule à peu près au même moment où la prohibition de l'alcool prend fin en Ontario. Hatch ajoute les deux principaux édifices finaux à la Distillerie de Toronto en 1927, et profite énormément de la prohibition américaine qui se poursuit jusqu'à la fin de 1933.

Entre les années 1830 et 1950, le littoral adjacent à Gooderham & Worts est déplacé d'environ 500 mètres au sud. Cette migration prend place progressivement, au fur et à mesure que la compagnie ajoute un nouveau quai dans les années 1840, ou remplace son élévateur à grains dans les années 1880-90, et aussi par grands bonds, lorsque la Compagnie du chemin de fer de Toronto y construit son viaduc surélevé dans les années 1920, et que la Commission du havre de Toronto implémente son plan du littoral à partir de la fin de la Grande Guerre jusqu'aux années 1930. L'entreprise, qui régnait jadis sur le littoral, est maintenant enclavée et desservie par le chemin de fer et les véhicules à moteur.

La distillation du whisky prend fin en 1957, faisant du rhum et de l'alcool industriel les principaux produits. Finalement, au milieu des années 1990, la majestueuse et ancienne distillerie est définitivement fermée. Le futur des édifices du patrimoine demeure incertain jusqu'en décembre 2001, lorsque Cityscape en fait l'achat afin de créer le District historique de la distillerie que l'on connaît maintenant.

Recherches archéologiques

Les recherches archéologiques ont contribué peu d'information concernant les premiers moments de l'existence de la distillerie, et n'ont rien révélé de l'histoire préindustrielle du site.

En novembre 1972, l'arpenteur Joseph Bouchette note que deux familles de Mississaugas ont érigé leurs habitations temporaires en bordure de la baie de Toronto. Le plan du port de Toronto qu'il dessine pour le lieutenant-général John Graves Simcoe montre une « hutte indienne » sur le site où le moulin à vent et la distillerie doivent être érigés 40 ans plus tard.

Bien que ces autochtones ainsi que d'autres avant eux aient certainement voyagé à travers le site et pêché et campé près de la rivière Don, aucune trace d'activités autochtones n'a été retrouvée. Cela est peu surprenant, considérant l'activité industrielle intense qui a pris place sur le site, ainsi que les changements radicaux qui ont été apportés au littoral.

Trois fouilles archéologiques professionnelles ont été menées au district historique de la distillerie: une sur le site du moulin à vent des années 1830, une autre sur le site du littoral victorien au sud de la Stone Distillery, et la dernière sur le domaine de Jame Gooderham Worts, en bordure nord de la distillerie. À ces découvertes s'additionnent des observations informelles, contribuées par d'anciens employés de Gooderham & Worts.

La fouille la plus importante est celle qui a pris place au site du moulin à vent en 2003. La tour de ce moulin des années 1830, composée de 105 000 briques, fut démolie au début des années 1860 pour faire place à de nouveaux édifices qui ont seulement partiellement recouvert le site. Pendant des générations, l'emplacement du moulin à vent fut plus ou moins oublié. Lorsque des travailleurs de la construction installant une infrastructure d'égout ont heurté un mur arrondi au début de 2003, des archéologues ont été engagés pour mener une étude en règle.

Ils ont découvert plusieurs segments de fondations en calcaire situées à 60 cm sous le pavé. Ils calculent que la structure originale de briques mesurait 10,2 m de diamètre à la base, et reposait sur de larges fondations circulaires de 90 cm d'épaisseur composées de débris de calcaire. Une tentative pour déterminer la profondeur des fondations fut abandonnée lorsque de l'eau souterraine se déversa dans l'excavation. Un ancien employé de la distillerie se rappelle que dans les années 1980, d'autres sections des fondations circulaires ont été vues sous un édifice situé plus à l'est.

Les fondations du moulin à vent furent recouvertes de nouveau afin de les protéger, et un arc de briques rouges pâles a été placé directement au dessus afin de commémorer cette structure historique. Le visiteur qui s'y tient peut presque entendre le craquement des ailes du moulin à vent, le grincement des meules, et les cris des travailleurs vaquant à leur besogne.

D'autre information concernant le littoral industriel fut dévoilée de façon informelle, puis formelle en 1999, lorsque du calage de bois fut excavé au sud et au sud-est de la Stone Distillery. Deux différents types de calage ont été examinés, mais leur âge et utilité n'ont pu être déterminés de façon définitive. D'autre calage avait été mis au jour quelques années plus tôt, alors qu'un immeuble à condominiums était en construction un peu plus à l'ouest. Ce calage de bois fut probablement utilisé entre les années 1840 et 1890 afin de stabiliser le littoral pour construire des quais et supporter les élévateurs à grains le long de cette zone de plus en plus industrialisée de Toronto. L'emplacement du calage du district de la distillerie suggère qu'une partie pourrait avoir été reliée à l'élévateur à grains datant des années 1860, qui était connecté à la Stone Distillery, alors qu'une autre l'aurait été avec le plus gros élévateur à grains des années 1880s, situé plus à l'ouest. Certains restes de calage de bois pourraient encore être ensevelis au sud des bâtiments de la distillerie.

Tout comme plusieurs autres industriels victoriens, William Gooderhan et James Gooderman Worts vivaient près de l'usine. Le site de l'élégante propriété de Gooderham a été tellement remué par l'activité industrielle depuis 1885, qu'il n'en restait rien lorsqu'on y creusa pour y construire l'immeuble à condominiums qu'on y retrouve actuellement. Par contre, il y avait encore de l'espoir pour que Lindenworld, la propriété également élégante de James Gooderham Worts, ait connu un meilleur sort. En effet, bien que la majeure partie du site ait été redéveloppée à des fins industrielles dans les années 1890, une plus petite portion est demeurée indemne.

En 1996, plusieurs tranchées furent creusées, mais elles révélèrent peu, mis à part quelques tessons de poterie (dont le bord d'une tasse à thé française), une bouteille de boisson, quelques briques, une pièce de bardeau en ardoise, quelques fragments architecturaux en marbre, quelques tuyaux de pipe et, le meilleur de tout, une citerne en brique qui était probablement située à l'intérieur même de la résidence de Worts. Tout compte fait, on n'y trouva pas grand-chose, à part la confirmation de l'endroit où la famille de Worts a vécu pendant la croissance d'une des entreprises victoriennes les plus fructueuses de Toronto et du Canada.

Voir aussi Archéologie Industrielle; Histoire Architecturale : 1867-1914.

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