Synopsis
Le déclin de l’empire américainmet en scène quatre professeurs d’histoire, l’épouse de l’un d’entre eux et deux étudiants de maîtrise de l’Université de Montréal réunis, le temps d’une nuit et d’une matinée, dans une maison de campagne au bord du lac Memphrémagog au Québec dans les Cantons de l’Est. Dans les premières scènes du film, les hommes préparent le dîner tandis que les femmes s’entraînent dans un gymnase, la conversation roulant, au sein des deux groupes, sur le sexe, la politique et les frasques de chacun. Tous se retrouvent pour manger et discuter. Après le repas, des révélations sur une relation adultère interrompent momentanément la fête, mais le lendemain matin, tout semble redevenu normal au sein du groupe.
Analyse
Bien qu’il ait été écrit, réalisé et largement reçu comme une comédie érotique extrêmement drôle, Le déclin de l’empire américain est également un film à thèse. Denys Arcand annonce ses intentions dans une déclaration préliminaire sous la forme d’une entrevue accordée par Dominique, une historienne confirmée interprétée par Dominique Michel, à Radio-Canada au cours de laquelle elle explique que lorsque l’obsession du bonheur individuel envahit une civilisation, c’est le symptôme qu’elle est en déclin, qu’il s’agisse de Rome, de l’Ancien Régime au XVIIIe siècle en France ou de « l’empire américain ». La suite du film décrit avec humour la façon dont cette élite universitaire est elle-même obsédée par cette recherche du bonheur personnel.
Le déclin de l’empire américain propose une satire sociale acerbe. Le film a été perçu comme une réflexion sur les conséquences sociales et politiques de l’échec du référendum de 1980 sur l’indépendance du Québec et du leadership de René Lévesque comme chef du Parti Québécois. (Denys Arcand avait déjà réalisé, en 1980, un documentaire sur ce sujet, Le Confort et l’indifférence.) Comme le souligne Karen Fricker dans le Guardian, « […] le film a également été interprété comme un commentaire du réalisateur sur l’échec des nationalistes québécois de sa génération à voir se matérialiser la réalité d’une nation responsable et mure ».
Réception critique et commerciale
Le déclin de l’empire américain obtient auprès du public canadien anglophone un succès sans précédent depuis Mon oncle Antoine en 1971. Il est également particulièrement bien reçu en France où il devient le film québécois le plus populaire avec plus d’un million d’entrées. Il reçoit La Bobine d’or qui récompense le film canadien ayant réalisé les recettes les plus importantes de l’année et totalise plus de 25 millions de dollars de recettes à l’échelon international. Cependant, les entrées aux États-Unis sont relativement modestes, dans un contexte où la diffusion de films en français dans les salles américaines est extrêmement limitée.
Largement plébiscité par la critique, Le déclin de l’empire américain est considéré par beaucoup comme la version canadienne française de The Big Chill de Lawrence Kasdan sorti en 1983. Il est également comparé à My Dinner with Andre, un film de Louis Malle de 1982 consistant également en une longue conversation. Roger Ebert parle du Déclin de l’empire américain comme d’un film « intelligent, profond et douloureux ». Le magazine Variety le décrit, quant à lui, comme une « comédie déviante et sardonique sur les mœurs sexuelles ». Rita Kempley, du Washington Post, écrit que le film est « certainement l’œuvre la plus intellectuelle de l’année, un film très souvent drôle qui constitue une méditation sans inhibition sur une période particulièrement obscure en Amérique du Nord ». Vincent Canby, du New York Times, estime que les dialogues du film, « tout en étant à la fois hilarants dans leur spontanéité et démoralisants dans leur perspicacité, nous permettent indirectement d’ouvrir les yeux sur de nombreux aspects de la réalité ».
Denys Arcand est ensuite embauché par Hollywood pour écrire une version américaine de son film, un projet qui ne verra jamais le jour. En 1989, il réalise Jésus de Montréal, un film qui obtient un succès équivalent, voire supérieur, à celui du Déclin de l’empire américain.
Distinctions et héritage
Le déclin de l’empire américain obtient le Prix de la critique internationale au Festival de Cannes, huit prix Génie et une sélection aux Oscars dans la catégorie Meilleur film en langue étrangère, devenant le premier film québécois à être distingué de la sorte. Le film décroche le Prix du public et le Prix du meilleur long métrage canadien à l’occasion du Festival du film de Toronto et est également couronné « meilleur film de l’année » par l’Association québécoise des critiques de cinéma (AQCC). Il fait partie des dix meilleurs films canadiens de tous les temps sélectionnés par le TIFF en 1993 et 2004 à l’occasion d’enquêtes et se classe 10e dans la liste des meilleurs films canadiens jamais réalisés lors d’un sondage conduit en 2002 par le magazine Playback auprès de ses lecteurs. En 2016, le film est classé parmi 150 œuvres essentielles de l’histoire du cinéma canadien dans le cadre d’un sondage auprès de 200 professionnels des médias mené par le TIFF, Bibliothèque et Archives Canada, la Cinémathèque québécoise et la Cinematheque de Vancouver en prévision des célébrations entourant le 150e anniversaire du Canada en 2017.
Le déclin de l’empire américain représente la première partie d’une trilogie que Denys Arcand décrit comme une « réflexion sur les mœurs et la vie contemporaine », Les invasions barbares, en 2003, constitue le deuxième volet de ce triptyque qui se conclut, en 2007, par L’âge des ténèbres. En 2006, Denys Arcand adapte son scénario dans le cadre d’une production théâtrale parisienne primée.
Voir aussiLongs métrages canadiens; Cinéma québécois.
Récompenses
Prix Génie 1987
Meilleur acteur dans un second rôle (Gabriel Arcand)
Meilleure actrice dans un second rôle (Louise Portal)
Meilleur montage (Monique Fortier)
Meilleur son (Adrian Croll, Jean-Pierre Joutel, Richard Besse)
Meilleur montage sonore (Paul Dion, Andy Malcolm, Diane Boucher)
Meilleur scénario original (Denys Arcand)
Meilleur réalisateur (Denys Arcand)
Meilleur film (Réne Malo, Roger Frappier)
La Bobine d’or (Réne Malo, Roger Frappier)
Autres
Prix FIPRESCI, Festival de Cannes (1986)
Meilleur long métrage canadien, Festival international du film de Toronto (1986)
Prix du public, Festival international du film de Toronto (1986)
Prix L.-E.-Ouimet-Molson, Association québécoise des critiques de cinéma (AQCC) (1986)
Meilleur film en langue étrangère, prix du New York Film Critics Circle (1986)