Jean-Philippe Dallaire, peintre, illustrateur et professeur (né le 9 juin 1916 à Hull, au Québec; décédé le 27 novembre 1965 à Vence, en France).L’artiste est surtout connu pour ses tableaux festifs où le réel et l’imaginaire s’entremêlent dans un monde de formes et de couleurs.
Enfance et éducation
Né d’un père ouvrier et d’une mère dévouée à ses 11 enfants, Jean-Philippe Dallaire commence à dessiner à l’âge de 11 ans. Même s’il suit divers cours de dessin, notamment à l’École technique de Hull et à la Central Technical School de Toronto, il est essentiellement autodidacte. Il peint son premier tableau, Nature morte, en 1933.
En 1936, il rencontre le père Georges-Henri Lévesque, o.p., qui lui offre atelier, gîte et couvert chez les Dominicains d’Ottawa. Il réalise pour eux plusieurs toiles religieuses et une murale. Après un court stage à l’École des beaux-arts de Montréal, et grâce à une bourse du gouvernement québécois, Dallaire réalise son rêve de partir pour Paris. Fin septembre 1938, il s’y rend avec sa jeune épouse, Marie-Thérèse Ayotte. Il y complète sa formation, en 1939 et 1940, aux Ateliers d’art sacré de Maurice Denis et de Georges Desvallières et à l’Académie André Lhote. Stimulé par l’ambiance parisienne, il peint dans sa chambre-atelier du 31, rue de Vaugirard.
Début de carrière
À Paris, Jean Dallaire découvre les œuvres de Picasso et des surréalistes et il rencontre Alfred Pellan. Il se perçoit très tôt comme un artiste d’envergure internationale et ne cherche pas à rejoindre une école ou une tendance artistique en particulier. Dans une lettre adressée le 1er mai 1940 à son ami le sculpteur hullois Henri Heyendal, il parle de l’importance des influences en art:
...je veux te parler un peu de mon travail à Paris. Tu sais qu’un Canadien qui vient à Paris les premiers jours se sent complètement désorienté car, à Paris tu peux tellement voir d’expositions que tu deviens de plus en plus influencé. De toutes ces influences, tu peux tirer d’innombrables progrès. Depuis mon arrivée, j’ai fait du cubisme, de l’abstrait, du réalisme et à nouveau du cubisme. Il ne faut pas avoir peur de l’influence, c’est le tort des Canadiens de vouloir une peinture canadienne.
Durant l’occupation allemande (1940-1944), Dallaire est interné au camp Saint-Denis, en banlieue de Paris, où il continue de dessiner. À l’automne 1945, il rentre au Canada avec son épouse et leur fils Michel. Il enseigne le dessin et la peinture à l’École des beaux-arts de Québec de 1946 à 1952. L’année 1947 est pour lui une année importante. En effet, l’exposition de ses œuvres au Cercle universitaire de Montréal du 3 au 17 mai 1947 est un succès et lui permet d’être enfin reconnu. En 1949, très intéressé par l’art de la tapisserie, il fait un stage d’études chez le grand artiste de la tapisserie française Jean Lurçat à Aubusson, en France, et visite les ateliers de tapisserie Gobelins, à Paris. Par la suite, il travaille comme illustrateur de films d’animation ou films éducatifs à l'Office national du film, à Ottawa puis à Montréal, de 1952 à 1957.
Dernières années
En 1957, Dallaire participe à la deuxième Biennale de l’art canadien à la Galerie nationale du Canada (maintenant le Musée des beaux-arts du Canada), à Ottawa. Il travaille aussi en atelier à Ville St-Laurent jusqu’à son départ définitif pour la France en 1958. Il laisse alors famille et amis derrière lui afin de se consacrer entièrement à la peinture. Installé à Vence, sur la Côte d’Azur, il peint avec frénésie. Il expose à la Galerie Les Mages, à Vence, et à la Galerie Dresdner, à Montréal. Gravement malade depuis plusieurs années, il meurt à Vence le 27 novembre 1965, ce qui met fin prématurément à une brillante carrière d’artiste-peintre.
Les œuvres de Dallaire témoignent d’influences stylistiques variées et sont encore réputées pour la finesse du dessin, la spontanéité dans le choix et le traitement du sujet ainsi que l’utilisation de la couleur. Dans sa biographie de l’artiste, intitulée Le cyclope et l’oiseau (2001), le critique René Viau écrit :
Artiste résolument indépendant, ce solitaire ne se réclame du goût du jour au fond que pour mieux faire entendre sa voix et jouer sa propre musique. S’arrimant à “ces qualités françaises”, il ajoute pourtant un élan fantasque et imaginatif à cette base. L’appel vers l’humour et la caricature. Le recours à la naïveté. L’ironie souvent enjouée où le tragique néanmoins perce. L’apport de l’art naïf ou du dessin enfantin. C’est ce qui fait qu’il est lui-même.
Plusieurs expositions feront connaître Dallaire au public canadien. Le Musée d’art contemporain de Montréal et le Musée du Québec (aujourd’hui le Musée national des beaux-arts du Québec) mettent sur pied la première Rétrospective Jean Dallaire en 1968. Celle organisée par l’historien de l’art canadien Jean-René Ostiguy (1925-2016) est ensuite présentée par la Ville de Hull en 1989. En 1999, c’est le Musée du Québec qui organise la grande rétrospective Dallaire et publie un catalogue d’envergure faisant foi de l’énorme talent de l’artiste. De 2005 à 2008, la Ville de Gatineau et sa galerie organisent l’exposition itinérante Dallaire, Illustrateurs, Extraits des séries historiques. Enfin, en 2016, l’exposition Hommage à Dallaire : Que la fête commence! est présentée à la galerie Montcalm de la Maison du Citoyen, à Gatineau, afin de souligner le centenaire de la naissance de l’artiste originaire de cette ville. L’exposition comprend aussi des œuvres de jeunesse du fils de Dallaire, François, que son père laissait peindre dans son atelier quand il était enfant. Un catalogue raisonné qui documentera plus de deux mille œuvres signées Dallaire est en cours de réalisation.