Claire Harris | l'Encyclopédie Canadienne

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Claire Harris

Claire Harris, poète (née le 13 juin 1937 à Port-d’Espagne à Trinité-et-Tobago; décédée le 5 février 2018). Claire Harris a écrit de nombreux recueils de poésie, à commencer par Fables from the Women’s Quarters (1984). Ses œuvres ont été acclamées à l’échelle nationale et internationale. Elle a reçu de nombreux prix pour sa poésie, incluant le Commonwealth Award for Poetry for the Americas Region (1985), le Writers’ Guild of Alberta Award for poetry (1987), le Alberta Culture poetry prize (1988) et le Alberta Culture Special Award (1990). La poésie de Claire Harris exprime souvent les luttes psychologiques des femmes racialisées qui sont confrontées à la violence et l’oppression.

Jeunesse et début de carrière

Claire Harris obtient un baccalauréat au University College de Dublin, et un diplôme d’études supérieures à la University of the West Indies en Jamaïque. Après avoir immigré au Canada en 1966, elle enseigne l’anglais à l’école secondaire. Dix ans plus tard, elle commence à publier ses œuvres de poésie. En utilisant des techniques de vers comme le contraste entre la prose et la poésie sur la page, ou l’alternance entre la voix prophétique et la prose journalistique, Claire Harris dramatise et rend publiques les luttes psychologiques que vivent les femmes racialisées qui sont confrontées à l’oppression. Cette approche rend la poésie de Claire Harris unique parmi les poètes de race noire au Canada.

Style et thèmes

Claire Harris aborde des thèmes comme la mortalité et la complicité des femmes dans leur condition de victimes. Elle retourne souvent au problème de la quête d’identité et d’appartenance culturelle des femmes noires dans la culture occidentale. Dans « Nude on a Pale Staircase » (Fables from the Women’s Quarters, 1984), elle dépeint l’isolation et la rage montante d’une femme originaire des Indes orientales dont le mariage avec un Canadien d’origine italienne dégénère en une simple habitude. Les remarques méprisantes de son mari à l’égard de la culture d’origine de son épouse déclenchent chez elle une prise de conscience soudaine et dévastatrice sur sa propre altérité, à laquelle elle répond sans rien dire en laissant tomber la vaisselle du déjeuner sur le sol. Elle berce doucement l’anse d’une tasse brisée comme si elle était précieuse, créant ainsi l’image d’une acceptation résignée de son identité fracturée.

Toutefois, dans Travelling to Find a Remedy (1986), la narratrice du poème du même titre emprunte une avenue opposée que l’épouse indienne. Au lieu de s’éloigner de son pays natal, la narratrice voyage délibérément vers son Afrique ancestrale. Croyant qu’elle peut « throw / [her] heart across alien centuries / and slavery » (jeter son cœur à travers des siècles étrangers d’esclavage [traduction libre]), elle découvre qu’elle « was not born to it » (n’était pas née pour cela [traduction libre]). Son mariage à un Africain n’est pas la solution au problème d’appartenance culturelle. Les coutumes culturelles africaines ne peuvent pas survivre inchangées en Amérique du Nord. En parlant d’un masque africain ramené à Calgary, la poétesse remarque : « you are / left a fiction… » (tu n’es plus qu’une fiction [traduction libre]) (Translation Into Fiction, 1984).

Dans Drawing Down a Daughter (1992) et She (2000), deux nouvelles qui allient prose et poésie, Claire Harris ajoute une nouvelle urgence à la quête d’un foyer culturel. Les narratrices sont confrontées aux exigences imposées aux mères pour transmettre un passé culturel à leur enfant. Dans Drawing Down a Daughter, la narratrice enceinte veut demeurer dans son Canada d’adoption, alors que son mari, né au Canada, veut élever leur enfant à Trinité-et-Tobago (voir Canadiens d’origine antillaise). Le conflit demeure irrésolu. La narratrice de She, atteinte du trouble de la personnalité multiple, devient une métaphore des confusions et des absences culturelles auxquelles font face les femmes de couleur. La narratrice et ses multiples personnalités, qui représentent des voix allant de l’anglais britannique au créole trinidadien, ne peuvent résoudre leurs conflits qu’au moyen d’une prise de conscience mutuelle des autres personnalités et d’une aide médicale. Dans ces deux œuvres, l’identité culturelle que les narratrices veulent communiquer à leurs enfants ne peut être atteinte qu’en recréant le moi par le biais de ce que Claire Harris appelle « And So… Home », une « invocation ».

Prix et distinctions

Claire Harris reçoit de nombreux prix pour sa poésie, dont le Commonwealth Poetry Prize (Americas Region) en 1985, le Writer’s Guild of Alberta en 1987, le Alberta Culture Poetry Prize en 1988, et le Alberta Culture en 1990.