La baie de Fundy et le golfe du Maine, d'une superficie totale d'environ 180 000 km2 et d'une profondeur n'excédant généralement pas 200 m, font partie du plateau continental de la côte est du Canada et de la Nouvelle-Angleterre. La superficie de la baie de Fundy est d'environ 16 000 km2. L'écosysteme de la baie de Fundy et du golfe du Maine est une mer littorale semi-fermée grandement influencée par les marées et entourée par les terres de trois États du nord-est des États-Unis (le Maine, le New Hampshire et le Massachusetts) et de deux provinces maritimes canadiennes (la Nouvelle-Écosse et le Nouveau-Brunswick). Il semblerait que son nom soit une déformation du mot français « fendu ». Pendant un certain temps, l'endroit est connu sous le nom de baie Françoise.
Lors de la dernière époque glaciaire, il y a environ 10 000 à 15 000 ans, le recul des glaciers provoque l'immersion des terres qui forment aujourd'hui le banc de Georges et d'autres zones de hauts-fonds. Il arrive encore aux pêcheurs de trouver dans leurs chaluts des fragments d'arbres et des dents de mammouth datant de cette période. Depuis, l'élévation du niveau de la mer est à l'origine du régime actuel des marées de même que de l'inondation de ces bancs du large.
Marées
Les marées de la baie de Fundy sont les plus fortes au monde : leur amplitude peut dépasser 16 m dans le bassin Minas au fond de la baie. La marée la plus haute jamais enregistrée (16,1 m) est enregistrée à Burntcoat Head, en Nouvelle-Écosse. Au plus fort de la marée montante, le débit entre le bord du plateau continental et le golfe du Maine atteint un volume de 25 millions de mètres cubes par seconde, soit 2000 fois le débit moyen du fleuve Saint-Laurent. Le débit au-delà du cap Split vers le bassin Minas est 40 fois supérieur à celui du Saint-Laurent.
Ces fortes marées sont principalement dues à la forme, à la dimension et à la profondeur de la baie de Fundy et du golfe du Maine qui entraînent une période naturelle d'oscillation d'environ 13 heures. Les eaux réagissent donc fortement à la poussée qu'elles reçoivent des marées de l'Atlantique Nord toutes les 12,4 heures, un phénomène connu techniquement comme une réaction quasi résonante. Les Chutes réversibles, situées à Saint John, au Nouveau-Brunswick, et les mascarets qui se trouvent dans les rivières situées près de la pointe de la baie sont des phénomènes naturels bien connus associés aux marées.
Les fortes marées ont des conséquences spectaculaires sur l'état océanographique de toute la région. L'action des forts courants de marée conserve aux eaux des grandes surfaces (le banc Georges, une grande partie de la baie de Fundy et la région au large des côtes, au sud-ouest de la Nouvelle-Écosse) des couches verticales homogènes, ce qui donne des eaux de surface froides et de fréquents brouillards, plutôt que des eaux de surface chaudes comme c'est le cas dans les eaux moins homogènes pendant l'été. Les marées contribuent aussi aux configurations moyennes de circulation de la région.
La combinaison des forts courants de marée et de la topographie complexe du fond marin provoque des clapotis de marée, des remous, des remontées d'eau et des mélanges intenses dans toute la région. Ces phénomènes ont en général une influence positive sur la productivité biologique, car ils ramènent des substances nutritives dans les couches supérieures où elles peuvent être utilisées. La topographie associée aux conditions océaniques uniques de la région favorise des populations productives de phytoplanctons et de zooplanctons, qui soutiennent une production élevée de poisson. Par conséquent, les eaux au large du sud-ouest de la Nouvelle-Écosse constituent, en été, la zone d'alimentation du hareng, une importante réserve de centaines de milliers de tonnes. Au large de l'île Brier et de l'île Grand Manan où les courants de marée se heurtent à un relief escarpé, des essaims de copépodes et d'euphausiacés (krill) affleurent souvent à la surface, ce qui attire le rorqual commun, le rorqual à bosse et de grandes volées d'oiseaux planctonophages, tels que le phalarope, le puffin et le goéland. La grande production primaire attire aussi une abondance d'autres espèces prédatrices, comme le marsouin commun et le phoque commun, qui se nourrissent de poisson.
Dans les zones entourant les îles, aux approches de la baie de Fundy, où les courants de marée se combinent à la topographie complexe du fond marin, on trouve des communautés benthiques très diversifiées comprenant des éponges, des ascidies, des patates de mer et des concombres de mer (voir aussi Echinodermes).
Dans les zones supérieures de la baie, les forts courants de marée maintiennent tellement de boue à la surface que la pénétration de la lumière et, par conséquent, la productivité biologique en sont grandement réduites. La majeure partie de la productivité biologique est concentrée sur les slikkes, qui constituent d'importantes zones d'alimentation pour de nombreuses volées d'oiseaux de rivage migrateurs, dont le bécasseau semi-palmé.
Ressources
La pêche (pétoncles et poissons de fond sur le banc Georges, hareng et homard au large du sud-ouest de la Nouvelle-Écosse et hareng dans la baie de Fundy) est d'une très grande importance pour bon nombre des petites localités, de même que pour toute l'économie de la Nouvelle-Écosse, du Nouveau-Brunswick et de la Nouvelle-Angleterre. Le développement économique est axé sur la pêche et l'énergie. Des efforts considérables sont consacrés à la recherche et aux relations internationales dans le but d'améliorer la réglementation relative à la pêche. Ce problème est tout particulièrement épineux au banc Georges, où le Canada et les États-Unis se disputent la démarcation de la frontière internationale ainsi que l'établissement et le partage des quotas de pêche, et là où l'on a commencé l'exploration pétrolière et gazière, avec les dangers que cela comporte pour la pêche. Même le jugement rendu en octobre 1984 par le tribunal international de La Haye sur le tracé de la frontière ne supprime pas la nécessité d'une cogestion des bancs de poissons migrateurs. Un moratoire sur l'exploitation pétrolière est mis en place en 1988 et est toujours en vigueur.
Énergie marémotrice
Il est fort possible qu'on finisse par exploiter l'énergie marémotrice en amont de la baie de Fundy. Des projets d'une puissance égale à celle de plusieurs centrales nucléaires sont techniquement réalisables; un prototype de centrale marémotrice a été construit dans le bassin de l'Annapolis, en Nouvelle-Écosse (voir Énergie Marémotrice). Fait étonnant, ces grands projets pourraient provoquer une légère augmentation de la zone d'activité de la marée dans la majeure partie de la baie de Fundy et du golfe du Maine, à l'extérieur du barrage. Dans le bassin principal, situé derrière le barrage, l'exploitation de la centrale provoquerait un changement substantiel du niveau de l'eau à marée basse et une diminution de la zone d'activité de la marée, donc des débits avoisinant le facteur 3. On connaît encore mal les effets qu'aurait un tel changement sur les slikkes et leur productivité biologique et, de ce fait, sur les oiseaux de rivage migrateurs.
La plus récente technologie d'exploitation de l'énergie marémotrice ne requiert pas de barrages ni de réservoirs de barrage, mais des turbines marémotrices flottantes et des turbines ancrées au plancher océanique. En supposant que 15 p. 100 de l'énergie marémotrice puisse être exploitée sans répercussions sur l'environnement, on a identifié sept endroits propices à l'exploitation de l'énergie marémotrice dans la baie de Fundy. La Nouvelle-Écosse et le Nouveau-Brunswick sont en train d'autoriser le déploiement de l'équipement d'énergie marémotrice en eaux profondes. En janvier 2008, la Nouvelle-Écosse a autorisé la mise en place d'une installation de démonstration et de recherche sur l'énergie marémotrice pour l'essai de turbines en eaux profondes dans le bassin Minas. Cette zone a un grand potentiel de production d'énergie marémotrice, le courant à mi-marée dans le détroit de Minas étant équivalent au courant combiné des rivières et des courants d'eau douce de toute la planète.