Enfance et éducation
Afua Cooper grandit à Westmoreland avec ses parents, Ruth Campbell Cooper et Edward Cooper, et une imposante fratrie de cinq filles et trois garçons. En 1966, elle part vivre à Kingston avec sa tante, Elfleda Campbell. Elle étudie au St Michael’s All-Age School à Rae Town, puis au Camperdown High School de East Kingston, où elle cofonde, à l’âge de 12 ans, le club d’études africaines. Lorsqu’elle obtient son diplôme d’études secondaires en 1975, elle a rejoint la religion rastafari et s’installe pendant un an avec le poète dub Mutabaraka et sa femme Yvonne Peters. Entre 1979 et 1980, elle commence à enseigner à l’école secondaire de Vauxhall, après avoir obtenu un diplôme du Excelsior Community College. En décembre 1980, toutefois, elle part vers le Canada, fuyant ce faisant une grande instabilité politique en Jamaïque.
Parcours professionnel
À son arrivée au Canada, Afua Cooper se déniche un emploi d’enseignante au Bickford Park High School, à Toronto. C’est à cette période qu’elle commence à fréquenter une foule de lieux de rencontre pour poètes, comme le Fall Out Shelter, le Strictly Ital et le Trojan Horse, et qu’elle y présente ses propres œuvres. Peu de temps après, elle devient poète et percussionniste en résidence pour les Gayap Riddim Drummers, avec qui elle part en tournée partout au Canada pour y présenter sa poésie unique, empreinte d’un commentaire social contemporain et d’une perspective womaniste (Le womanisme, bien que semblable au féminisme, désigne un mouvement né de l’oppression raciale et de genre vécue par les femmes de couleur.)
Afua Cooper partage aussi la scène avec des grands noms de la poésie dub, tels Lillian Allen, Clifton Joseph et Devon Haughton durant une période que les critiques culturels appellent la « renaissance de la culture noire ». Cette époque marque aussi deux moments forts dans la vie de la poète : la publication de Breaking Chains (1983), son premier recueil de poèmes, et le début d’une carrière de professeur au sein du programme d’études africaines de l’Université de Toronto.
En 1988, Afua Cooper se convertit à l’islam. La même année, elle obtient une résidence à la Banff School of Fine Arts (aujourd’hui appelée Banff Centre) et écrit deux œuvres de poésie : le livre pour enfants The Red Caterpillar on College Street(1989), et Memories Have Tongue (1992), finaliste du Prix Casa de las Américas (voir Littérature enfantine de langue anglaise).
Nombreux sont ceux et celles qui se souviennent d’Afua Cooper pour son numéro d’ouverture dans le cadre des célébrations de Nelson Mandela au Queen’s Park de Toronto en juin 1990. En effet, la poète se produit devant une foule d’environ 25 000 personnes, réunies à l’occasion de la libération du leader sud-africain. Afua Cooper donne aussi des entrevues et des prestations en direct sur les ondes radiophoniques de la CBC, de CKLN, de CIUT et de CHRY, et effectue de nombreuses apparitions à la télévision, à la fois comme poète et chercheuse. En 1990, elle part en tournée au Sénégal et en Gambie.
Après avoir parcouru ces deux pays de l’Afrique de l’Ouest, Afua Cooper revient à Toronto et y entame des études de deuxième cycle. Son mémoire de maîtrise, qui porte sur les enseignants noirs en Ontario entre 1850 et 1870, constitue un premier pas vers une carrière d’historienne spécialiste des Noirs au Canada.
En 2000, elle présente une thèse de doctorat sur la vie d’Henry Bibb, un esclave ayant fui le Kentucky pour devenir abolitionniste au Canada. Cette recherche originale vaut à Afua Cooper le titre de « colonelle du Kentucky », la plus haute récompense possible de l’État du Kentucky (autrefois appelé Commonwealth du Kentucky). Sa thèse a aussi un impact au Canada, où Henry Bibb est nommé personne historique d'importance par le gouvernement fédéral.
En 2006, Afua Cooper publie les résultats de ses recherches originales aux éditions Harper Collins, sous le titre The Hanging of Angélique: The Untold Story of Canadian Slavery and the Burning of Old Montréal. La traduction française du livre paraît l’année suivante sous le titre La pendaison d'Angélique : l'histoire de l'esclavage au Canada et de l'incendie de Montréal. En plus d’être le premier à raconter l’histoire de cette femme en anglais, l’ouvrage constitue aussi le tout premier récit détaillé de l’esclavage au Canada publié en anglais. The Hanging of Angélique (basé sur les dossiers du procès de Marie-Joseph Angélique) fait partie des finalistes pour le Prix littéraire du Gouverneur général en 2006, dans la catégorie non-fiction.
Activisme et enseignement
Afua Cooper est une des membres fondatrices du Toronto Dub Poets’ Collective (2002), la seule organisation de poésie communautaire au Canada. En 1993, elle joue un rôle majeur dans l’organisation de la première édition du International Dub Poetry Festival and Conference, tenu à Toronto et réunissant plus de 87 poètes dub des quatre coins de la planète. Elle est aussi l’une des principales organisatrices des éditions 2004, 2005, 2006 et 2009 du Dub Poetry Festival. En plus de ses carrières de poète et d’auteure, Afua Cooper est consultante sur l’histoire des Noirs pour le compte de Parcs Canada et organise plusieurs expositions d’art un peu partout dans la Ville Reine. En octobre 2005, la rédaction du magazine Essence nomme Afua Cooper dans son palmarès des 25 femmes qui sont en train de changer le monde.
En 2009, Afua Cooper inaugure la création de la Black Canadian Studies Association (BCSA) avec une conférence réunissant à Vancouver des chercheurs et des activistes communautaires du Canada, des États-Unis et du Royaume-Uni. La BCSA naît d’un atelier de trois jours à la Segal School of Business de l’Université Simon Fraser.
Le 7 mai 2011, Afua Cooper, docteure en histoire, devient officiellement la troisième titulaire de la chaire James Robinson Johnston d’études sur les Noirs du Canada du Département de sociologie et d’anthropologie sociale de l’Université Dalhousie. Elle déclare : « Je suis très heureuse de rejoindre la chaire James R. Johnston d’études sur les Noirs du Canada. Il s’agit véritablement de la seule chaire de recherche du genre au Canada et elle nous offre la possibilité de réfléchir en profondeur à l’étude des Noirs du Canada, de déconstruire et de reconstruire ce qu’elle est et ce qu’elle représente. » Elle détient ce rôle jusqu'en 2017.
À l’automne 2016, elle lance à l’Université Dalhousie un tout nouveau programme de mineure interdisciplinaire en études de la diaspora noire et africaine. Elle dit avoir créé ce programme d’étude afin de combler les lacunes en matière de connaissances historiques chez les étudiants, tant blancs que noirs. En effet, jusqu’à récemment, même les étudiants noirs canadiens en savaient très peu sur leur propre histoire; à son avis, leurs connaissances sont largement basées sur l’expérience américaine et ignorent tout de ce qui s’est passé ici au Canada. Elle souhaite voir ce nouveau programme grandir et devenir éventuellement une majeure.
Publications
- Breaking Chains (Weelahs, 1983)
- Red Caterpillar On College Street (Sister Vision Press, 1989)
- Memories Have Tongue: Poetry (Sister Vision Press, 1992)
- We're Rooted Here and They Can't Pull Us Up: Essays in African Canadian Women's History avec Peggy Bristow, Dionne Brand, Linda Carty, Sylvia Hamilton et Adrienne Shadd (Presses de l’Université de Toronto, 1994)
- Utterances and Incantations: Women, Poetry, and Dub (Sister Vision Press, 1999)
- The Underground Railroad: Next Stop, Toronto!, avec Adrienne Shadd et Carolyn Smardz Frost (Natural Heritage Books, 2002)
- The Hanging of Angélique, The Untold Story of Canadian Slavery and the Burning of Old Montréal (HarperCollins, 2006; trad. La pendaison d'Angélique : l'histoire de l'esclavage au Canada et de l'incendie de Montréal, 2007)
- Copper Woman and Other Poems (Natural Heritage Books, 2006)
- My Name is Henry Bibb: A Story of Slavery and Freedom [fiction historique] (Kids Can Press, 2009)
- My Name is Phillis Wheatley: A Story of Slavery and Freedom [fiction historique] (Kids Can Press, 2009)
- « To Learn… Even a Little, The Letters of Solomon Washington »,dans Hoping for Home, The Stories of Arrival (Scholastic Canada, 2011), pp. 171-191.
Enregistrements
- WomanTalk: Women Dub Poets (Heartbeat Records, 1984)
- Poetry Is Not a Luxury (Maya Music Group, 1985)
- Your Silence Will Not Protect You (Maya Music, 1986)
- Sunshine (Maya Music Group, 1989)
- Worlds of Fire (Soundmind Productions, 2002)
- Love and Revolution (Soundmind Productions, 2014)
Expositions
- « A Glimpse of Black Life in Victorian Toronto: 1850–60 », Museum Division, Ville de Toronto (2002)
- « The Underground Railroad, Next Stop: Freedom », Musée royal de l’Ontario (2002)
- « I’ll Use My Freedom Well: The Josiah Henson Story », Uncle Tom’s Cabin Museum, Dresden, Ontario (2006)
- « Enslaved Africans in Upper Canada », Archives de l’Ontario (2007)
- « The Trans-Atlantic Slave Trade », dans le cadre du Ontario Bicentenary Exhibit, Toronto (2007)
- « Black Communities in British Columbia: 1858–2008 », Archives de la Ville de Vancouver (2009).
- « Freedom City: Uncovering Toronto’s Black History », Bibliothèque de Toronto (2015)
- « Black Halifax: Stories From Here » (2015)
Prix et récompenses
- Prix Joseph Brant pour l’histoire, Société historique de l’Ontario (1994)
- Prix Marta Danylewycz pour la recherche historique (1995)
- Colonel du Kentucky, Prix de contribution à l’histoire du Kentucky, Commonwealth du Kentucky (2002)
- Prix de leadership universitaire, University of Toronto Black Alumni (2004)
- Prix Harry Jerome de l’excellence professionnelle (2005)
- Prix Planet Africa Renaissance (2007)
- Prix William Hubbard pour les relations raciales, Ville de Toronto (2007)
- Prix d’excellence African Canadian Achievement (2008)
- Prix du premier ministre de l’Ontario pour l’excellence artistique (2008)
- Prix du meilleur livre pour enfants ou adolescents, Canadian Children’s Book Centre (2010)
- Prix Beacon of Freedom, Colonial Williamsburg-Williamsburg Regional Library, Virginie (2012)
- Nova Scotia Human Rights Award, Commission des droits de la personne de la Nouvelle-Écosse (2015)
- Poète officielle de la municipalité régionale d’Halifax (2018-2020)
Voir aussi L’histoire des Noirs au Canada; Chemin de fer clandestin.