Théâtre d'expression française
Il semble que la première représentation théâtrale en français ait eu lieu le 14 novembre 1606, sur les eaux abritées et le long de la côte près de Port-Royal en Acadie. Des membres de la minuscule colonie française, certains déguisés en autochtones, d'autres en personnages mythologiques (Neptune et ses tritons), présentent la pièce légère de Marc LESCARBOT intitulée THÉÂTRE DE NEPTUNE EN LA NOUVELLE-FRANCE pour célébrer le retour des fondateurs de la colonie d'une dangereuse expédition. C'est la seule représentation scénique dont il est question au Québec avant 1640 alors que l'activité théâtrale, tant publique que privée, semble se répandre.
L'opposition catholique
Toutes les représentations données sous le régime français le sont par des troupes amateurs, et, nulle part dans l'histoire de la colonie, il n'est fait mention d'acteurs ou de troupes professionnelles. Dans le théâtre public, les acteurs sont généralement des membres du personnel administratif ou militaire du gouverneur français en résidence, et les pièces, celles qui ont connu un succès récent à Paris, les uvres de Corneille, de Racine et de Molière étant particulièrement prisées. Le théâtre privé (dans ce cas-ci religieux, pédagogique) fait partie du programme des écoles fondées par les Jésuites et par les Ursulines, dans la tradition européenne.
Cependant, la hiérarchie catholique s'oppose aux représentations publiques de théâtre, et cette opposition mène finalement à un affrontement mémorable entre les autorités civile et religieuse dans la fameuse affaire du Tartuffe (1693-1694), qui oppose le gouverneur Frontenac, un enthousiaste protecteur de la scène publique, à l'évêque Saint-Vallier. L'évêque paie grassement le gouverneur pour que celui-ci promette de ne pas mettre en scène le Tartuffe de Molière, réputé pour sa satire de l'hypocrisie religieuse. Le grand perdant est toutefois le théâtre public, que Saint-Vallier interdit peu après dans l'ensemble de la colonie. Cette interdiction empêche l'enracinement d'une tradition théâtrale propre au Canada pendant tout le reste du régime français.
La renaissance
Néanmoins, peu après la Conquête, on réintroduit le théâtre en français - mis en scène, ironiquement, par des régiments britanniques en service à Montréal et à Québec, qui offrent un répertoire surtout composé des pièces de Molière. Ce théâtre de garnison a cours pendant une bonne partie du XIXe siècle, des amateurs locaux se joignant souvent sur scène aux acteurs des régiments, sans intervention apparente de l'Église. À la fin des années 1780, un nouvel arrivant français, Joseph QUESNEL, fonde avec six autres personnes une société de théâtre à abonnements limités, suivant un modèle depuis longtemps populaire en France. À sa première saison, 1789-1790, la société présente un mélange de classiques et de pièces contemporaines, notamment Colas et Colinette dont Quesnel est lui-même l'auteur.
L'Église réagit, attaquant en chaire la troupe et le théâtre public en général. Quand certaines de ses ouailles protestent, l'évêque ordonne un changement de tactique : il n'y aura plus de réprobation publique, mais plutôt une utilisation adroite du confessionnal et un refus des sacrements à ceux qui soutiennent les représentations ou qui y assistent. Comme on peut s'y attendre, les représentations publiques de théâtre au Canada français demeureront rares, irrégulières et amateurs presque jusqu'à la fin du XIXe siècle.
L'ouverture des premiers bâtiments modernes voués aux arts de la scène - le THÉÂTRE ROYAL à Montréal en 1825 et le Royal Circus (rapidement renommé aussi Théâtre Royal) à Québec la même année - donne aussitôt un élan à la production dramatique, en français de même qu'en anglais. La première troupe professionnelle française connue, celle de Scévola Victor, joue à Montréal et à Québec en 1827, s'attirant l'hostilité de l'Église et n'éveillant qu'un faible appui du public. Au début des années 1830, le théâtre reçoit de l'étranger un vent d'inspiration plus durable, les intellectuels dissidents fuyant l'agitation politique de la France.
Les plus remarquables d'entre eux comprennent l'acteur professionnel Firmin Prud'homme, le journaliste et auteur Hyacinthe Leblanc de Marconnay et son collègue journaliste Napoléon Aubin. Prud'homme offre Shakespeare (traduit) aux publics canadiens-français, donne des leçons de jeu et participe à des représentations amateurs, faisant découvrir aux adeptes montréalais un style de théâtre moderne qui s'oppose au style déclamatoire et artificiel de la scène classique. Pour sa part, Leblanc de Marconnay aide à l'organisation d'une société d'art dramatique à Montréal, écrivant pour elle et montant sur scène avec elle pendant plusieurs années. Quant à Napoléon Aubin, un Suisse, il fait de même à Québec, fondant une troupe, LES AMATEURS TYPOGRAPHES, qui donnera de la vigueur au théâtre de la capitale durant trois décennies.
Des changements d'envergure
Le type et la fréquence de l'activité théâtrale subissent d'énormes changements avec l'avènement du réseau de chemins de fer nord-américain, qui encourage le passage de troupes itinérantes, dont certaines viennent de France par les États-Unis. Après la fin des années 1850, les tournées deviennent assez régulières, provoquant des réactions prévisibles de la part de la hiérarchie catholique contre le répertoire moderne « immoral » de ces troupes « impies ».
Cet état d'esprit donne lieu, en 1859 et en 1868, à des affrontements mémorables entre l'Église et la communauté théâtrale. À partir de 1880, les fréquentes tournées de Sarah Bernhardt attisent l'hostilité du clergé qui les condamne, elle et son répertoire provocateur. Malgré cette opposition, les représentations de la divine Sarah à Montréal et à Québec attireront les foules jusqu'à sa dernière tournée, en 1916-1917. L'apparition du « vedettariat » incite un ou deux acteurs connus internationalement à venir se produire. Ils sont rejoints sur scène par des comédiens locaux aux cachets moins élevés. C'est ainsi que des acteurs semi-professionnels font leurs débuts, surtout à Montréal.
À l'occasion, des membres de troupes professionnelles itinérantes s'installent à Québec, comme le fait Albert Maugard, où sa troupe, « La compagnie lyrique et dramatique française des Antilles », débute en 1871 au Théâtre de la Place Jacques-Cartier. Encore une fois, l'animosité de l'Église met fin à l'entreprise, et Maugard cesse ses activités au bout de quelques années. Malgré tous les efforts du clergé, les troupes et les dramaturges locaux imitent vite le style et le répertoire des troupes itinérantes françaises, comme le révèlent le théâtre de Félix-Gabriel MARCHAND, de Régis Roy, d'Ernest Doin et de Louis-Honoré FRÉCHETTE. Obligée d'admettre l'impossibilité d'empêcher tout théâtre public en français, l'Église décide finalement, dans les années 1890, d'appuyer pour la première fois un projet susceptible de remplacer le répertoire peu empreint de spiritualité des troupes professionnelles itinérantes. Elle manifeste son approbation à l'endroit d'une série de programmes appelés « Soirées de famille », organisés par les acteurs locaux Elzéar Roy et Jean-Jacques Beauchamp.
Ce répertoire moral est présenté au Monument National de Montréal qui, depuis son ouverture en 1894, joue un rôle central dans les arts de la scène au Canada français (il accueille maintenant l'École nationale de théâtre du Canada/National Theatre School of Canada, un établissement où cohabitent une section francophone et une section anglophone). Au cours de cette décennie et de la suivante, on fonde les premières troupes locales de langue française entièrement professionnelles : à Montréal, le Théâtre des Variétés de Léon Petitjean (1898), le Théâtre National de Julien Daoust (1900) et le Théâtre des Nouveautés (1902) et, à Québec, l'Auditorium (1903), dirigé avec compétence par Paul Cazeneuve dans un bâtiment qui demeurera un centre d'activités culturelles jusqu'en 1982. Dans les années 1890, même si seulement 15 % de l'activité théâtrale à Montréal se passe en français, des troupes comme celles-là contribuent à créer ce qu'on appellera le premier Âge d'or du théâtre à Montréal, décrit par J.-M. Larrue dans son ouvrage Le Théâtre à Montréal à la fin du XIXe siècle (1981).
Malheureusement, on jette ces bases à une période où les représentations devant public se trouvent en situation précaire - à cause de l'apparition d'un compétiteur de taille, le cinéma. Après une décennie de lutte exacerbée par les retombées de la Première Guerre mondiale, les arts de la scène connaissent au Québec une longue période de déclin, dont le symptôme le plus évident est le répertoire qui prédomine au cours des années 1920 et 1930. Les revues satiriques, les monologues et le burlesque prévalent, avec de temps à autre des mélodrames populistes aux faibles qualités esthétiques, comme Aurore l'enfant martyre de L. Petitjean et H. Rollin, qui attirera un immense auditoire pendant 30 ans.
Le burlesque
Le burlesque (genre composé surtout de monologues humoristiques et de sketchs improvisés, où les churs sont beaucoup moins présents que chez son pendant américain et où l'effeuillage est exclu) domine la scène de 1920 à 1950 alors que la télévision l'éclipse. Au départ présenté en anglais et lourdement influencé par le vaudeville américain, le burlesque doit son remarquable succès en français - variété québécoise urbaine, très anglicisée et populaire plus tard appelée le JOUAL presque exclusivement à deux interprètes : Olivier Guimond, père (nom de scène « Tizoune »), comique le plus populaire de l'époque, et un peu plus tard, Rose-Alma Ouellette (« La Poune »), qui apprend son art de Guimond et qui demeurera la reine du burlesque jusqu'à la disparition de la pratique scénique de ce genre théâtral.
Les tournées professionnelles de grandes troupes parisiennes (notamment le Théâtre de la Porte Saint-Martin et le Théâtre de l'Odéon) reprennent dans les années 1920, mais l'attention n'est que passagère. C'est l'avènement de la radio qui, indirectement, ravive l'intérêt pour le théâtre, car ce nouveau média permet aux auteurs et acteurs d'assurer leur subsistance immédiate pour ensuite concentrer le reste de leurs énergies dans le travail sur scène, qui est somme toute plus précaire (voir RADIO, THÉÂTRE DE LANGUE FRANÇAISE À LA). L'exemple le plus notable en est le Théâtre Stella, fondé en 1930 par les acteurs Fred Barry et Albert Duquesne. Il présente un répertoire varié et est ainsi le premier à concurrencer les troupes de l'extérieur en tournées. Le Stella permet aux premiers acteurs québécois formés à Paris de se produire grâce à l'appui du gouvernement. En font partie, Antoinette Giroux, qui plus tard dirigera la troupe, et Jacques Auger.
La naissance du théâtre contemporain au Québec
L'opposition de l'Église catholique aux représentations publiques de théâtre a toujours été un des principaux obstacles à son expansion au Canada français mais, paradoxalement, c'est aussi le clergé qui, par son encouragement de l'art dramatique comme outil pédagogique, a inculqué la connaissance et l'appréciation des différents genres théâtraux préalables au succès des présentations publiques. On peut donc en grande partie attribuer au clergé la naissance du théâtre contemporain au Québec, parce que c'est le dévouement de prêtres dynamiques comme Émile LEGAULT, Georges-Henri d'Auteuil et Gustave LAMARCHE qui permet de sortir le théâtre de la stagnation dans les années 1930. Les deux premiers sont les promoteurs et imprésarios de troupes étudiantes des collèges Saint-Laurent et Sainte-Marie, tandis que le troisième écrit et met en scène une cinquantaine de pièces religieuses et pédagogiques. Ses pièces attirent d'abord l'attention des étudiants, puis de la population québécoise, et ce, malgré la concurrence intense de la radio, du cinéma et du burlesque.
La contribution du père Legault a un effet plus durable du fait qu'il forme, en 1937-1938, une petite troupe d'amateurs, les Compagnons de Saint-Laurent, et qu'il réussit à rendre au théâtre sa fraîcheur et sa magie. Son groupe et lui ont pour but de libérer la scène, de la poétiser, de la raffiner et de la christianiser. En cela, le père Legault subit l'influence directe des tentatives de revitalisation du théâtre qui ont cours en Europe, où il étudie en 1938-1939, particulièrement du travail d'Henri Ghéon et des nouvelles théories sur l'art de la scène qu'épousent Jacques Copeau et le célèbre « Cartel » qui partage ses buts.
Par-dessus tout, les pères Legault et d'Auteuil inspirent et forment les futurs pionniers du renouvellement des arts de la scène au Canada français : Jean GASCON, Jean-Louis ROUX, Pierre Dagenais, Guy Hoffman et de nombreux autres. Certains fondent ensuite leur propre troupe professionnelle, comme Dagenais qui crée l'Équipe (1942) et Roux et Gascon qui fondent le THÉÂTRE DU NOUVEAU MONDE (1951). Ce dernier, appelé le TNM, met en place des normes professionnelles dans le jeu et la scène ainsi que dans la création de décors et de costumes pour toute une génération. Il demeure aujourd'hui la compagnie de théâtre qui a le plus de stabilité et d'influence au Québec.
Lorsqu'elle se dissout en 1952, la troupe des Compagnons a réussi à former un public vaste, sensible et exigeant, capable d'apprécier le talent et les qualités professionnels véritables. Alors que Montréal se transforme en vraie métropole et que le Québec prend conscience de sa propre identité, cet enthousiasme mènera au dynamisme du théâtre qui caractérise les années 1960 et 1970.
Le théâtre moderne
Pour certains historiens, la première de la pièce Tit-Coq de Gratien GÉLINAS constitue, en 1948, la naissance du théâtre et de l'art dramatique modernes au Québec. Malgré l'évidente importance de l'événement, il faut considérer cette hypothèse avec beaucoup de prudence. N'oublions pas que Gélinas lui-même est issu des conditions des années 1930, période où il commence à écrire et à présenter ses sketchs caricaturaux, Les Fridolinades, et que la distribution de Tit-Coq se compose d'acteurs dont l'expérience théâtrale remonte au début du siècle à Montréal. Toutefois, la description que fait Gélinas de l'enfant illégitime et orphelin Tit-Coq et de sa défaite dans son refus de se soumettre aux valeurs du Québec de son époque fait vibrer une corde sensible chez le public. En sont témoins les quelque 200 représentations de la pièce à Montréal seulement dans les années suivantes.
D'autres écrivains québécois, inspirés par Tit-coq, connaissent le succès dans les années 1940 et 1950. Il s'ensuit alors une saine prolifération de minuscules établissements, les « théâtres de poche », ainsi que de troupes et de théâtres plus traditionnels (le Théâtre-Club, 1953-1964; La Poudrière, 1958-1982), surtout à Montréal. Figurent également le Théâtre du Nouveau Monde (1951), le Théâtre de Quat'Sous (1955) et, le plus ancien, le Théâtre du Rideau Vert, fondé en 1948 dans l'ancien Théâtre Stella par Yvette Brind'Amour et Mercédès Palomino, toujours florissant aujourd'hui. C'est dans les années 1950 que les premiers théâtres d'été permanents ouvrent leurs portes : Le Chanteclerc à Sainte-Adèle et le Théâtre de la Fenière à L'Ancienne-Lorette en 1957, suivi en 1960 par le plus connu d'entre eux, le Théâtre de la Marjolaine, à Eastman. Depuis lors, malgré de fréquentes difficultés financières, le nombre de théâtres d'été ne cesse d'augmenter - on en dénombre plus de 70 aujourd'hui.
Ce renouveau prometteur se produit alors même que Radio-Canada (1952) inaugure la télévision, un redoutable concurrent du théâtre. L'impact de la « boîte à images », tout comme celui de la radio dans les années 1930, est le moins qu'on puisse dire envahissant, parfois même néfaste. Toutefois, en surmontant le problème fondamental de la dispersion démographique, la télévision permet aux dramaturges, comédiens, décorateurs et metteurs en scène de vivre de leur art, ce qui contribue considérablement à la santé générale des arts de la scène au Canada français.
Le financement public
C'est en partie pour contrebalancer la menace que représente la télévision pour le théâtre qu'on crée, en 1957, les deux premiers organismes publics de financement de l'activité culturelle : le CONSEIL DES ARTS DU CANADA et le Conseil régional des arts de Montréal. Le Québec emboîte le pas en 1961 avec son ministère des Affaires culturelles. Leur influence combinée, dans diverses stratégies de subvention des compagnies, a un effet profond sur le développement du théâtre. Le nombre de troupes augmente d'ailleurs énormément, parfois au détriment de la qualité, mais c'est une « élite » du théâtre qui reçoit la majeure partie du financement. Ce déséquilibre encourage l'émergence au Québec d'une « contre-élite » qui s'avère exceptionnellement riche et féconde.
La RÉVOLUTION TRANQUILLE des années 1960 infuse aux arts dramatiques une vigueur sans précédent et un nouveau professionnalisme confiant. De 1959 à 1968, le nombre de nouvelles troupes triple à Montréal seulement. Si elles se révèlent plutôt éphémères, certaines vivent assez longtemps, sous une forme ou une autre, pour avoir une influence encore tangible aujourd'hui : la COMÉDIE CANADIENNE (1958-1970) de Gélinas, par exemple, d'abord vouée aux productions de dramaturges canadiens, les Apprentis-Sorciers (1955-1968) et les Saltimbanques (1962-1968). Certains membres de ces deux dernières poursuivent leurs activités dans le fécond Théâtre d'Aujourd'hui (1968- ) de Montréal.
D'autres compagnies constituées dans l'effervescence des années 1960 prospèrent encore aujourd'hui. Les deux plus importantes sont le Théâtre Populaire du Québec, fondé en 1963 avec le soutien du ministère des Affaires culturelles comme troupe itinérante pour amener le théâtre professionnel - surtout des pièces d'auteurs dramatiques québécois - dans les petites villes du Québec ainsi que de l'Ontario, du Nouveau-Brunswick et de la Nouvelle-Angleterre, et la Nouvelle Compagnie Théâtrale, créée en 1964 et aujourd'hui bien établie à Montréal sur deux scènes, le Théâtre Denise-Pelletier et la Salle Fred-Barry. De plus, pas moins de cinq nouvelles écoles de jeu ouvrent leurs portes au cours de la période 1955-1970. Il faut noter particulièrement celle de l'École Nationale de Théâtre de Montréal, qui a pour premier directeur administratif le Canadien Jean Gascon et pour directeur artistique, Michel Saint-Denis, d'origine française et de réputation internationale.
À ces écoles, s'ajoutent d'importants centres de formation collégiaux et universitaires et les excellentes occasions d'apprentissage que constituent, pour les acteurs et les autres professionnels du théâtre, plusieurs troupes, notamment Carbone 14, le Nouveau Théâtre Expérimental de Montréal, Omnibus et le Théâtre Repère. Leur influence combinée donne naissance à un « style québécois » distinct, tant dans le jeu et la mise en scène que dans la conception de décors et de costumes, un style éclectique libéré du joug des modèles européen et américain.
Le théâtre alternatif
Dans les années 1960 se développe également un phénomène qu'on appelle aujourd'hui le « théâtre alternatif », grandement opposé à ce que bon nombre de gens perçoivent comme une « institution » théâtrale croissante, et menaçant pour l'originalité et l'improvisation. C'est sous la forme d'une association nationale, l'Association canadienne du théâtre d'amateurs (ACTA), que le mouvement s'amorce de façon anodine. Au plus fort de son succès, cette association compte 27 troupes francophones amateurs réparties dans l'ensemble du pays. Rapidement cependant, le groupe s'élargit pour inclure les professionnels et les semi-professionnels et concentre davantage ses objectifs et ses politiques sur les aspirations nationalistes du Québec.
En 1972, l'ACTA change son nom pour Association québécoise du jeune théâtre (AQJT), et les quelques troupes de l'extérieur de la province qui en font encore partie s'en détachent. Depuis lors jusqu'à sa dissolution en 1986, l'AQJT constitue une force dynamique, habituellement partisane et parfois chaotique, qui regroupe des troupes à vocations très différentes, par exemple la création populiste et collective (Le Grand Cirque Ordinaire, 1969-1977), la réforme sociale marxiste (Théâtre Euh!, 1970-1978), une expérimentation vaste et souvent brillante (L'Eskabel, 1971- et Carbone 14, 1975- ) ou un iconoclasme narquois envers à peu près tout (le Théâtre du Même Nom de Jean-Claude Germain, 1969-1972).
Un autre produit de l'effervescence artistique des années 1960 est le Centre d'essai des auteurs dramatiques (CEAD), une association peu structurée de jeunes professionnels du théâtre, fondée en 1964 et jouant encore aujourd'hui un rôle catalyseur. Au départ, le CEAD sert lui aussi de véhicule pour les voix discordantes de ceux qui s'opposent à l'orientation que le théâtre établi semble prendre. Ceux-ci s'en prennent surtout à la suprématie du texte dramatique et à l'injustice avec laquelle les « vedettes » bloquent la voie aux jeunes acteurs. Depuis la disparition de l'AQJT en 1986, le CEAD est le plus important organisme pour les dramaturges du Québec.
Après l'élection en 1976 d'un gouvernement indépendantiste, le Parti québécois, les vigoureuses prises de position politiques, très évidentes dans les textes et les représentations depuis le début des années 1960, se raréfient vite, car le parti au pouvoir représente, du moins en théorie, les intérêts de ceux qui veulent une réforme radicale. Les dynamiques communautés théâtrales du Québec s'ouvrent alors à des considérations plus universelles. Dans les années 1970, apparaissent les premières troupes entièrement féminines. Elles mettent en scène des uvres collectivistes créées par des femmes pour les femmes. Les plus importantes de ces troupes sont, à Montréal, le Théâtre des Cuisines (1973-1981) et le Théâtre expérimental des femmes, qui s'est séparé du Théâtre expérimental de Montréal en 1979 et qui continue d'être la plus grande troupe féministe du Canada et, à Québec, la Commune à Marie, fondée en 1978.
Parfois péniblement didactiques à leurs débuts, ces troupes exaspèrent à l'occasion l'Église et les autres institutions sociales conservatrices (la mise en scène du texte provocateur et antireligieux Les fées ont soif de Denise Boucher soulève, en 1978, une telle controverse publique que le Conseil des arts de Montréal retire ses subventions au Théâtre du Nouveau Monde). Elles se consacrent aujourd'hui à une conscientisation individuelle et collective des femmes menant à une lutte pour l'amélioration des conditions de travail et de salaire, pour la répartition plus juste des tâches domestiques et familiales et contre le harcèlement sexuel et la violence familiale.
Les femmes
Vers la fin des années 1970, les femmes commencent à occuper des postes d'influence comme décoratrices, administratrices et directrices artistiques - poste qui décide de la programmation - dans les grandes troupes de théâtre comme le Théâtre du Nouveau Monde, la Nouvelle Compagnie Théâtrale, le Théâtre populaire du Québec et le Théâtre du Vieux-Québec.
Les jeunes
Les années 1970 sont également témoins de l'expansion du théâtre pour les jeunes publics, dans la foulée du premier Festival québécois de théâtre pour enfants à LONGUEUIL en 1973. Les grandes compagnies ont déjà offert du théâtre aux enfants, surtout en à-côté, à commencer par les Compagnons de Saint-Laurent d'Émile Legault dans les années 1940, suivi par l'Estoc, qui établit dans la capitale en 1965 le Théâtre pour enfants de Québec, la première troupe exclusivement vouée aux jeunes publics, et les prestigieuses troupes du Rideau Vert et de la Nouvelle compagnie théâtrale de Montréal. Dans la seule année 1973, trois compagnies spécialisées voient le jour (le Théâtre de carton, le Théâtre de l'il, présentant des marionnettes, et, la plus en vue, le Théâtre de la marmaille de Montréal). Au moins cinq autres naissent au cours des trois années suivantes. La plupart sont encore actives aujourd'hui, présentant un répertoire riche, qui n'est plus une version édulcorée du théâtre pour adultes, mais qui se base plutôt sur les valeurs et les expériences des enfants, c'est-à-dire sur un univers enfantin, exempt de cette condescendance qui, trop souvent, imprégnait les premières pièces pour enfants. À partir de 1984, les praticiens et les défenseurs de ce théâtre ont leur propre organisme : la Maison québécoise du théâtre pour l'enfance et la jeunesse.
Dans les années 1980, la dramaturgie continue à se désintéresser des sujets politiques étroits. L'auteur et metteur en scène d'origine française Jean-Pierre Ronfard crée Vie et mort du roi boiteux (1981-1982), un remarquable cycle de sept pièces. Vaguement inspirée de Shakespeare, cette vaste et sanglante saga est présentée dans une atmosphère carnavalesque et décrit la vie fictive d'un antihéros, le roi Richard, et de ses divers ennemis. Même si le cycle complet compte 150 personnages et dure 15 heures, on le présente au Nouveau théâtre expérimental de Montréal, au Festival de Lennoxville et au Centre national des Arts d'Ottawa. Les comédies apolitiques connaissent aussi beaucoup de succès, comme en fait foi la production bilingue Broue/Brew, dont la première a lieu en 1979 et qui a dépassé le cap des 1000 représentations. Sept auteurs collaborent à l'écriture de cette pièce, dont l'action se passe entièrement dans une taverne réservée aux hommes dans un quartier ouvrier de Montréal.
Un autre phénomène intéressant est la Ligue nationale d'improvisation (LNI). Elle obtient un succès phénoménal en salle comme à la télévision. Elle présente des « matchs » qui parodient ceux de la Ligue nationale de hockey. Chaque équipe a son uniforme et des arbitres voient au bon déroulement des matchs d'impro dont le format rappelle à la fois la commedia dell'arte et le vaudeville américain. La gloire de Broue et de la LNI et la popularité renouvelée de monologuistes tels que Clémence Desrochers, Yvon DESCHAMPS et Guy Latulippe inquiètent nombre d'observateurs qui y voient une banalisation de la scène.
Ailleurs également, des directeurs artistiques de grands théâtres s'intéressent à des considérations humaines universelles et, de plus en plus souvent, à des auteurs de réputation internationale. Cela permet aux metteurs en scène québécois doués, particulièrement Robert LEPAGE, largement considéré comme le plus brillant metteur en scène de sa génération, de faire valoir leur talent dans le monde.
On découvre d'abord Lepage comme acteur et metteur en scène au Théâtre Repère de Québec, où ses Circulations (1985) et La Trilogie des dragons (1987) font immédiatement sensation dans le milieu. Par la suite, on l'invite à mettre en scène différentes pièces : de grosses productions de Shakespeare à Londres, à Paris, à Munich et à Tokyo où il monte cinq pièces, deux en français et trois en japonais, Bluebeard's Castle de Bartok et Ewartung de Schoenberg pour la Compagnie d'opéra canadienne, le classique de Strindberg A Dream Play à Stockholm en 1994-1995, ainsi que ses propres spectacles multilingues et multidisciplinaires à Ottawa, Toronto, Édimbourg, Londres et ailleurs. D'autres metteurs en scène québécois sont invités à travailler à l'étranger : Gilles Maheu de la troupe Carbone 14, Gabriel Arcand et André Brassard, ce dernier étant réputé pour ses remarquables créations des pièces de Michel TREMBLAY.
Le théâtre des années 1980 et 1990
Les années 1980 et 1990 se caractérisent aussi par des problèmes financiers persistants en raison du peu d'appui de la part des organismes de financement public et d'une économie urbaine généralement en crise. Des difficultés financières et des problèmes de ressources humaines pèsent même sur le vénérable Théâtre du Nouveau Monde au milieu des années 1980 et à nouveau au milieu des années 1990, le forçant à fermer ses portes pour un temps et menaçant sa survie. La plupart des observateurs s'entendent pour dire que les compagnies en concurrence sont beaucoup trop nombreuses pour un marché qui n'a connu qu'une très lente expansion (actuellement, environ 100 troupes professionnelles et 400 troupes amateurs travaillent dans la province), et qu'on doit s'attendre à une régression, étant donné les conditions économiques qui prévalent.
Le Québec entre dans le XXIe siècle, et sa scène demeure vivante et innovatrice, grâce à la génération actuelle d'auteurs, de metteurs en scène, d'acteurs et de décorateurs dynamiques, dont le talent assurera certainement la survie du théâtre francophone au Canada. Le meilleur signe de la santé du théâtre est peut-être son ouverture actuelle à des textes et à des troupes d'autres cultures, remarquable dans la saison 2000-2001 : des pièces de Strindberg, Goldoni, Schnitzler, Chekhov, Ionesco, Shakespeare (deux versions traduites de Macbeth sont présentées simultanément en mars 2001) et autres partagent l'affiche avec des troupes d'Isral, d'Argentine et d'ailleurs.
Les Maritimes
Après la représentation du Théâtre de Neptune de Lescarbot en 1606, quelque 260 années passent avant que l'activité théâtrale en français réapparaisse en ACADIE. Peu après la fondation en 1864 du Collège Saint-Joseph de Memramcook (N.-B.), on y établit une société littéraire et dramatique et des représentations théâtrales ont lieu régulièrement.
Dès leur fondation dans les années 1890, le Collège Sainte-Anne de la Nouvelle-Écosse et le Collège du Sacré-Cur du Nouveau-Brunswick incorporent à leur programme d'activités scolaires des pièces jouées par les élèves. Les textes choisis vont de classiques « expurgés » à des pièces écrites par des membres du clergé français pour le théâtre collégial, mais des professeurs écrivent aussi des textes, comme Alexandre Braud, né en France, avec son drame en vers Subercase, présenté à Sainte-Anne en 1902. Le patriotisme acadien et la loyauté aux origines catholiques et françaises sont l'inspiration de la pièce (Daniel d'Auger de Subercase est le dernier gouverneur français d'Acadie), comme ils le seront pour un autre Français, le père Jean-Baptiste Jégo, qui enseigne aussi à Sainte-Anne. En 1930, on y met en scène avec beaucoup de succès sa pièce Le Drame du peuple acadien, qui sera primée par l'Académie française et publiée à Paris (1932).
Les uvres d'un autre prêtre, James Branch, le premier dramaturge natif de l'Acadie, sont moins didactiques et plus militantes. Leurs textes survivront à leur auteur. Ses trois pièces les plus connues sont écrites et présentées avant son ordination, alors qu'il est encore étudiant au Collège du Sacré-Cur de Bathurst : L'Émigrant acadien (1929), Jusqu'à la mort pour nos écoles (1929) et Vivent nos écoles catholiques! ou La Résistance de Caraquet (1932).
Tout au long des années 1930 et 1940, le théâtre continue à vivre dans les collèges acadiens. On note peu de changement avant le bicentenaire (1955) de la Déportation, qui entraîne une vague d'activité théâtrale à Moncton, désormais considérée comme la capitale culturelle de l'Acadie.
En 1956, Laurie Henri fonde la première compagnie semi-professionnelle, la Troupe Notre-Dame de Grâce (rebaptisée Le Théâtre Laurie Henri après sa mort en 1981). On y produit plusieurs pièces d'auteurs locaux, notamment, en 1956, Les Pêcheurs déportés de Germaine Comeau et Les Crasseux d'Antonine MAILLET. La fondation en 1963 de l'Université de Moncton, une fusion des collèges francophones du Nouveau-Brunswick, renforce cette deuxième renaissance acadienne, dont le dynamisme transparaît dans la musique, la poésie, les uvres romanesques, l'histoire et le théâtre. C'est sans doute La Sagouine (1971) de Maillet, une série de 16 monologues dramatiques sur les propos philosophiques d'une femme de ménage acadienne illettrée, qui en est l'exemple le plus convainquant. D'abord écrits pour une radio de Moncton, on les présente sur scène à Montréal avec beaucoup de succès, et la popularité des versions télévisées française et anglaise est très grande partout au Canada.
Antonine Maillet est aujourd'hui reconnue comme la grande écrivaine de l'Acadie. En 1979, elle reçoit le prestigieux prix Goncourt en France. Par la suite, elle écrit une douzaine de pièces importantes, notamment Évangéline Deusse (1975), dans laquelle une exilée acadienne de 80 ans vivant à Montréal exprime avec éloquence les épreuves et les aspirations de sa nation. Cette préoccupation pour les douleurs passées et leur distillation dans les luttes actuelles est le thème central du théâtre de Maillet, comme elle le sera pour d'autres dramaturges acadiens (Laval Goupil et le prolifique Herménégilde Chiasson en particulier). En 1969, la troupe Les Feux-Chalins de Moncton, fondée par le père Jean-Guy Gagnon et d'autres, porte La Sagouine à la scène avec Viola Léger dans le rôle titre, un rôle qu'elle reprend à la radio et à la télévision dans les deux langues officielles. (Elle dirige actuellement sa propre troupe, la Compagnie Viola Léger.)
Parmi les divers autres groupes théâtraux du Nouveau-Brunswick, dont bon nombre sont éphémères, il faut mentionner : les Productions de l'Étoile (1974) de Caraquet, rebaptisé le Théâtre Populaire d'Acadie en 1976; Les Elouèzes de Maisonnette (1975) de Jules Boudreau, qui produit bon nombre de ses propres pièces, comme Louis Mailloux (1975) bien critiquée; L'Escaouette de Moncton (1977), qui fait la tournée des régions francophones des Maritimes; le Théâtre-Acadie (1981), qui tient un festival annuel à Moncton depuis 1983.
L'Ontario
Ottawa-Hull est le berceau du théâtre de langue française en Ontario, dont Edgar Boutet fait la genèse bien documentée dans son ouvrage 85 ans de théâtre à Hull (1969). On y construit un premier théâtre sous les auspices de l'ordre des Oblats en 1884, et l'activité théâtrale continue par la suite presque sans interruptions. Encouragée par le clergé et par l'Université d'Ottawa, l'activité amateur est constante, son répertoire généralement modelé sur celui du Québec, avec encore peu de tradition régionale de composition.
Les metteurs en scène et directeurs des troupes locales (Wilfrid Sanche, Léonard Beaulne, Ernest Saint-Jean, René Provost) sont dévoués et assurent la survie de la tradition théâtrale pendant les pires années des décennies 1920 et 1930, jusqu'à ce que réapparaisse l'intérêt pour la scène dans le sillon de la fondation de l'école d'art dramatique de M. Provost (la Provost School of Dramatic Arts) à Hull en 1945. La formation, par Guy Beaulne, originaire d'Ottawa, de l'Association canadienne du théâtre d'amateurs en 1958 a un impact considérable sur les troupes régionales de langue française de partout au pays. De plus, on ouvre en 1969 le CENTRE NATIONAL DES ARTS, qui constitue pour les troupes de théâtre locales un « point de ralliement » stable ainsi qu'une source d'inspiration sensationnelle.
Si la région de la capitale nationale est pendant longtemps l'objet principal de l'attention des Franco-Ontariens en ce qui concerne le théâtre, elle n'en est pas le seul : chaque année, quelque 24 troupes de langue française sont actives dans la province. On peut assister tant aux représentations amateurs locales qu'aux pièces hautement professionnelles du Théâtre français de Toronto.
Sudbury est un important centre d'art dramatique à partir de la fondation, en 1970, du Théâtre du Nouvel-Ontario par d'anciens membres du groupe de théâtre de l'Université Laurentienne, dirigés par André Paiement, un jeune dramaturge talentueux (La Vie et les Temps de Médéric Boileau, 1974, Lavalléville, 1975), dont le suicide met fin en 1978 à une carrière prometteuse. C'est aussi à Sudbury que commence la carrière de l'auteur dramatique Jean-Marc Dalpé, dont on considère la pièce Le Chien (1988) comme un succès majeur.
À Vanier résident le Théâtre des Lutins (1971- ) et le Théâtre d'la Corvée (1975- ), de dynamiques troupes présentant une variété de pièces françaises et québécoises. Le théâtre francophone s'installe définitivement à Toronto en 1967 avec la compagnie du Théâtre du P'tit Bonheur (son nom vient du titre de sa première production, Le P'tit Bonheur de l'auteur québécois Félix Leclerc), qui devient totalement professionnelle en 1973 et se rebaptise Théâtre français de Toronto en 1987.
Le Manitoba
Au Manitoba, le théâtre s'anime dans les années 1870, encore sous les auspices du clergé enseignant, dans ce cas-ci au pensionnat des Surs grises, à Saint-Boniface. Bon nombre de pièces présentées dans les établissements d'enseignement sont écrites par des religieux locaux, en particulier par sur Malvina Collette. À mesure que la population et le réseau scolaire croissent, le théâtre devient un élément central de l'activité culturelle locale.
En 1885, quand on confie le Collège de Saint-Boniface aux Jésuites, leur amour du théâtre collégial est vite mis en évidence par la publicité dont ils entourent leurs programmes. Ils attirent des spectateurs de tous les villages qui bordent la rivière Rouge. La formation de sociétés de théâtre amateur indépendantes des écoles constitue l'étape suivante. En effet, des troupes enthousiastes se forment dans chaque village au cours de l'âge d'or des années 1914-1939.
Il y a les groupes de paroisse, les organismes basés sur l'origine nationale (Le Club belge, Les Dames auxiliaires des vétérans français, Les Canadiens de naissance), les troupes formées par des communautés religieuses (les Enfants de Marie, la Ligue des institutrices catholiques de l'Ouest) et les groupes sociopolitiques (le Cercle ouvrier, les Amis de Riel, l'Union nationale métisse). Le plus important et durable de ces regroupements, le Cercle Molière, est fondé en 1925 et toujours prospère aujourd'hui, ce qui en fait le plus vieux théâtre amateur de langue française du Canada. Sous la direction de gens comme André Castelein de la Lande, d'Arthur et Pauline Boutal et leurs talentueux successeurs, cet organisme attire à peu près tous ceux qui s'intéressent aux arts du spectacle au Manitoba. Le succès du Cercle Molière mène à l'établissement du Théâtre Molière d'Edmonton au cours de la décennie suivante, puis de la Troupe Molière de Vancouver, en activité de 1946 à 1967.
Malgré son nom, le Cercle Molière présente, en plus des classiques français, du théâtre moderne et léger de Paris et de Montréal et des uvres de dramaturges franco-manitobains (Je m'en vais Régina de Roger Auger en 1975, Le Roitelet de Claude Dorge, sur l'exécution de Louis Riel, en 1976).
Le nombre de pièces est impressionnant au Manitoba, mais peu sont publiées. Auguste-Henri de Trémaudan, un Québécois qui fait ses études en France, est l'auteur de cinq pièces publiées, et André Castelain de la Lande, un immigrant belge, écrit une cinquantaine d'uvres dramatiques populaires. Plus près de nous, les Manitobains Roger Auger, Roger Legal, Paul Ruest et Rosemary Bissonnette écrivent et publient des drames convaincants. Jusqu'à maintenant, le théâtre est la plus évidente et la plus prospère manifestation de la culture française au Manitoba.
Voir aussi TEXTE THÉÂTRAL EN FRANÇAIS.