Les Béothuks et les Vikings
Lorsque les Vikings s’installent à L’Anse aux Meadows vers l’an 1000 de notre ère, les Béothuks sont parmi les premiers peuples d’Amérique du Nord à faire la rencontre d’Européens. Presque cinq siècles s’écoulent entre le départ des Vikings au bout de quelques années et le retour des Européens, lors de l’expédition cartographique de Jean Cabot en 1497. Presque un siècle plus tard, en 1583, la Grande-Bretagne revendique Terre-Neuve.
Les Béothuks s’éteignent toutefois en raison de la guerre et de la maladie, le coup de grâce étant porté par la mort en 1829 de Shawnadithit, la dernière représentante des siens. Au milieu des années 1800, la population européenne de Terre-Neuve atteint 140 000 habitants. La colonie est alors dirigée, depuis le début du siècle, par un gouverneur britannique, épaulé d’un conseil non élu. Elle obtient toutefois un gouvernement responsable en 1855.
Conférences de Charlottetown et de Québec, 1864
Terre-Neuve ne prend pas part à la Conférence de Charlottetown de septembre 1864, au cours de laquelle les dirigeants de l’Île-du-Prince-Édouard, de la Nouvelle-Écosse, du Nouveau-Brunswick et de la Province du Canada se réunissent pour discuter de la Confédération. Les organisateurs de la conférence estiment que les Terre-Neuviens n’ont aucun intérêt à se joindre à l’union. En octobre de la même année, deux politiciens terre-neuviens assistent toutefois à titre de représentants de la colonie à la Conférence de Québec, où les détails de la Confédération sont peaufinés (voir Résolutions de Québec.) Ambrose Shea and Frederic B.T. Carter de leur nom, ils se rendent à Québec en tant qu’observateurs plutôt qu’en qualité de délégués détenant le droit de vote. De retour à Terre-Neuve, ils rapportent leurs impressions positives de la Confédération, lesquelles font l’objet de débats à l’Assemblée législative de St. John’s.
À Terre-Neuve, l’opinion publique à l’égard de la Confédération est mitigée. L’homme politique Charles Fox Bennett est à la tête du mouvement anti-Confédération (et antifrançais). (Voir aussiLes adversaires de la Confédération.) Il met en garde contre les impôts élevés et la conscription dans les guerres canadiennes. Malgré ses efforts, les élections de 1865 à Terre-Neuve portent un gouvernement pro-Confédération au pouvoir. En vertu d’un vote, les députés de l’Assemblée législative décident toutefois de ne pas débattre des Résolutions de Québec. Conséquemment, la colonie n’envoie pas de délégués à la Conférence de Londres. En novembre 1867, le gouverneur de Terre-Neuve, sir Anthony Musgrave, est invité à la première séance du Parlement canadien, mais seulement à titre d’observateur.
Autres tentatives d’intégration à la Confédération
Le gouvernement pro-Confédération demeure au pouvoir après 1867. Encouragée par sir Anthony Musgrave, l’Assemblée législative continue à envisager l’intégration à la Confédération. À l’été 1869, alors qu’un accord est sur le point d’être conclu, Charles Fox Bennett et ses alliés anti-confédération redoublent d’ardeur dans leurs attaques, s’assurant une opinion publique fermement en leur faveur. Comme le fait remarquer Edith Fowke, « les pro-Confédération font valoir les avantages d’une baisse du prix des produits, tandis que les anti-Confédération soulignent une potentielle hausse des taxes sur les navires et l’équipement de pêche, tout en misant sur la fierté des Terre-Neuviens de constituer la plus ancienne colonie britannique d’outre-mer ». (Voir aussi« The Anti-Confederation Song » [chanson anti-confédération].) Lors des élections houleuses de 1869, le camp anti-Confédération remporte une victoire décisive.
Dans les années 1890, la colonie subit un krach bancaire. Vers 1895, on assiste à un regain d’intérêt pour la Confédération, perçue comme une solution aux problèmes financiers de Terre-Neuve. Les conditions financières offertes par le Canada étant en deçà des exigences de Terre-Neuve, aucun accord n’est conclu. Il faut ajouter que la volonté des Terre-Neuviens de devenir Canadiens demeure faible.
Commission de gouvernement, 1934-1949
La Première Guerre mondiale contribue initialement à la prospérité de Terre-Neuve. La colonie utilise sa nouvelle prospérité pour construire des routes et des chemins de fer. Un régiment de soldats de Terre-Neuve est également envoyé pour combattre auprès des Britanniques. (VoirBataille de Beaumont-Hamel.) Dans les années 1920, Terre-Neuve se retrouve toutefois endettée. La crise des années 1930 ne fait qu’aggraver sa situation. Face à une faillite imminente, les dirigeants de Terre-Neuve suspendent le gouvernement responsable en 1934, consentant à l’établissement d’une Commission de gouvernement non élue et dirigée par la Grande-Bretagne.
La Deuxième Guerre mondiale fait de Terre-Neuve une base stratégique pour les forces armées. Grâce aux investissements militaires américains, britanniques et canadiens, Terre-Neuve retrouve la prospérité, si bien qu’elle finit par rembourser, en 1949, l’intégralité de ses dettes, parvenant même à dégager un surplus de 40 millions de dollars.
Débat sur la Confédération, 1946-1948
En 1946, une Convention nationale élue est établie avec le mandat de se pencher sur l’avenir politique de la colonie. Elle donne lieu à deux années de débats vigoureux afin de savoir s’il faut continuer avec la Commission de gouvernement, se joindre au Canada, ou revenir à un gouvernement responsable en tant que dominion indépendant.
S’ensuit une campagne référendaire âprement disputée. Le camp de la Confédération est dirigé par Joey Smallwood, membre de la Convention nationale. Celui-ci fait valoir que l’intégration au Canada augmenterait le niveau de vie des Terre-Neuviens. L’option de la Confédération jouit notamment de l’appui de la Grande-Bretagne.
Lors du référendum de juin 1948, l’option du gouvernement responsable obtient 44,6 % des voix, celle de la Confédération, 41,1 %, et celle de la Commission de gouvernement, 14,3 %. Un second scrutin est toutefois organisé le 22 juillet 1948 afin de déterminer l’option la plus populaire entre le gouvernement responsable et la Confédération. Au décompte final, la Confédération obtient 78 323 voix (52,34 %) et l’autonomie gouvernementale, 71 344 (47,66 %).
Dixième province
Le Canada se réjouit d’intégrer Terre-Neuve à la Confédération, notamment en raison des craintes de certains de voir les États-Unis, avec leur importante présence militaire dans la colonie, prendre un jour possession du territoire.
Joey Smallwood mène une équipe dépêchée à Ottawa pour négocier les conditions d’entrée avec le premier ministre William Lyon Mackenzie King. Les parlements britannique et canadien approuvent les conditions de l’union, qui sont incorporées par le parlement britannique au Dominion du Canada en vertu de l’Acte de l’Amérique du Nord britannique de 1949. L’entente rétablit également l’Assemblée législative et le gouvernement responsable, dont la suspension remonte à 1933.
Terre-Neuve devient la dixième province du Canada le 31 mars 1949. La première séance de l’Assemblée législative est tenue à St. John’s le 13 juillet 1949. Joey Smallwood est élu et devient le tout premier des premiers ministres provinciaux. Il est considéré, aux côtés de sir Frederic B.T. Carter et sir Ambrose Shea comme l’un des Pères de la Confédération issu de la province. En 2001, la province est officiellement rebaptisée Terre-Neuve-et-Labrador.
Voir aussi: Terre-Neuve se joint au Canada; Pères de la Confédération; Mères de la Confédération; Collection de la Confédération; Chronologie de la Confédération; Terre-Neuve-et-Labrador; Chronologie de Terre-Neuve-et-Labrador; Politique à Terre-Neuve-et-Labrador.