Sir Arthur William Currie (changé de Curry en 1897), soldat et éducateur (né le 5 décembre 1875 à Adelaide (près de Strathroy), en Ontario; décédé le 30 novembre 1933 à Montréal, au Québec). Il était le premier commandant canadien du Corps canadien pendant la Première Guerre mondiale (ses prédécesseurs étaient deux généraux britanniques, E. A. H. Alderson et sir Julian Byng). L’un des généraux les plus talentueux de la Première Guerre mondiale, il dirige le Corps canadien dans plusieurs victoires importantes, en particulier pendant l’Offensive des Cent-Jours.
Commandant de brigade
Arthur William Currie ne possède pas d’expérience militaire professionnelle au début de la guerre, mais il a servi pendant plusieurs années dans la milice canadienne. L’un de ses amis est Garnet Hughes, qui est en même temps un officier subalterne du 50e régiment et le fils du ministre de la Milice et de la Défense, Samuel Hughes. Après l’éclatement de la Première Guerre mondiale, Garnet Hughes intervient pour convaincre son père d’offrir à son ami un poste au sein du Corps expéditionnaire canadien. En septembre 1914, Arthur William Currie devient commandant de la 2e Division d’infanterie canadienne.
Cependant, avant d’accepter ce poste, Arthur William Currie enlève plus de 10 000 $ du 50e régiment pour rembourser des dettes contractées en spéculation foncière. Il s’agit d’une décision désespérée pour éviter de faire faillite, mais elle reviendra le hanter.
En octobre 1914, il traverse l’Atlantique avec le premier contingent canadien et arrive en Angleterre vers le milieu du même mois. Les soldats canadiens passent l’hiver pluvieux à Salisbury Plain, où ils s’entraînent sous la commande du général britannique E. A. H. Alderson.
Les Canadiens traversent la Manche pour se rendre sur le continent européen en février 1915. En avril, ils sont déjà rendus au redoutable saillant Ypres, où ils participent à la Deuxième bataille d’Ypres (avril-mai 1915), pendant laquelle l’armée allemande emploie pour la première fois le chlore gazeux. La brigade du commandant d’Arthur William Currie perd environ la moitié de ses soldats lors de cette bataille.
Commandant de la 1re Division du Canada
À la suite de la création d’une deuxième division du Canada, le général E. A. H. Alderson est promu pour commander le nouveau Corps canadien, tandis qu’Arthur William Currie devient le commandant de la 1re Division du Canada, en septembre 1915. (En mai 1916, Julian Byng remplace le général E. A. H. Alderson comme commandant du Corps canadien.) En juin 1916, la division du commandant Arthur William Currie participe à une contre-attaque bien planifiée et bien réussie contre les Forces allemandes au mont Sorrel. En septembre, le Corps canadien arrive à la bataille de la Somme. Tout comme le reste du Corps, la 1re Division du Canada, commandé par Arthur William Currie, souffre de grandes pertes sans avoir obtenu le moindre avantage. Cependant, les Canadiens font preuve de leur courage à la bataille de la crête de Vimy (avril 1917), lors d’une victoire orchestrée par le commandant Julian Byng et exécutée par Arthur William Currie et les autres officiers et les hommes du Corps.
Commandant du Corps canadien
Lorsque le commandant Julian Byng est affecté à l’une des armées britanniques, il recommande de désigner Arthur William Currie comme son remplaçant. Celui-ci est rendu chevalier et devient le commandant du Corps canadien le 9 juin 1917. Il est le premier Canadien à occuper ce poste. Peu après, il va à l’encontre du désir de Samuel Hughes (déjà parti du Cabinet), qui cherche la promotion de son fils au poste du commandant de la 1re Division. Arthur William Currie promeut plutôt Archibald Cameron Macdonell, se faisant ainsi l’ennemi de la famille Hughes.
C’est à peu près à ce moment que des rumeurs de détournement commencent à circuler au sujet d’Arthur William Currie. En 1917, les 10 000 $ manquants attirent l’attention du premier ministre Robert Laird Borden, qui refuse de traduire le plus grand soldat du pays devant le tribunal militaire. Celui-ci emprunte de l'argent pour rembourser les fonds, mais les rumeurs ont nui à sa réputation parmi les politiciens au Canada. En contraste, il demeure bien respecté sur le front en tant que chef militaire.
En août 1917, Arthur William Currie et le Corps canadien obtiennent une victoire durement gagnée à la bataille de la cote 70. En octobre, ils se déplacent vers le nord pour rejoindre la campagne à Passchendaele. Le commandant Arthur William Currie planifie soigneusement l’attaque en quatre étapes, qui a lieu du 26 octobre au 10 novembre. Les succès des Canadiens à la bataille de la cote 70 et à Passchendaele prouvent la valeur du commandant et du Corps canadien. Par contre, les près de 30 000 soldats tués ou blessés pendant la campagne indiquent qu’il s’agit de victoires chèrement payées.
Les pertes importantes sur le front font en sorte que le recrutement ne répond plus à la demande. Cette réalité, combinée à la pression de la part du premier ministre Robert Laird Borden et de la coalition de l’Union, pousse Arthur William Currie à appuyer publiquement la conscription en décembre 1917. Les politiciens libéraux le critiquent et l’accusent d’un mépris insensible pour la vie des soldats.
Arthur William Currie est le mieux connu pour ses capacités de planification et de gestion au cours de l’offensive la mieux réussie de toutes les offensives alliées, l’Offensive des Cent-Jours (8 août au 11 novembre 1918), qui mène à la défaite de l’Allemagne et à la fin de la guerre. Sous sa direction, les soldats canadiens remportent plusieurs victoires, y compris les batailles d’Amiens, de Cambrai, de Valenciennes et de Mons. Cependant, le Corps canadien perd également 45 800 soldats pendant cette période, ce qui contribue aux rumeurs que le commandant est un chef sans cœur ni pitié, qui sacrifie les soldats canadiens pour se faire un nom.
Réputation et controverse
Arthur William Currie est largement perçu comme l’un des généraux les plus talentueux de la Première Guerre mondiale. Parmi ses forces figurent l’accent mis sur la planification et la préparation, et sa reconnaissance de l’importance de l’artillerie dans la guerre des tranchées. Le premier ministre Robert Laird Borden l’estime grandement, et le premier ministre britannique en temps de guerre David Lloyd George l’appelle un « brillant commandant militaire ». Il y a même des indications que ce dernier ait songé à nommer Arthur William Currie « commandant » de toutes les Forces britanniques.
Par contre, il est grandement critiqué pour sa décision des derniers jours de la guerre d’engager les soldats canadiens dans un certain nombre de batailles qui ont coûté cher (et qui seraient, selon certains, inutiles), en particulier la bataille de Mons, en Belgique, la veille de l’armistice. Une grande partie de ces critiques résulte de l’animosité personnelle et politique entre Arthur William Currie et Samuel Hughes, qui était le ministre de la Milice et de la Défense au début de la guerre. Le 4 mars 1919, Samuel Hughes critique ouvertement Arthur William Currie dans la Chambre des communes pour avoir « sacrifié inutilement la vie des soldats canadiens ». Cet énoncé contribue à la controverse d’après-guerre au sujet de son fonctionnement de commandement général.
Le 23 août 1919, Arthur William Currie est nommé « inspecteur général » de la milice canadienne. Il quitte ce poste en mai 1920 pour devenir recteur et vice-chancelier de l’Université McGill, un poste qu’il occupera jusqu’à sa mort. Même sans avoir lui-même bénéficié d’une formation postsecondaire, il connaît un succès extraordinaire en tant qu’administrateur universitaire, à une époque particulièrement importante de l’évolution de l’Université McGill.
Pourtant, les accusations au sujet de son fonctionnement de commandement général le dérangent manifestement, même s’il n’y répond pas publiquement pendant plusieurs années. Cela change en 1927, lorsqu’un journal de petite ville, l’Evening Guide (de Port Hope, en Ontario), le dépeint comme un boucher pour avoir commandé l’attaque sur Mons. Arthur William Currie poursuit le journal pour diffamation, et l’affaire judiciaire qui en résulte en 1928 légitime ses actions militaires.
Toutefois, la controverse n’est pas sans conséquence, car Arthur William Currie subit un accident vasculaire cérébral peu de temps après le procès. Après plusieurs années de mauvaise santé, il subit un deuxième accident vasculaire cérébral au début novembre 1933 et meurt vers la fin du mois, à 58 ans.