Saunders, sir Charles Edward
Sir Charles Edward Saunders, fonctionnaire et phytogénéticien (London, Ont., 2 févr. 1867 -- Toronto, 25 juill. 1937), troisième fils de William SAUNDERS. Il est à l'origine de l'énorme production commerciale de blé de première qualité au Canada en sélectionnant et testant le BLÉ MARQUIS avant de l'introduire dans l'Ouest canadien. Tout comme ses quatre frères, il aide son père dans ses travaux couvrant des domaines aussi variés que l'hybridation des plantes, l'entomologie et la musique.Charles est le moins robuste de la famille, mais il est peut-être le plus doué. Après des études à l'U. de Toronto et à l'U. John Hopkins, il est professeur de chimie à la Central U. au Kentucky de 1892 à 1893. De 1894 à 1903, il se consacre à l'étude de la musique et enseigne les techniques vocales. En 1903, son père, reconnaissant sa méticulosité et sa persévérance, le nomme expérimentateur au Service des fermes expérimentales. (Le titre de ce poste change de nom et devient spécialiste en céréales en 1905, puis spécialiste des céréales pour le Dominion en 1910.)
Saunders applique aussitôt des méthodes scientifiques à sa nouvelle tâche et passe ses étés à sélectionner les épis de blé un à un parmi le matériel dont la sélection se faisait auparavant en lot. À partir d'un croisement entre le Hard Red Calcutta et le Red Fife, effectué en 1892 par son frère A.P. Saunders, il obtient une nouvelle variété de blé, le Markham.
Le blé Markham ne produit cependant pas de lignée uniforme même si bon nombre de plants présentent des caractéristiques appréciables. Saunders sélectionne donc soigneusement les épis parmi les jeunes plants avec tige rigide et insiste sur l'importance de faire pousser les nouveaux plants séparément sans les mélanger avec d'autres variétés. La sélection est rigoureuse et seules les meilleures lignées sont retenues. Il détermine quelles lignées ont une forte dose de gluten en mâchant des échantillons de grains et innove en faisant cuire des petits pains afin d'en mesurer le volume. Il donne à la meilleure lignée le nom de Marquis. En 1907, les graines excédentaires sont envoyées à Indian Head, en Saskatchewan, pour des expériences plus élaborées.
D'après les rapports annuels de Saunders, le blé Marquis s'est adapté de manière phénoménale aux conditions de la Saskatchewan : il a une semaine d'avance sur le blé Red Fife, obtient des rendements élevés et fait un excellent pain. Le blé Marquis demeure encore aujourd'hui la variété de référence pour la panification. En 1909, il y a suffisamment de graines pour les besoins de 407 agriculteurs et, l'année suivante, 2112 agriculteurs reçoivent des échantillons. De la sorte, les fermiers de la Saskatchewan et de l'Alberta peuvent cultiver leur blé Marquis en toute confiance, ce qui n'était pas le cas jusque là avec la variété Red Fife, qui était bien souvent tardive et était de ce fait endommagée par le gel.
En 1920, 90 p. 100 du blé cultivé dans l'Ouest canadien est de la variété Marquis. On le cultive aussi aux États-Unis sur une grande superficie. Le blé Marquis est une variété hâtive et permet ainsi d'éviter les dommages causés par le gel. Il donne un aussi bon rendement, sinon meilleur, par rapport aux autres variétés hâtives. On en produit une farine « ferme » très en demande chez les minotiers et les boulangers du monde entier. C'est la variété Marquis qui fait la renommée du Canada comme producteur d'un blé dur et roux de printemps, lequel rapporte annuellement des millions de dollars en revenus d'exportation aux agriculteurs et au pays. Saunders applique aussi ses méthodes de sélection de lignée unique à la culture de l'orge, de l'avoine, des pois, des fèves et du lin, ce qui lui permet d'introduire de nouvelles et d'excellentes variétés pour chaque type de culture.
En 1922, après 19 ans de travail comme phytogénéticien, Saunders est épuisé physiquement et démissionne de son poste. Il se rend à Paris où il étudie la littérature française à la Sorbonne pendant trois ans. Il retourne à Ottawa, puis s'installe à Toronto en 1928. Il est fait Chevalier en 1934. Il donne alors des conférences sur le blé Marquis et sur la langue française. La musique reste sa principale source de réconfort jusqu'à sa mort.