Raphaëlle de Groot, artiste (née le 21 octobre 1974 à Montréal, Québec). Cette artiste contemporaine s’est illustrée sur la scène nationale et internationale. Elle a reçu le Prix artistique Sobey en 2012 et représente le Québec lors de la 55e Biennale de Venise en 2013.
Formation et début de carrière
Raphaëlle de Groot détient une maitrise en arts visuels et médiatiques de l'Université du Québec à Montréal (UQAM). Dès le début de sa carrière, de Groot se lance dans plusieurs projets parallèles soulevant des problématiques d’ordre sociologique qui s’avèreront omniprésentes tout au long de sa production.
Dans Dévoilements (1998-2001), l’artiste travaille en collaboration avec des sœurs de la congrégation des Religieuses hospitalières de Saint-Joseph (Montréal). Alors que les sœurs dessinent des objets de la collection muséale de leur communauté sans pouvoir regarder leurs mains à l’ouvrage, de Groot réalise le portrait de ces femmes avec la même restriction physique.
Pour son œuvre Colin-maillard (1999-2001), à l’occasion d’un échange mis sur pied par le centre DARE-DARE à Montréal, l’artiste approche neuf personnes non-voyantes de la région de Liège en France et leur demande de dessiner des objets — et même parfois son visage — en touchant ces dits-objets de leur main libre. Simultanément, de Groot réalise leur portrait, toujours à l’aveugle. De ces rencontres créatives sont prélevées des traces matérielles — dessins, objets copiés, photographies de la rencontre, etc. — exposées plus tard en galerie. Les éléments présentés au public expriment donc les nombreuses étapes d’un processus d’interaction complexe entre l’artiste et l’Autre dans un contexte limitatif et source de certains inconforts.
Mi-carrière
À partir de 2005, de Groot intègre graduellement de façon active le public dans son processus créatif en demandant aux visiteurs de ses expositions de capturer des images de ses performances en galerie, ou de repartir avec des morceaux ou des résidus matériels de ses installations présentées. Ses expositions, par le fait même, ne sont pas un produit fini, un résultat fixe, mais s’insèrent dans la démarche interactive que l’artiste instaure avec son public.
Dans le cadre de L’art d’accommoder les restes (2008), de Groot travaille de pair avec des artistes de l’École supérieure des beaux-arts de Cornouaille à Quimper, en France, à qui elle demande d’accumuler, de trier et de réfléchir des restes de matériaux artistiques écartés. Par la suite, au centre d’art contemporain Quartier à Quimper, les rebus ayant survécu au processus sont exposés et offerts au public. Dans le cas de En exercice (2006), les spectateurs sont encouragés à filmer des segments d’une performance de l’artiste se déroulant sur plusieurs jours. Alors que de Groot tente d’accomplir divers exercices malgré des restrictions physiques d’ordres divers qu’elle s’impose, les membres du public deviennent eux-mêmes producteurs de témoignages de leur interaction avec de Groot.
Les vestiges matériaux nés des performances et expériences sociales et créatives de l’artiste sont parfois réutilisés par cette dernière dans le cadre d’autres projets. De Groot réalise des portraits d’anciens clients d’une banque abandonnée grâce à des descriptions récitées par des visiteurs lisant de vieilles fiches d’identité dans le cadre de Portraits de clients (2007). En parallèle, l’artiste produit des portraits sur un papier blanc recouvrant son visage à partir de descriptions de participants dans Il volto interiore (2007). Les portraits réalisés au cours de ces deux projets de 2007 sont repris par la suite dans Tous ces visages (2007-2008). L’installation réunit des traces des expériences préalables (masques dessinés ou peints, vidéo et photographies captant les interactions avec les participants) qui relatent les étapes d’un processus de longue haleine ayant pour but de développer une réflexion sur les limitations du vocabulaire et sur l’inatteignable.
Productions récentes
Plus récemment, en 2013, de Groot propose un travail de relecture, de réappropriation et de modification d’éléments matériels récoltés à travers les sept dernières années de performances. Dans Stock (2013), elle crée une installation à partir de ces débris et fragments. La même année, lors de sa performance En exercice à Venise dans le cadre de la 55e Biennale de Venise, l’artiste se fabrique un accoutrement restreignant ses mouvements et un masque lui couvrant les yeux à partir de ces mêmes éléments plastiques. Elle déambule en gondole et à pied à travers la ville italienne, environnement beaucoup plus imprévisible et déroutant pour l’artiste s’inscrivant habituellement dans des lieux restreints et contrôlés. De Groot se projette dans une interaction avec un public beaucoup plus large, et pas nécessairement intégré à cet échange de manière volontaire. Ses créations plus récentes démontrent une tentative d’injecter les vestiges matériels de ses rencontres, de même que son propre corps actant, dans des contextes narratifs, relationnels et environnementaux élargis.
Prix et reconnaissance
Elle a exposé des installations multidimensionnelles et réalisé des performances interactives dans la cadre de nombreuses expositions collectives, notamment la Triennale québécoise de 2008, et présenté des expositions individuelles dans plusieurs galeries montréalaises et à l’occasion de festivals internationaux. Elle reçoit le prix Pierre Ayot en 2006 et se voit décerner le Prix artistique Sobey en 2012. Elle est représentée par la Galerie Graff, à Montréal, de même que par la Z2O Galleria – Sara Zanin, à Rome. En parallèle, depuis 2008, elle occupe occasionnellement le poste de chargée de cours à l’UQAM, où elle enseigne les arts visuels et médiatiques.