Les premiers migrants polonais arrivent au Canada peu après le premier partage de la Pologne à la fin du 18e siècle. Selon le recensement de 2021, au Canada, 982 820 personnes déclarent une ascendance polonaise totale ou partielle et 176 010 personnes ont le polonais comme langue maternelle.
Contexte
En 1772, la Russie, la Prusse et l’Autriche commencent à se partager les terres de la république de Pologne-Lituanie. Les premières vagues d’émigration polonaises sont motivées par l’assimilation des terres polonaises, la persécution religieuse, les conditions de vie difficiles dans les villages en raison de la surpopulation et le manque d’occasions économiques dans les villes.
Migration et installation
L’immigration polonaise au Canada connaît six vagues importantes : de 1854 à 1901, de 1902 à 1915, de 1916 à 1939, de 1944 à 1956, de 1957 à 1979 et de 1980 à 1993.
La première vague d’immigrants polonais au Canada arrive en 1858 depuis la région kachoube, au nord de la Pologne. Plusieurs d’entre eux s’installent près de Renfrew, dans l’est de l’Ontario, et notamment à Wilno, une ville reconnue comme étant l’hôte de la plus vieille communauté de Polonais au Canada. En 1862, un autre groupe de Polonais arrive au pays et s’installe au sud-ouest de l’Ontario, dans la ville de Berlin (Kitchener).
La deuxième vague d’immigration polonaise au Canada survient après la Première Guerre mondiale, surtout entre 1921 et 1931. Tout comme la première vague, elle comprend beaucoup de familles provenant de villages et de petites villes du territoire occupé par les Autrichiens. Parmi les paysans diligents et religieux, plusieurs reçoivent des concessions de terre du gouvernement ou achètent des propriétés au Manitoba, en Saskatchewan et en Alberta pour y bâtir des fermes. D’autres travaillent plutôt sur la construction de chemins de fer ou dans les mines de charbon. La deuxième génération d’immigrants polonais s’installe généralement dans les plus grandes villes, où plusieurs lancent de petites entreprises.
Contrairement à la majorité des premiers immigrants polonais, qui n’arrivent pas directement de la Pologne, les migrants de 1916 à 1939 arrivent d’une Pologne déjà indépendante et s’installent principalement dans les Prairies (du moins jusqu’en 1931). Jusqu’en 1944, Winnipeg, au Manitoba, abrite la plus grande population polonaise au pays.
La vague d’immigrants suivant la Deuxième Guerre mondiale est principalement formée d’anciens soldats des forces armées polonaises ayant combattu en Europe de l’Ouest, d’anciens prisonniers des camps de concentration ou de travail forcé et des réfugiés politiques de la Pologne communiste. La moitié d’entre eux s’installent en Ontario.
De 1957 à 1979, des immigrants arrivent encore une fois directement de la Pologne. La vague suivante, celle de 1981 à 1993, est motivée par l’importante crise économique et politique qui secoue leur pays d’origine. Une fois de plus, 50 % d’entre eux s’installent en Ontario.
Vie économique
Les premiers immigrants polonais participent à la colonisation des prairies du Manitoba, de la Saskatchewan et de l’Alberta et forment un fort pourcentage de la main-d’œuvre dans les mines, l’industrie forestière et les travaux publics. Beaucoup de nouveaux arrivants d’origine polonaise choisissent de s’installer au Manitoba, près de Springfield, St. Clements, Brokenhead, Lac du Bonnet, Whitemouth, Gimli, Bifrost, Glenella, Rosedale, McCreary et Dauphin. Dans ces régions sont alors déjà installés des fermiers ukrainiens, souvent originaires de villages voisins de la Pologne (voirCanadiens ukrainiens).
Un important mouvement d’immigrants vers les grands centres débute dans les années 1930. Les membres de la deuxième génération et les immigrants d’après la Deuxième Guerre mondiale, mieux nantis que leurs prédécesseurs, peuvent compter sur une expérience professionnelle et des connaissances techniques. Ils fondent ainsi leurs propres entreprises, occupent des postes de direction dans l’industrie et se distinguent dans les domaines de l’éducation supérieure et des services sociaux et de santé.
Vie sociale, culturelle et communautaire
Traditionnellement, la majorité des Polonais sont catholiques, mais d’autres sont luthériens ou membres de l’Église unie. Une Église catholique polonaise, non affiliée à l’Église catholique romaine, compte des paroisses dans différentes villes du Canada ( voirCatholicisme). Les paroisses forment les premières unités organisationnelles du peuple, fournissant ainsi un cadre à leur vie communautaire et sociale. Les organismes laïques n’apparaissent dans les villes que peu avant la Deuxième Guerre mondiale.
Pendant les années 1930 naissent des clubs sociaux qui aident à préserver les coutumes et les traditions des Polonais, ce que le gouvernement polonais appuie par l’entremise de ses consulats. Des caisses de crédit polonaises sont fondées partout au Canada. La première, la caisse de crédit Saint-Stanislas, est créée à Toronto, en Ontario. Au milieu des années 1950, des femmes fondent un organisme autonome et indépendant, la Federation of Polish Women in Canada (fédération des femmes polonaises du Canada), qui s’intéresse aux questions culturelles et politiques. Différents groupes folkloriques ou ensembles de danse font aussi leur apparition à divers moments et dans diverses communautés.
Au cours de l’histoire, l’Église catholique joue un rôle très important dans la vie des Canadiens d’origine polonaise, particulièrement pendant les périodes difficiles. Pour plusieurs immigrants, l’Église constitue le seul contact avec leur terre d’origine et leur culture. Les prêtres se font conseillers, défenseurs, porte-parole, chefs religieux et leaders communautaires.
Le premier journal polonais, fondé à Winnipeg en 1904, n’a qu’une courte durée de vie (voir aussiJournaux au Canada : de 1800 aux années 1900). Le second, Gazeta Katolicka (Gazette catholique) est fondé à Winnipeg en 1908. La presse polonaise au Canada est encore en activité aujourd’hui.
Parmi les écrivains et les poètes canadiens polonais, mentionnons Louis Dudek, W. Iwaniuk, B. Czaykowski, Florian Smieja, J. Ihnatowicz, A. Busza, J. Abramow-Newerly, W. Liebert, A. Tomaszewski, J. Tomaszewski et E. Ejbich, ainsi que les feus Zofia Bohdanowicz, B. Czaplicka, A. Grobicki, A. Poznanska-Parizeau et Danuta Bienkowska. Parmi les artistes, on retrouve notamment K. Bryzgalski, J. Kolacz, E. Kujawska, A. Pawlowski, L. Wyczolkowski, E. Koniuszy, S. Katski, T. Jaworska, G. Staron, M. Ciechomska, B. Michalowska, J. Lubojanska, J. Kolaer et G. Denisiuk, ainsi que les feus E. Chrúscicki, H. Hoenigan, K. Sadowska et M. Schneider.
Immigrants polonais célèbres
Dominik Barcz, commerçant de fourrures originaire de la ville portuaire de Gdansk, sur la côte de la mer Baltique, est le premier Polonais à immigrer au Canada. Arrivé en 1752, il s’installe à Montréal. Quelques années plus tard, en 1757, serait également arrivé Charles Blaskowitz, un cartographe et arpenteur général adjoint.
En 1776, deux autres importants immigrants polonais font leur arrivée au Canada : Leveright Pinze, chirurgien des forces auxiliaires du Brunswick, et August Franz Globensky, chirurgien militaire du régiment Hesse-Haynau, qui se rend avec son régiment dans la ville de Québec. (Le petit-fils de ce dernier, Charles Auguste Maximilien Globensky, est élu à la Chambre des communes, à Ottawa, près d’un siècle plus tard, en 1875.)
Aleksander E. Kierzkowski, un ingénieur s’impliquant activement dans la politique du comté de Saint-Hyacinthe (Québec) en 1867, arrive quant à lui en 1841. Parmi les régiments suisses ayant combattu à Fort Barrie en 1812 se trouvent une douzaine de Polonais des anciennes légions napoléoniennes. Sir Casimir Gzowski, éminent ingénieur civil, constructeur de chemins de fer et activiste pour des causes sociales, arrive des États-Unis en 1842. (Son arrière-petit-fils, Peter Gzowski, devient plus tard l’un des plus célèbres animateurs de télé anglophones au Canada.) Izaak Hellmuth, originaire de Varsovie, en Pologne, arrive de l’Angleterre. Il devient l’un des fondateurs du Collège universitaire Huron et de l’Université Western, en Ontario.
Politique
Jusqu’en 1980, la majorité des Polonais appuient les libéraux lors des élections fédérales. Stanley Haidasz, né à Toronto de parents polonais, est le premier député libéral polonais à être élu. Il devient plus tard ministre du Multiculturalisme dans le gouvernement de Pierre-Elliott Trudeau et le premier représentant d’origine polonaise au Sénat. Trois ministres d’origine polonaise font partie du gouvernement néo-démocrate de la Saskatchewan jusqu’à sa défaite en 1982. Donald Mazankowski est quant à lui vice-premier ministre au sein du gouvernement conservateur fédéral de Brian Mulroney.
Population
Selon le recensement de 2021, 982 820 personnes au Canada déclarent une ascendance polonaise totale ou partielle. Le nombre de personnes ayant le polonais comme langue maternelle est à la baisse : en 2006, 217 605 Canadiens affirment avoir le polonais comme langue maternelle. Ce nombre atteint 201 240 en 2011, 191 775 en 2016 et 176 010 en 2021.
Identification collective
Un grand appui politique et financier est apporté à la Pologne pendant la Deuxième Guerre mondiale, alors que le pays est occupé par les Allemands, et lorsque le gouvernement communiste tente de supprimer l’Église. Le lien entre les Polonais et leur pays d’origine est entretenu au moyen de voyages organisés, de visites familiales et de cours de langue polonaise pour les jeunes. À la fin du 20e siècle, la fierté nationale est renforcée par l’élection du pape Jean-Paul II en 1978 ainsi que l’attribution du prix Nobel de littérature à Czeslaw Milosz en 1980 et celui de la paix à Lech Walesa en 1983.
Patrimoine au Canada
Le Canadian Polish Research Institute (Institut de recherche canado-polonais), fondé en 1956, mène des études sur la population polonaise au Canada. Il possède une bibliothèque et des archives imposantes et publie les résultats de ses recherches.
L’Institut polonais des arts et des sciences au Canada, dont le siège social est situé à Montréal, est quant à lui créé en 1943. Associé à des établissements universitaires de la Pologne et du Canada (y compris l’Université McGill), il a pour mission de promouvoir le patrimoine intellectuel et culturel de la Pologne et des Polonais grâce à des événements et de la recherche.
En 2018, un monument est érigé au Quai 21, à Halifax, en Nouvelle-Écosse, en l’honneur de la communauté canadienne polonaise.