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Acte pour encourager la civilisation graduelle

​L’Acte pour encourager la civilisation graduelle des tribus sauvages en cette Province est adopté par le cinquième Parlement de la Province du Canada (officiellement le Haut-Canada et le Bas-Canada) en 1857.

L’Acte pour encourager la civilisation graduelle des tribus sauvages en cette Province est adopté par le cinquième Parlement de la Province du Canada (officiellement le Haut-Canada et le Bas-Canada) en 1857. Ce qu’on appellera plus tard l’Acte pour encourager la civilisation graduelle n’est qu’une des nombreuses utilisations de la politique gouvernementale par l’État dans le but d’assimiler les peuples autochtones aux coutumes économiques et sociales des colons européens.

Description

L’Acte pour encourager la civilisation graduelle cherche à assimiler les peuples autochtones (alors appelés « Indiens » ou « Sauvages ») en encourageant l’émancipation, ainsi que l’adhérence à la définition européenne de la propriété individuelle des terres et de l’accumulation de la richesse. Selon l’Acte, un « Indien éduqué », sans dette et de « bonne moralité » peut faire la demande d’une concession de terre auprès du gouvernement fédéral. À l’époque, les administrateurs coloniaux croient que les droits de propriété individuelle seraient bénéfiques aux peuples autochtones, en dépit des dispositions de la Proclamation royale de 1763 (décrétée par le roi George III), qui reconnaissaient les droits territoriaux des Autochtones. On croyait alors que les peuples autochtones abandonneraient volontairement les droits issus des traités, qui seraient remplacés par des terres morcelées en lots de colonisation. De plus, ceux qui pourraient se conformer aux définitions restrictives de l’époque quant à l’octroi des pleins droits de citoyenneté recevraient le privilège de voter.

Politique de « civilisation »

La question des peuples autochtones et de leurs droits ancestraux est longtemps l’objet de débats internes entre les diverses colonies britanniques en Amérique du Nord, qui peinent à trouver une solution satisfaisante. Certains historiens avancent que pour les administrateurs coloniaux, la « civilisation » des Autochtones ne se traduisait pas nécessairement par leur assimilation. En fin de compte, l’opportunisme et le désir de régler le problème sans trop dépenser expliqueraient la politique britannique de « civilisation ». Cependant, d’autres historiens avancent que le manque de moyens ne constitue pas la raison principale derrière la définition du statut d’« Indien » ou la politique de civilisation. En signant un acte officiel d’émancipation, en 1857, la branche coloniale de l’Empire britannique cherche à abolir les droits des peuples autochtones, et mettre en place un système par lequel ces divers peuples pourraient être culturellement absorbés, ou assimilés, par les populations coloniales.

Lois impériales

L’Acte pour encourager la civilisation graduelle illustre les ambitions expansionnistes d’un État canadien en pleine croissance, qui, vers la fin des années 1850, s’approchait de la fédération à grands pas. L’Acte de 1857 pose un précédent qui justifiera d’autres projets de loi paternalistes, notamment l’Acte pourvoyant à l’émancipation graduelle, de 1869, qui vise lui aussi à limiter l’autodétermination des Autochtones. Ces Actes seront consolidés par la Loi sur les Indiens, de 1876, qui incorpore plusieurs lois impériales existantes et contourne officiellement les droits des peuples autochtones tels que définis par la Proclamation royale de 1763. Le fait qu’une seule personne ait été volontairement émancipée sous l’Acte pour encourager la civilisation graduelle indique que la loi coloniale semble avoir été accueillie avec peu d’enthousiasme par les Autochtones. Chaque tentative d’assimiler des peuples autochtones à la culture eurocanadienne s’est heurtée à leur résistance et à celle de leurs communautés.

Controverse

L’Acte pour encourager la civilisation graduelle, le système des traités, ainsi que d’autres projets de loi adoptés avant et après la Confédération ont été très critiqués en raison de leur nature coercitive, leur racisme implicite et leur mépris pour la souveraineté des peuples autochtones du continent, dont les coutumes politiques, économiques et culturelles étaient très variées. L’Acte, ainsi que d’autres politiques du même genre, traite les Autochtones comme des enfants, cherchant à limiter leur pouvoir pour assouvir les désirs expansionnistes de l’État canadien grandissant. Plusieurs, notamment des Autochtones, des historiens et des théoriciens critiques, ont soutenu que l’effort généralisé visant à priver les peuples autochtones de leurs droits à l’aide de ces mesures régressives constitue un génocide culturel. Vus sous cette perspective, les pensionnats indiens ne sont qu’un des nombreux efforts tragiques et accablants visant à effacer l’identité autochtone dans le but de faciliter la formation de l’État canadien.

Conséquences

L’Acte pour encourager la civilisation graduelle est l’un des derniers projets de l’administration impériale britannique sur les colonies restantes en Amérique du Nord, devenues un coûteux fardeau pour l’empire vieillissant. Dans le concert de la colonisation, des formes d’humanitarisme libéral justifient des efforts paternalistes, visant à forcer les communautés autochtones à se conformer au concept occidental de la communauté sédentaire, chrétienne et agricole. Cette loi illustre la nature des politiques coloniales cherchant à décourager les peuples autochtones d’exprimer leurs coutumes et leurs valeurs, tant sociales que culturelles. Cette politique coercitive de la « civilisation » sera maintenue par l’État et la société, avec le soutien de nombreux employés gouvernementaux, missionnaires chrétiens et simples citoyens pendant la majorité du XXe siècle. Par conséquent, plusieurs aspects fondamentaux de l’identité et de la cohésion sociale autochtone seront longtemps moqués, et certains seront perdus.